Témoignage de Gennadiy Kharchenko

Historien de métier, engagé dans l’armée dès le début de la guerre, Gennadiy Kharchenko était invité par une association locale de solidarité avec l’Ukraine. Défenseur de Marioupol, fait prisonnier en Russie, revenu de 2 ans et demi de captivité, il témoigne et présente son livre Le journal de l’artilleur. 

Soirée autour de Gennadiy Kharchenko

Par Brigitte Cherprenet. Le 25 juin 2025.

L’association Les Convois d’Irina de Maromme (Seine-Maritime) organisait une soirée évènement le 10 juin 2025.

Présentation de Genadiy Kharchenko par la présidente des convois d'Irina

Présentation de Genadiy Kharchenko par la présidente des convois d’Irina

Après un accueil avec thé, café et délicieuses pâtisseries ukrainiennes, une cinquantaine de personnes ont écouté Gennadiy Kharchenko, historien, traducteur et économiste de formation.

Il vit à Zaporijjia. Au printemps 2014, il s’est porté volontaire pour combattre l’envahisseur russe au Dombass. Il est devenu commandant d’artillerie de la troisième batterie d’obusiers de la 55ᵉ brigade d’artillerie indépendante. Il est aussi l’auteur d’un livre Journal d’un artilleur, malheureusement pas encore traduit en français (c’est en cours).

Le livre décrit en détail les évènements vécus par la batterie de la 55ᵉ brigade lors des frappes russes près d’Ilovaïsk et sur l’aéroport de Donetzk, aussi bien que sur le front sud de l’Ukraine.

Gennadiy Kharchenko a commencé son exposé par un parallèle avec la situation des pays de l’Europe qui se sont unis pour résister à Hitler.

Il réclame la même union, face à Poutine, et demande un accroissement des sanctions contre les oligarques.

À la fin de la 2ᵉ guerre mondiale, l’URSS a participé modérément à la reconstruction des villes détruites. En effet, Staline a refusé le plan Marshall et a interdit à la Pologne et à la Yougoslavie de recevoir les aides du Plan. Il fallait ça pour établir son joug sur ses satellites, à qui il a fallu des décennies pour se libérer du joug stalinien.

Aujourd’hui, Poutine tente de rétablir ce joug. Il s’est saisi du Dombass, de la Crimée et veut tout le reste de l’Ukraine avant de s’attaquer à d’autres de ses anciennes républiques.

D’où l’urgence pour l’Ukraine de faire partie de l’Union européenne.

Poutine utilise la propagande et le mensonge pour maintenir son pouvoir. Il a fait croire que les russophones du Dombass étaient persécutés par des nazis ukrainiens. Or les Ukrainiens veulent la démocratie. Et les termes de paix avancés par Poutine sont incompatibles avec la Constitution ukrainienne. On ne peut faire la paix avec quelqu’un qui ne connaît que le pouvoir du plus fort.

Images de la soirée autour de Genadiy Kharchenko

Images de la soirée autour de Genadiy Kharchenko

Des photos illustrent régulièrement les propos de Gennadiy, pour prouver que le discours poutinien n’est que mensonge.

Ce pouvoir du plus fort, Poutine l’a exercé brillamment à Marioupol, en bombardant sciemment et systématiquement les civils réfugiés dans le théâtre, les blessés dans l’hôpital ainsi que la maternité et l’école.

Les destructions massives ont causé des pertes civiles énormes. Il y avait 1 500 000 habitants à Marioupol. avant la guerre. 2500 immeubles ont été détruits et 100 000 civil·es tué·es. Alors que l’odeur pestilentielle des corps sans sépultures empoisonnait l’air de la ville, les Russes ricanaient en prétendant que c’étaient des stocks de poissons non consommés qui pourrissaient.

Les Russes n’ont reconstruit à ce jour que 25 immeubles !

Gennadiy a remercié la France pour toute l’aide apportée. Elle a été la première à exiger de Poutine qu’il laisse sortir les civils et les blessés de Marioupol. Ce que Poutine n’a pas accepté. Elle a financé à hauteur de 4 millions d’euros l’émigration des assiégé·es dans d’autres pays d’Europe.

Enfin, Gennadiy est revenu sur l’épisode de l’usine métallurgique poststalinienne de Azvstal. Une partie de l’armée ukrainienne y était retranchée, ainsi que les ouvriers de l’usine, en 2022.

Cette bataille a fait diversion un moment et a diminué l’avancée et la pression de troupes russes ailleurs en Ukraine.

Quand les militaires ont été anéantis après des jours de résistance – soient tués, soient capturés (environ 200) – les ouvriers de l’usine ont été emprisonnés aussi. Tous ont été parqués dans un baraquement à côté d’un entrepôt de missiles. Les Russes ont fait exploser l’entrepôt et évidemment le baraquement d’à côté. Bilan : 113 blessés graves et 52 tués. Les Russes ont expliqué que les Ukrainiens avaient fait sauter eux-mêmes leur baraquement.

Aucune enquête n’a été autorisée. Il faut savoir que les prisons russes ont été vidées de leurs criminels. Ces derniers sont envoyés au front où ils commettent en toute impunité les pires crimes de guerre.

Collecte pour les bléssés d'Ukraine

Cette soirée était la dernière passée en France pour Gennadyi, avant son retour au front.

Il a ensuite répondu aux diverses questions des présent·es. Il a surtout insisté sur l’aide indispensable aux soldats. Il a également rappelé l’impérieuse nécessité que le gouvernement français fasse pression pour une entrée rapide de l’Ukraine dans l’Union européenne.

Un homme ukrainien réfugié, jeune – accompagné de sa femme et de leur enfant – a fait état de son sentiment de culpabilité d’avoir fui les combats et d’être réfugié en France.

Gennadyi a tenté de le déculpabiliser : la diaspora peut faire beaucoup pour aide, en envoyant de l’argent aux familles des soldats, en collectant des dons (couvertures, articles de toilette et d’hygiène, vêtements chauds, médicaments, etc.).

Les dons sont acheminés par convois au départ du Havre et de Rouen.

En 2024, les convois d’Irina ont acheminé plus de 46 tonnes d’aide humanitaire.

Film Marioupol L'espoir n'est pas perdu

Après un entracte, un film a été projeté : Marioupol, l’espoir n’est pas perdu

Le film est le témoignage de gens ordinaires qui ont été des témoins oculaires de la guerre entre la Russie et l’Ukraine.

Trois femmes et deux hommes, qui vivaient à Marioupol pendant le premier mois de l’invasion, racontent ce qu’ils ont vu et ressenti, comment ils ont pris des décisions en pleine guerre. Le sujet a été construit sur la base des notes prises sur le terrain par la journaliste Nadya Sukhorukova, habitante de Marioupol, restée sur place les premières semaines de l’invasion russe.

Les convois d'Irina

Si vous souhaitez aider concrètement le peuple ukrainien, prenez contact avec Les convois d’Irina
Les dons sont collectés au hangar, 506 rue du Moulin à Poudre, Maromme. (tel 07 45 76 31 21)