Pas de grandes surprises à la lecture de La Lettre de la citoyenneté n° 173, qui vient de publier l’enquête faite fin février 2023. On y apprend que 68 % de la population sont favorables au droit de vote des étrangers et des étrangères aux élections locales et que 32% y sont opposés. Depuis 2014, l’écart a changé. Il y avait alors 44% de contre.
Sans étonnement, les politiques gouvernementales se poursuivent cependant.
« Le droit de vote local et l’éligibilité des étrangers non européens résidant en France seraient une conquête pour la démocratie ». Rappelons une histoire calamiteuse, résumée par Catherine Withold de Wenden au sujet de cet « engagement » du candidat Mitterrand en 1981 : « Bien qu’il ait été à l’agenda politique en France depuis plus de quarante ans, il n’a toujours pas été adopté. Rappelons que quinze États européens sur vingt-sept l’ont mis en œuvre. » (Lettre de la citoyenneté).
Afin de maintenir cette ségrégation, qui se traduit dans les droits sociaux, dans les équipements collectifs, etc. tous les arguments « réalistes » ont pu être donnés. Y compris celui selon lequel reconnaître un droit de vote aux « étrangers non communautaires » allait donner lieu à des votes communautaires et donc leur porter tort ! C’est encore répété en France.
Cela ne s’est toutefois pas produit dans les pays européens où les étrangers non communautaires sont électeurs et éligibles. Le droit de vote local est pourtant établi depuis 1975 en Suède, 1981 au Danemark et 1985 aux Pays-Bas.
Il faut lire la Lettre de la citoyenneté ((https://jsjv.fr/IMG/pdf/llc_173_dbef-2.pdf Collectif « J’y suis, j’y vote », C/O FTCR, 23 rue du Maroc, 75019 Paris, France. Site web http://jsjv.fr – mail : [email protected] – tél. : 06 86 78 78 65.)) et regarder en détail la description statistique des opinions selon les options politiques, les âges, les lieux de vie.
Paradoxe qui n’en est pas un : « les principales progressions de l’approbation du droit de vote des étrangers concernent les 65 ans et plus (58 %, + 6 points) et les sympathisants du Rassemblement national (33 %, + 16 points). Néanmoins, même si l’écart se réduit, leur score reste nettement en retrait des autres catégories de population ».
Pourquoi en sommes-nous encore, au compteur politique, arrêté·es aux promesses de Mitterrand toujours remises à plus tard ?
L’héritage de la gauche colonialiste de la 4e République pèse encore, comme cela est expliqué dans mon article de février 2019 : « Une fabrique pour deux questions nationales ».
On voit la prime ainsi donnée au Rassemblement national, qui doit tenir compte de la tolérance pour « des » immigré·es, mais évidemment stigmatise « les séparatismes », en chorus avec Darmanin et les lois contre les immigrations.
C’est un débat tout à fait décisif pour, au moins, consolider et rendre plus humaine la démocratie telle qu’elle est.