Des débats sont essentiels. Celui sur la question des « génocides » en fait partie. Dans le Haaretz du 30 janvier 2024, deux historiens israéliens, proposent un long article sur la question. Extrêmement documenté, il mérite d’être lu en détails, car il est très convaincant. Focus sur le texte ci-dessous.

Il n’y a pas d’Auschwitz à Gaza. Mais c’est quand même un génocide.

Par Daniel Blatman et Amos GoldBerg1Historiens de l’Holocauste et des études sur le génocide à l’Université hébraïque de Jérusalem.. Publié sur le site de Haartez, jeudi 30 janvier 2025. Traduit et publié par Yves Romain sur son Blog de Mediapart.

La question de savoir comment définir correctement les atrocités perpétrées par Israël dans la bande de Gaza est débattue depuis plus d’un an entre chercheurs, experts juridiques, militants politiques, journalistes et autres – un débat auquel la plupart des Israéliens ne sont pas exposés. Pour les dizaines de milliers d’enfants morts, blessés et orphelins, et les nourrissons qui meurent de froid à Gaza, peu importe la définition finalement donnée à ce crime par la Cour internationale de justice ou par les historiens.

Mark Twain a écrit que « l’encre même avec laquelle toute l’histoire est écrite n’est qu’un préjugé fluide ». Les dangers d’écrire l’histoire de manière biaisée sont clairs et soulignent la nécessité de définitions prudentes et mesurées pour parvenir à une compréhension précise des événements qui se déroulent. Néanmoins, un examen comparatif méticuleux des événements de l’année écoulée conduit à la conclusion douloureuse qu’Israël commet effectivement un génocide à Gaza.

L’historien Shlomo Sand a soutenu dans cet article (édition hébraïque de Haaretz, 15 décembre 2024) que malgré les terribles atrocités et les crimes de guerre commis par Israël à Gaza, ils ne constituent pas un génocide. À l’appui, Sand a comparé la guerre à Gaza à deux événements similaires, selon lui, au cours desquels les armées de pays démocratiques (la France et les États-Unis, respectivement) ont commis des atrocités contre les populations civiles qui n’étaient pas moins horribles que celles perpétrées à Gaza, mais leurs actions n’ont pas été qualifiées de génocide : la guerre d’Algérie (1954-1962) et la guerre du Vietnam (1965-1973).

L’affirmation de Sand est inexacte. Ben Kiernan, l’un des plus grands spécialistes mondiaux du génocide, a estimé dans son livre de 2007 Blood and Soil : A World History of Genocide and Extermination from Sparta to Darfur, que pendant l’occupation coloniale française de l’Algérie (1830-1875), entre 500 000 et 1 million d’Algériens sont morts de faim, de maladie ou de meurtres délibérés ; Kiernan considère que le colonialisme de peuplement en Algérie mène au génocide, semblable aux génocides causés par l’occupation et la colonisation en Amérique du Nord et en Australie. […]

Pour lire la suite de l’article de Daniel Blatman et Amos GoldBerg : « Il n’y a pas d’Auschwitz à Gaza. Mais c’est quand même un génocide. »
Notes
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    Historiens de l’Holocauste et des études sur le génocide à l’Université hébraïque de Jérusalem.