Le collectif « nos services publics » vient de publier un rapport (véritable étude d’impact qui aurait dû être mise à la disposition des élus dans les débats parlementaires) sur les conséquences des mesures de préférence nationale sur les personnes concernées dans la loi Darmanin- Ciotti-Le Pen.
La préférence nationale a la préférence du capital
Préférence nationale, préférence du capital ! (vieil air connu, mais qui retrouve là une actualité)
Par Étienne Adam. Le 19 janvier 2024
Les données
La presse a rendu compte des chiffres de l’hypothèse la plus basse : 110 000 personnes seraient frappées par des pertes importantes de revenus et 30 000 enfants seraient réduits à la grande pauvreté1qui, soit dit en passant, est le niveau actuel du RSA soit la moitié du seuil de pauvreté tel qu’il est habituellement défini (1/2 salaire médian) : ce chiffre ne prend pas en compte l’ensemble des personnes concernées. En fait, ce sont plus de 70 0000 qui pourraient être impactées. Ces données ont été volontairement cachées dans le débat public sur la loi immigration comme beaucoup d’autres données. Les porteurs de la loi ( Macronistes, LR, RN) fondent leur démagogie antimigrants sur le mensonge (a minima par omission). Et tout cela est repris en boucle par les grands médias : dans un tel climat de désinformation, comment s’étonner des résultats des sondages qui sont largement favorables à une loi dont l’image est « gentil avec les gentils, méchants avec les méchants ». Si l’on avait posé la question « faut-il mettre fin aux contrats des étrangers et des étrangères dans les hôpitaux ou les services à la personne au risque de la fermeture de nombreux services ? » les résultats auraient sans doute été sensiblement différents.
Un débat faussé
Ce rapport « Que changerait la « préférence nationale » induite par la loi immigration ? » du collectif « Nos services publics » est donc un apport à la démocratie bafouée dans ce débat faussé, dominé par l’idéologie d’extrême droite qui nie les faits, déni idéologique partagé par LR et Macron. On comprend à la lecture des chiffres pourquoi Macron a voulu faire vite au prix d’une alliance avec des idéologues « antirépublicains » dont les propositions mettent en cause les principes et droits fondamentaux issus de la Révolution. Son expérience de la réforme des retraites lui a montré que l’approfondissement de débat public2Anecdotique, mais épouvantail pour une droite en manque d’arguments. L’un des économistes qui a participé à cette note est Michaêl Zemmour renforçait les oppositions et la mise en question des politiques libérales.
Les données fournies par ce rapport montrent clairement que les mesures de la loi portée par Retailleau et Borne renforcent les divisions des différentes catégories d’un salariat déjà profondément divisé par l’organisation capitaliste du travail et les politiques de gestion de la main d’œuvre mises en place depuis des années. Les exemples donnés montrent bien que les mesures de préférence nationale génèrent des différentiations considérables : pour un travail et un salaire égal, les un·es sont sous le seuil de pauvreté, les autres non.
Entre 2 aides soignantes à mi-temps avec un enfant, la différence est de près de 1 000 euros, 1 621 contre 651 (voir page 8) et pour 2 employés de la restauration de 500€ (l’un a le droit à la prime d’activité et à l’APL l’autre pas ; voir p7).
Une machine à créer de la pauvreté
En plus d’être cette machine à diviser, c’est aussi une machine à créer de la pauvreté (le schéma de la page 12 sur les enfants est particulièrement significatif). Et elle s’insère dans les autres machines à créer de la pauvreté (réformes de l’indemnisation chômage, loi travail et mise au travail forcé du RSA…). Alors que Macron se vante de simplifications administratives pour les patrons, ce sont des difficultés supplémentaires pour les plus fragiles (qui ont le sait entraîne une augmentation des non recours)
Une fois de plus, la chasse aux pauvres est la priorité : les tenants de cette loi veulent nous faire croire que ses effets sont limités en nombre et qu’ils ne touchent que les étrangers. C’est faux ! Ces mesures de suppression de droits concernent tout le monde et en particulier les plus précaires. En supprimant des droits aux étrangers (cible facile et démagogique), ils veulent « habituer » la société à de telles mesures, faciliter demain les suppressions d’allocations pour les personnes au RSA qui refuseront les emplois de merde, mais aussi les CDD qui refuseront n’importe quel CDI ou les « démissionnaires forcés » qui auront encore plus de mal à être indemnisés. C’est, comme le dit le collectif, « un pas de plus dans la dégradation des droits sociaux » pour l’ensemble de la population qui vit en France.
La lutte contre la loi scélérate sur l’immigration ce n’est pas seulement faire acte de solidarité humaine et de respect des principes fondamentaux des droits universels, ce n’est pas seulement mettre en échec une collusion droite extrême droite qui menace la démocratie, c’est aussi défendre nos droits sociaux, une protection sociale qui est déjà très largement mise en cause.
Vous pouvez télécharger (en PDF) le rapport « Que changerait la « préférence nationale » induite par la loi immigration ? » en cliquant sur le lien.
Notes
- 1qui, soit dit en passant, est le niveau actuel du RSA soit la moitié du seuil de pauvreté tel qu’il est habituellement défini (1/2 salaire médian)
- 2Anecdotique, mais épouvantail pour une droite en manque d’arguments. L’un des économistes qui a participé à cette note est Michaêl Zemmour