Que pouvons-nous faire ?

Au milieu de toutes ces catastrophes qui ferment l’horizon, une priorité nous paraît de discuter d’une action collective, de buts politiques communs. Or, nous buttons sur de vrais obstacles.

L’effondrement de tant d’espoirs antérieurs

Comment reconstruire une possibilité de révolution démocratique, une socialisation des biens qui permettrait à une vie meilleure, la solidarité et l’émancipation pour toutes et tous ?

Le bilan de l’ex-URSS et des partis qui lui faisaient confiance est lourd. Et tout ce qui a pu se passer, depuis les années 1960, montre une « globalisation » de l’économie, un capitalisme triomphant et destructeur.

Malgré la catastrophe écologique, les « alertes », les conférences mondiales et les mobilisations se succèdent1, sans prise réelle sur les urgences. Les pays décisifs pour freiner et arrêter ces gâchis sont assez développés sur le plan scientifique et technique pour des changements. Ils se contentent de discuter. Même l’exploitation des énergies fossiles se poursuit et provoque nombre de guerres, en Afrique notamment.

Les capacités de recherche médicale, soumises à la « logique » capitaliste – en particulier la propriété privée des brevets – ont laissé l’humanité entière être attaquée par un virus qui aurait pu être étudié et dont les traitements et les vaccins auraient pu être prévus par une réelle recherche scientifique publique. L’absence de médicaments et d’équipements a mis à jour la fragilité des conditions d’existence de trop nombreuses personnes et mis en évidence des inégalités mondiales monstrueuses.

Malgré la volonté de paix et les discussions au sein des institutions internationales (ONU), on voit Vladimir Poutine développer, au nom d’une mythique Grande Russie, une guerre contre l’Ukraine. Comment démêler, dans cette invasion, les intérêts de la classe dirigeante de l’État russe, lhéritage de l’Empire des tsars puis de la dictature bureaucratique de pseudo communistes ? Comment sortir du carcan des impérialismes, à « l’Est » ou à l’« Ouest » ? Comment réagir à celui qui se dessine « au Sud », entre des états despotiques (Chine, Inde, etc.) et des gouvernements socio-libéraux actifs dans une compétition et une hiérarchisation instable ? Une série de questions ouvertes…2

Une partie de la population, dans notre pays et dans bien d’autres, en conclut qu’il faut choisir des régimes autoritaires, imposant des sociétés de contrôle et des États repliés chacun sur leur puissance et leur souveraineté. Beaucoup accompagnent ce choix d’une politique d’agressions racistes, sous prétexte de religion souvent. Les droits des femmes à la liberté de leurs corps (contraception, maternité, divorce, etc.) sont souvent remis en cause au nom du retour à un « ordre » traditionnel.

Un capitalisme qui ne fait plus rêver

Quelques signes confortent nos propositions actuelles. Ainsi, malgré les échecs du passé et le matraquage idéologique sur l’horizon indépassable du capitalisme, ce dernier ne fait plus rêver ! Dès 1995, sans aucune construction politique, la mobilisation se reconnaissait dans un mot d’ordre : « Cette société-là, on n’en veut pas ».

Une autre voie reste en filigrane. Les interrogations sur les inégalités s’expriment avec force et même rage (pas seulement les Gilets jaunes). Des mécontentements, des protestations, parfois des revendications dessinent un panorama des transformations qui ne viennent pas. Le rejet de la misère, du travail contraint, des « travaux aliénants », des mauvaises conditions de travail ; les refus des emplois proposés (« la grande démission » pour reprendre ce terme) ; l’aspiration à conserver ses qualifications, voire à progresser, expriment de très fortes attentes. Elles se mêlent évidemment au rejet des politiques destructrices de la planète.

Ces critiques n’arrivent pas, pour l’heure, à faire système, à tracer une perspective alternative mais soulignent l’absence de confiance dans « le capitalisme sous sa forme actuelle »3. Mais elles traduisent des aspirations à la démocratie et nous les analysons comme des ouvertures pour un avenir.

Et n’oublions pas les révolutions et les soulèvements qui jalonnent cette longue période (Portugal en 1974, Serbie, Tunisie, Syrie, Ukraine avec Maïdan en 2014, Égypte, Soudan, Sri Lanka, etc.).

Et oui… « tout ça n’empêche pas, Nicolas, qu’la Commune n’est pas morte ! »

Pour un avenir humain

En Europe, pour ne pas subir les politiques de régression sociales et démocratiques, la catastrophe écologique, les pandémies, les discriminations racistes et sexistes, la guerre en Ukraine, les menaces de guerre ailleurs, il nous faut rassembler toutes les forces en lutte.

Le but que nous poursuivons appelle une activité et une organisation qui contribue à cette visée. Nous proposons donc des réponses immédiates, et aussi les bases d’un avenir, des buts communs, une réponse politique donnant à la vie humaine la place qui ne lui est pas reconnue.

Pour ne pas se payer de mots : ce système est ruineux sur tous les plans, humain, écologique, sanitaire !

Il faut un dépassement du capitalisme

Quel que soit le type d’organisation, syndicale, politique, associative, réseau citoyen, il faut reprendre la discussion sur ce qu’est ce dépassement. Afin d’analyser les situations pratiques, une bataille d’idées s’impose, pour renouer le fil des luttes d’émancipation.

Nous proposons de construire une logique commune. Ce avec quoi il faut rompre, en priorité, afin de soumettre aux discussions ce qui mérite d’être conservé et sans doute consolidé.

Les luttes pour l’émancipation ont été combattues par des politiques directement réactionnaires ou gestionnaires. Leur force d’entraînement a été freinée mais elles ont rendu visible des éléments de ce qui doit pouvoir s’épanouir.

Des « réformes » doivent être corrigées afin de changer des non-droits en libertés. Certaines institutions, qui méritent d’être conservées, doivent cesser d’être des administrations écrasantes et transformées en services démocratiques autogérés.

Rompre avec la domination du travail

Il faut rompre avec la domination du travail, qui rend tant d’êtres humains dépendants et soumis, et les dégrade. « Globalisé », ce système impose des inégalités pour faire jouer les concurrences. 60% de celles et ceux qui dépendent, pour leur vie, de leur emploi salarié et subalterne4 sont, aux yeux de l’OIT, dans des situations de travail « informelles », sans véritable droit social. Partout, ce système impose des inégalités économiques entre hommes et femmes, ce qui est une des sources des violences faites aux femmes. On voit des situations semblables dans tous les pays, dans les activités mondiales, dans les luttes locales. Les « nouveautés » comme les porteurs de projet individuels, l’ubérisation, les usages d’internet, les livreurs et les livreuses, les nouveaux et nouvelles domestiques se développent dans le monde entier.

Nous pouvons ouvrir des perspectives à celles et ceux qui subissent le chômage de masse, outil du despotisme capitaliste pour diviser et régner. En 1843 (!), déjà, Flora Tristan disait que personne ne peut être citoyen·ne s’il ne lui est pas reconnu le droit au travail5.

Il faut des droits communs, une garantie individuelle et collective. La division entre les salarié·es en emploi stable et les autres groupes de travailleurs et travailleuses individuel·les précaires provoquée par le système doit être abolie.

Rompre avec un système qui mène à la catastrophe écologique

Une prise de conscience s’est affirmée – depuis Seattle en 1999 – portée par le mouvement altermondialiste et ses espoirs. Face aux exigences des mobilisations écologistes, les dirigeant·es des principaux pays ont dû accepter que se tiennent des conventions internationales. De fait, les entreprises capitalistes se contentent de chercher comment faire des profits. Mais la catastrophe est là !

Rompre avec les inégalités et la misère

La concentration des pouvoirs de décision entre peu de têtes atteint des extrêmes inimaginables : « 70% de la population en âge de travailler ne représente que 2,7% des richesses de la planète. 1% de la population mondiale en possède près de la moitié. »6. « Immensément puissants, (…) ils n’exercent aucune sorte de pouvoir sans une armée de collaborateurs, lesquels relèvent eux-mêmes de cette classe dans la mesure où ils tirent de cette fonction – de la gestion des affaires aux travaux de lobbying et de corruption – une position sociale privilégiée. Tel serait, mêlant actionnaires et « agents du profit », le pôle « capitaliste » de la classe dominante, qui préside aux grandes transformations technologiques, commerciales et financières. C’est dans ces conditions que « le capital », autour d’un groupe historiquement variable qui prend la tête du mouvement, peut mettre en avant une politique d’exploitation du travail, d’appropriation du potentiel productif et commercial, de localisation de la production, d’accaparement des ressources naturelles, soit toute une dynamique déterminante dans la vie des sociétés. Une puissance économique qui tend à se traduire en domination politique. »7 Ce pouvoir actuel maltraite la nature, emprisonne le travail et développe la misère, les guerres et les industries d’armement.

Une classe dirigeante mondiale s’est donc formée. Elle profite des développements très inégaux entre régions du monde, met en concurrence salarié·es et « précaires ». Elle gouverne en utilisant les instruments économiques et politiques, publics ou privés. Ses politiques ont façonné le monde actuel et la crise multiforme que nous traversons y trouve sa principale origine.

La pire erreur serait de croire possible d’y apporter des réponses nationales. Les investissements de luxe des milliardaires le montrent : ils étalent leur puissance, leurs richesses pour imposer leur légitimité, leur supériorité.

Nous ne pouvons l’ignorer plus longtemps : il nous faut définir les objectifs communs. Les mobilisations sont capables de porter des pratiques, de prendre des initiatives politiques. Des réformes déjà discutées attendent d’être mises en œuvre. Quelques exemples, après les deux premières années de la pandémie…

Rompre avec la marchandisation de la santé

La santé publique est en voie de destruction. Tout le secteur du médicament pourrait être un service public mondial qui organiserait la pluralité des recherches sans lesquelles aucune science ne progresse. Pourquoi cela n’est-il pas fait sous le contrôle de l’ONU et de l’OMS ? Pourquoi ne pas défendre « les gratuités » grâce à une ponction collective sur les richesses afin de développer des moyens de soin ? Le taux de profit des quatorze grandes entreprises (et fonds de pension gestionnaires) du médicament est trois fois plus élevé que celui de l’automobile.

Rompre avec l’impuissance de l’ONU

L’OMC, la Banque mondiale, le FMI ne sont pas soumis à l’Assemblée générale de l’ONU. L’Assemblée générale de l’ONU devrait pourtant être le lieu de décisions où les Conventions climat ou biodiversité soumettraient leurs propositions à l’adoption. Les propositions de la Via Campesina, comme celles de l’OIT devraient être un élément des débats politiques mondiaux. De même, pour les énergies fossiles et le contrôle de leurs usages, la lutte contre les pollutions, les conditions de travail et les richesses produites, ainsi que le soutien aux pays qui ont subi la colonisation. Des propositions de réforme sont débattues8.

Une classe dirigeante mondiale impose ses choix délétères

Le pouvoir du 1% mondial et de ses associé·es génère des profits immenses, s’accompagne de répression, de destructions, mais se renouvelle9 et se maintient depuis longtemps.

Celles et ceux qui en profitent ont refusé les revendications portées par le mouvement mondial de 68. Leurs choix ont été partout les mêmes : recul de la Protection sociale, refus de la diminution du temps de travail (toujours « excessive »). Leurs politiques se sont opposées aux réorganisations démocratiques des tâches et de la formation. Leur choix a été de développer des statuts du travail moins sécurisés et de réduire la place des services publics comme biens gratuits. Cette classe dirigeante a renforcé les pouvoirs des exécutifs et l’autoritarisme. Elle a fait reculer la démocratie.

En imposant un monde « globalisé », elle a accéléré la catastrophe écologique.

Elle a développé les racismes pour accroître les divisions. Elle a produit l’Islamisme extrémiste, ses opérations et ses gouvernements terroristes et aussi le retour des guerres (en Afrique comme en Europe, Yougoslavie, Kosovo, Serbie, Arménie, Ukraine, etc.). Cependant, les revendications de souveraineté s’étendent à toutes les régions du monde avec l’actualité des luttes anticoloniales face à la pensée coloniale.

En France, notre situation se complique des effets d’une décolonisation non achevée. Souvent, des français·es d’origine africaine, maghrébine ou antillaise subissent le racisme dans tout le fil de leurs vies, au-delà des « quartiers populaires ». Ce sont les ravages du refus de l’égalité des droits politiques depuis les années 1960 ! Et pendant ce temps, les demandes d’autonomie des Antilles et d’indépendance de la Polynésie et de la Kanaky traînent encore.

Cet « ordre » doit être détruit et remplacé

Après la chute du Mur de Berlin et l’effondrement de l’ex-URSS, la classe dirigeante a imposé son monde « globalisé » : l’autoritarisme politique nécessaire pour faire passer le libéralisme, le pouvoir du marché et la mondialisation avaient trouvé la forme du TINA (There is no alternative = Il n’y a pas d’alternative) de Margaret Thatcher. Pendant trente ans, combien de « gouvernements de gauche »10 s’y sont pliés ! Les crises successives du capitalisme (1987, 1997, 2008, 2014) montrent ses dangers et sa nocivité pour le plus grand nombre. Pourtant, la possibilité de son dépassement ne va pas de soi pour la majorité des « gens de la moyenne ».

Le dépassement, ou la rupture, ces mots resteraient vides de sens si n’était pas mis en évidence ce qui doit disparaître. Notre action doit encourager des relations nouvelles, des activités, des pratiques, une culture et, en même temps, les institutions démocratiques qui s’affirment et qui remplacent l’ordre actuel en reprenant le fil de l’autogestion.

Des réformes attendent d’être mises en œuvre

Dans les années 1960, des formes de démocratie active, de refus de l’ordre capitaliste ont été voulues, tentées. Elles exprimaient des exigences (« ne pas perdre sa vie à la gagner !») et ont inspiré des courants écologistes et autogestionnaires. Mal acceptées par les forces organisées du mouvement ouvrier, combattues par la bourgeoisie, elles furent rejetées au nom des « évangélistes du marché », et des théoriciens de la Trilatérale11, avec leurs armées dominées par le rôle impérial des États-Unis. Ces dirigeants prétendaient développer une « démocratie plus gouvernable ». Ils ont provoqué une succession de guerres et des déplacements de populations entre les pays les plus pauvres, le recul des droits démocratiques et sociaux en Europe, et même sous des gouvernements sociaux-démocrates. Les puissances financières et militaires ont usé et réprimé les soulèvements des Places, le Printemps arabe de 2010.

Cette domination se poursuit, malgré les crises financières successives (1987, 1997, 2008). Avant la crise pandémique de la Covid, le poids des banques systémiques qui amplifie le danger du système, avait été dénoncé. Mais les leçons de la crise financière de 2008 n’ont pas été tirées. Les éléments de risque (produits financiers dérivés, montages spéculatifs, titrisation des crédits, interconnexion des bilans des acteurs financiers et bancaires) sont toujours là. L’ensemble du système reste à la merci du retournement d’un marché, de l’explosion d’une bulle ou du dépôt de bilan d’un acteur systémique.

Démocratiser, exproprier, socialiser

Pour rompre avec le pouvoir des minorités régnantes, beaucoup d’activités devraient déjà et devront être « socialisées ». Cette précision n’est pas « une simple question de mots ». Elle vient comme un préalable. Afin de rejeter une lourde part du 20e siècle, le « siècle soviétique », citant Marx (1875) et Engels (1891) nous ne sommes pas favorables à « la gestion de l’économie par un État dévoué aux travailleurs ». Nul ne peut proposer une révolution sans dire comment le pouvoir de la classe capitaliste sera vraiment éradiqué, quelles autres relations sociales seront à développer.

Des réalités humaines rendent possible des changements majeurs. Dans la plupart des pays d’Europe, la valeur produite par le travail, collectivement, avec des moyens techniques maîtrisables, pourrait permettre un système de cotisations sociales qui garantisse le droit au travail et à la formation tout au long de la vie. Les effets de ce changement des droits sont évidemment gérables par des personnes mandatées par les intéressé·es mêmes. Le refus de la précarité, des bas salaires, des inégalités, de l’usure par le travail peut s’appuyer sur la coopération et non pas sur la tutelle hiérarchique, sur la lutte contre le despotisme capitaliste dans les entreprises et la société. De même, les mouvements féministes traduisent le refus des inégalités entre femmes et hommes.

Grâce au développement des forces productives et à la révolution scientifique et technique, la productivité a fait un bond extraordinaire au siècle dernier. Leurs effets sont généralisés et les passages au numérique les multiplient12. Un nombre croissant d’emplois exigent des formes de coopération à la place de la compétition et du tous et toutes contre tous et toutes.

À condition de s’appuyer sur les associations de luttes et sur les syndicats, l’agro-alimentaire destructeur de la nature pourrait être remplacé, en peu d’années, par une agriculture paysanne et biologique, qui permettrait de nourrir 10 milliards d’êtres humains13. Et combien de projets réalisant une diminution des dépenses d’énergies sont « prêts » et « en retard » !

Pour faire reculer les différences et les injustices, au niveau mondial, les principes de l’OIT et son activité devraient donner lieu à l’ONU à des discussions et à des décisions sur les accords déchanges internationaux.

Pousser vers l’égalité est l’une des voies pour remettre en cause les libertés d’investissements des groupes dominants du système capitaliste. Et reconstruire les services publics, dont celui de la santé, est vital.

De même, des principes de solidarité, de démocratie, de pluralisme peuvent construire une tout autre Europe : la formule « États-Unis socialistes » disait un espoir au 19e siècle.

Plusieurs questions restent et resteront au moins un temps : y a-t-il pour le capitalisme une stabilisation possible ? un aménagement possible ? ou seulement la perspective d’un affrontement ? Il serait sans doute vain d’en faire un long débat.

S’organiser pour les buts communs

Nous visons un changement mondial et donc un regroupement où les opprimé·es pourraient se faire entendre. Sans cet objectif, comment relever les défis écologiques et climatiques ? Comment permettre à des dizaines de millions de personnes d’agir contre les guerres, pour la liberté démocratique des peuples ? Que dire des exigences à faire entendre pour l’écologie et l’avenir de la planète ?

Toutes les pratiques alternatives, dans les domaines de la production, de la consommation et du mode de vie, préfigurent l’alternative, même à l’échelle d’individus ou de groupes restreints.

Les ruptures immédiates recherchées prennent place dans une révolution, c’est-à-dire un processus dans la durée et pas un mouvement brusque de type « grand soir ». Nous retrouvons la question fortement posée depuis un siècle14. Pour qu’émerge un moment de « guerre de mouvement », visant à subvertir les pouvoirs de l’État capitaliste, il faut qu’existe, grâce à des combats culturels et politiques, un but commun, qui unisse les « luttes de position ». Malgré les défaites, ces luttes ne peuvent pas se contenter de résister, défendre des avancées sociales antérieures, (par exemple la Sécurité sociale, les droits à la santé et aux études, etc.).

Ces quelques repères, dans des luttes qui en réactivent la portée, confirment et consolident la voie vers des buts communs de solidarité et d’émancipation.

Un tel essor des éléments de solidarité et d’émancipation portés par les actions collectives, appelle une précision, décisive : les possibilités que portent les luttes peuvent être freinées, voire détruites par la montée, en miroir, d’une gauche étatiste, nationale, nationaliste. Imagine-t-on un lider maximo omnipotent, appuyé sur un mouvement a-démocratique (appelé Parti ou pas…) ? De telles « élites de gauche », des appareils surplombant les luttes des « gens de la moyenne », les réduiraient à des « délégations de pouvoir ». Un ami brésilien, de la gauche du PT, marque bien la question posée, dans ses termes : « il appartient au prolétariat et à ses intellectuels organiques de construire de nouvelles organisations politiques, des syndicats, des organisations autonomes, etc., dans lesquelles l’émancipation humaine démocratiquement recherchée n’échappe pas au contrôle de la masse prolétarienne elle-même »15.

Le dépassement du capitalisme est possible. Cela implique d’en dire un peu plus sur le « comment faire ». D’avoir en vue le système capitaliste comme ensemble mondial « inégal et combiné ».

Des élaborations sont à reprendre. Bien des points dans cette contribution signalent des questions. En fin de compte, cette introduction ouvre des débats.

Le 21 juillet 2022

Étienne Adam, Pierre Cours-Salies, Jean-Marie Fouquer, Marie-Claude Herboux, Cécile Leroux.

Avec les lectures et suggestions de : Bernadette Bouchard, Jean-Paul Bruckert, Jean-Pierre Martin, Jean-Paul Leroux, etc.

Notes

1 – La première conférence des Nations Unies sur l’environnement se tient en 1972 (Stockholm), avant celle de Rio (1992). Christophe Bonneuil et Jean-Baptiste Fressoz, L’Événement Anthropocène, la Terre, l’histoire et nous, éd. Seuil, 2013.

2 – Gus Massiah http://pourlautogestionlereseau.blogspot.com/2019/07/repenser-le-developpement-pour-repenser.html

– Ensemble ! a édité une brochure : International. Entre ambitions, tensions et révolutions, un monde de plus en plus complexe. 

3 – Trust Barometer Edelman 2020.  Le sentiment croissant d’inégalité mine la confiance des citoyens dans les institutions 69 % des français interrogés estiment que le capitalisme, sous sa forme actuelle, fait plus de mal que de bien En remplissant le vide laissé par les gouvernements, les entreprises emportent la confiance… https://www.edelman.fr/sites/g/files/aatuss341/files/2020

4 – Qu’on se souvienne, au contraire, des principes et espoirs de 1945 : « Le travail n’est pas une marchandise » (Convention de l’Organisation internationale du travail, OIT, à Philadelphie).

– Sur le plan de la démocratie active opposée aux despotismes, ENSEMBLE ! a édité la brochure Démocratie en crise. Propositions à débattre.

5 1843, L’Union ouvrière, réédition Éditions des Femmes, suivie de lettres de Flora Tristan.

6 – B. Sanders, Appel à la formation d’un mouvement international… Nov. 2018, Mediapart.

– Une brochure éditée par ENSEMBLE ! : Écologie et dépassement du capitalisme.

7 – Jacques Bidet, Actuel Marx 2016/2 (n° 60), pages 106 à 120

8Monique Chemillier-Gendreau Pour un conseil mondial de la résistance 64p, éd. Textuel,.2020. De la guerre à la communauté universelle, Fayard, 2013. http://ensemble-tout-est-possible.org/category/espace-debats/une-autre-facon-de-faire-monde-actualite-de-laltermondialisme/ etepsr@framalistes.org.

– Bertrand Badie Les Puissances mondialisées, Odile Jacob 2021.

9 – Selon des études américaines ou suisse, 737 firmes détiennent 80 % de la valeur des 43 000 entreprises multinationales (selon la définition de l’OCDE) de la planète. Il s’avère que 40 % du contrôle de la valeur de ces entreprises est détenu par 147 firmes, dont les trois quarts appartiennent à l’industrie financière, banquiers, assureurs et gérants de fonds.

10 – En France, une analyse critique des gouvernements de 1981 à 1986, de 1988 à 1993, et de 1997 à 2002, sera indispensable.

11 – Trop peu connu, constitué en contre-coup des « années 68 » par des dirigeants des USA, du Japon et d’Europe.

12 – Ensemble ! a édité une brochure : Abolir le chômage, la précarité, la pauvreté.

13 – Voir la brochure : Écologie et dépassement du capitalisme.

14 – Antonio Gramsci, pour dialoguer avec les impatients et les découragés des années 1920, après les congrès de l’Internationale communiste, distinguait avec soin le caractère fragile et finalement temporaire des « guerres de position », (pendant lesquelles les offensives réactionnaires, fascistes, peuvent profiter de l’usure) ; mais il montrait comment une bataille culturelle devait situer les luttes de classe porteuses des traditions démocratiques de masse, partagées par les gens de la moyenne.

– Gramsci, Antonio (1959), « Américanisme et fordisme » (1934), dans Œuvres choisies, sous la dir. De Georges Cogniot, Paris, Éditions sociales.

– Gramsci, Antonio (1975), Cahier de prison, n° 13 (1932-1936), Paris, Gallimard..

15 – Farias, Flávio Bezerra de. Crise mondiale : sablier fatal. São Paulo: Chaman, 2015.

– Bernard Guilhon, Professeur de sciences économique La « mondialisation entre amis », ou la grande fragmentation de l’espace mondial, 18 juillet 2022, in https://theconversation.com/