La menace est telle que toutes les organisations syndicales représentatives de la SNCF, pourtant très diverses, CGT, SUD-Rail et UNSA, CFDT, ont déposé un préavis de grève, ce qui n’était pas arrivé depuis plusieurs années ! Elles s’opposent au projet de Convention Collective Nationale, qui doit être « négocié » sur la base d’un avant projet de décret-socle envoyé par le gouvernement le 17 février 2016.
La coïncidence de date avec l’action défendant le code du travail tombe bien. Cette convergence de luttes porte sur le même thème, la défense des conditions de travail et des règles d’exploitation des salarié‑e‑s. Pour les cheminots, il s’agit de la convention collective qui va s’appliquer aux 153 000 salarié-e-s des entreprises ferroviaires, dont 149 000 de la SNCF. Dans le but de démobiliser les cheminot-e-s, la Direction de la SNCF affirme que rien ne changera à la SNCF, que l’accord d’entreprise SNCF qui peut améliorer la convention collective, respectera les conditions de travail actuelles. Les cheminot-e-s savent qu’il n’en sera rien, la pression de la concurrence travaillant à moindre coup poussera au chantage et au dumping social.
La sécurité ferroviaire est en jeu. La notion de sécurité ferroviaire n’apparaît jamais dans les 34 articles du projet de décret socle, bien plus léger que les 60 articles du décret actuel, dit RH0077, élaboré, corrigé et amélioré par des dizaines d’années d’enseignements de catastrophes ferroviaires, d’équilibres pour un haut niveau de sécurité, à la fois pour les salariés et les circulations, imposé par de nombreuses actions et d’importantes grèves nationales.
Quelques exemples de dégradations des conditions de travail et donc de la sécurité :
–    L’article 2 permet de travailler 6 jours par semaine, sans exclure d’aller au-delà. La limite maximum de 11 h d’amplitude de travail disparaît.
–    L’article 4 fixe la période de référence pour les heures supplémentaires à 6 mois.
–    Le nombre minimum de repos doubles par an (2 jours de suite) disparaît, il est actuellement de 52.
–    Le nombre de repos le dimanche (actuellement 22 par an) n’apparaît plus.
–    Les durées maximales et moyennes de travail augmentent d’une heure.
–    Les horaires de la prochaine journée de travail étaient connus 24 heures à l’avance, ils pourront changer 1 heure avant la prise de service.
L’affrontement est inévitable
Le gouvernement tient à son décret-socle des conditions de travail. Il a déjà gagné une manche en obtenant en 2015 l’accord de l’UNSA, CFDT et CFTC pour limiter strictement le champ d’application aux seules entreprises de transport ferroviaire (ce que SUD-Rail, FO et CGC ont dénoncé), excluant ainsi le personnel travaillant pour le ferroviaire (restauration et prestations à bord des trains, nettoyage des trains, des gares et installations ferroviaires, accueil et services aux voyageurs, prévention et sécurité, maintenance des installations, personnel des CE et du CCE…). Ce cadeau va permettre à la direction SNCF de continuer à externaliser/privatiser toujours plus de services, sortant ainsi de la convention collective.
Le gouvernement refuse la concertation.
Le provocateur Secrétaire d’Etat a annoncé qu’il résisterait à 1 mois et demi de grève des cheminots ! Pour faire céder le gouvernement, nous savons qu’il faudra un mouvement de grève reconductible, des Assemblées Générales journalières où les grévistes décident de leur mouvement, despiquets de grève et l’occupation des locaux de travail.
Pour gagner, pour imposer que le décret-socle reprenne au minimum tous les éléments du décret actuel dit RH 0077, pour que la nouvelle convention collective s’applique à l’ensemble des salarié-e-s travaillant pour le ferroviaire, il faudra comme en 1995 le soutien de la population qui, cette fois-ci, pourrait percevoir cette grève comme un des éléments permettant de gagner pour rejeter le projet de loi sur le code du travail.
Patrice Perret