53 salarié-e-s de OMS Synergie s’étaient mis en grève le 21 septembre 2015. Ils étaient 41 grévistes à l’arrivée.
OMS Synergie est une entreprise de nettoyage sous-traitante de Paris Habitat (logement social de la Ville de Paris). C’est donc la Ville de Paris qui est donneuse d’ordre en dernier ressort.
Les revendications des grévistes portaient sur :
la progression dans la grille des salaires
l’avancement de la date de paiement des salaires (payés actuellement très tardivement)
un 13ème mois
une prime de salissure
des vêtements de travail et un équipement complet
la mise en place de la subrogation (qui permet, en cas de maladie, de recevoir l’avance des indemnités journalières de maladie par le patron qui, lui, se fait rembourser par la sécurité sociale)
le respect du Code du travail (paiement de toutes les heures effectuées au tarif réglementaire notamment (ce qui n’est pas le cas aujourd’hui)
Au départ, ils étaient syndiqués à Sud Nettoyage, mais la gestion du conflit par ce syndicat a été catastrophique. Comment expliquer que les grévistes n’aient perçu de la caisse de grève gérée par ce syndicat qu’un seul montant au bout de 3 mois ? Et pour finir, au moment de la première négociation (au bout de 2 mois !), la dirigeante de Sud Nettoyage a fait savoir à OMS qu’elle ne défendait plus les grévistes et les a laissé négocier seuls, ce dont a pris prétexte le patron pour ne rien accorder !
Ensuite, ils se sont syndiqués à la CNT-Solidarité Ouvrière, vu que toutes les autres portes syndicales étaient fermées, la CGT (à l’exception d’un délégué gréviste) et FO dans l’entreprise étant du côté du patron. Ce choix pouvait sembler périlleux, mais c’était la seule voie possible qui s’est révélée positive pour les salarié-e-s.
Pendant les 4 mois de grève, le patron a essayé toutes les manœuvres pour décourager ou casser les grévistes : il les a traînés, sans succès, devant les tribunaux pour essayer d’obtenir l’évacuation de leur piquet de grève (piquet non bloquant), il a utilisé le recours à une médiation pour essayer de faire traîner le conflit autant que possible, il a demandé l’autorisation à l’inspection du travail de licencier les délégués des grévistes, sans succès également….
Un nouveau souffle pour la grève à partir de décembre
Après le départ de Sud-nettoyage, à partir du 3ème mois de grève, les mobilisations se sont accélérées avec le nouveau syndicat des grévistes, et le soutien de plusieurs secteurs de la CGT (Hôtels de Prestige et Economiques, Finances Publiques Paris, Paris Habitat notamment), de SUD Commerce, et des partis politiques PG, PC, EELV, NPA, Ensemble, avec des relais dans la presse (Huma Dimanche, Humanité, Le Parisien, Libération…). Le comité de soutien des habitants du quartier des Fougères a été très actif pour proposer des initiatives tout au long du conflit et a fait pression sur Paris Habitat et la Ville de Paris.
Les rassemblements et manifestations ont eu pour objectifs de manière alternée, la Ville de Paris et Paris Habitat d’un côté et les chaînes d’hôtels (Accor) dans lesquels OMS a des intérêts au niveau de la sous-traitance.
La mairie du 20ème et la mairie de Paris ont adopté des vœux de soutien aux grévistes, mais sans que Paris Habitat dans lequel la Ville de Paris a un rôle prépondérant n’intervienne pour faciliter une issue positive au conflit. L’inaction de Paris Habitat est apparue encore plus inadmissible lorsque Le Parisien du 30/01/2016 a révélé le scandale des rémunérations de son Directeur Général, Stéphane Dambrine (14 000 € nets par mois et 500 000 € de parachute doré en cas de licenciement), alors même que les grévistes voyaient leurs comptes bancaires bloqués et recevaient des menaces d’expulsions locatives pour loyers impayés !
Des résultats positifs…enfin !
Au bout d’un combat acharné, et après avoir reçu à plusieurs reprises des propositions ridicules de la part du patron, les grévistes ont pu finalement obtenir par un protocole de fin de grève signé le 26 janvier 2016 :
la progression des salariés  AS1 à AS2 dans la grille des salaires (environ 6 € par mois)
la fourniture de deux tenues de travail par an, avec mise à disposition d’une machine à laver sur chaque lot pour leur entretien
aucune sanction disciplinaire contre les grévistes
200 € de prime exceptionnelle
60 % des jours de grève payés
Par ailleurs, le patron s’est engagé à supprimer la clause de mobilité par l’envoi d’un avenant au contrat de travail. C’est une mesure très importante car la clause de mobilité permet à l’employeur de changer un salarié de lieu de travail comme bon lui semble. C’est un outil de l’arbitraire qui peut même faire perdre son travail à un salarié, si le nouveau lieu de travail est éloigné de son domicile.
Les recours des salariés devant les prud’hommes sont maintenus.
Les grévistes n’ont pas obtenu satisfaction sur toutes leurs revendications, mais ils ont un sentiment de fierté pour ces avancées et ont repris le travail la tête haute, face à un patron qui voulait les écraser.
Une grève riche d’enseignements
Seul un soutien très large des citoyens, des habitants, des organisations, quelles que soient les étiquettes syndicales, politiques, associatives a permis de gagner. Les salariés et les syndicats ont tout intérêt à créer des dynamiques de luttes qui gagnent car l’ensemble du monde du travail pourra en profiter. Chaque syndicat doit sortir de son « pré carré » pour contribuer à cette dynamique.
Une fois de plus, à travers cette grève, les salarié-e-s de la propreté ont démontré leur combativité exemplaire. Mais, il faut bien constater que, dans ce secteur particulier, leurs luttes se heurtent encore trop souvent à des syndicats ou des délégués qui ne les défendent pas, ce qui les oblige à se battre sur tous les fronts. Cette question est un enjeu et un défi dans le mouvement syndical car c’est un obstacle à la victoire des luttes.
Une fois de plus les salariés dans cette mobilisation, mettent en lumière toutes les questions posées par le recours à la sous-traitance : bas salaires, droits au rabais, précarité, non respect du code du travail, divisions entre salariés par l’éclatement des statuts…etc. L’enjeu est donc de combattre ces divisions, de diriger les mobilisations et les pressions aussi bien sur le donneur d’ordre que sur l’entreprise sous-traitante, d’amener les salariés et syndicats du donneur d’ordre à soutenir les luttes dans la sous-traitance. C’est en surmontant les divisions, en reconstituant la « communauté de travail » que, tous ensemble, les salariés en grève et leurs soutiens peuvent gagner.
Les employeurs de la Propreté sont de plus en plus acharnés à n’accorder aucune avancée à une partie de leurs salariés, par crainte de devoir accorder ces avantages aux autres salariés de l’entreprise suite à des mobilisations ou par des actions devant les prud’hommes au nom de l’égalité de traitement et de perdre des parts de marché face à la concurrence. Les grèves récentes chez TFN, ONET, OMS….présentent de nombreuses similitudes et montrent l’intérêt qu’il y aurait à coordonner et faire converger les luttes dans le secteur du nettoyage.
Correspondante locale. 8/02/2016.