Jeudi 27 février, plus de 20 000 personnes se sont mobilisés à Paris et dans toute la France contre la tentative de coup de force du MEDEF. Une mobilisation vaste est entrain de naître qui mêle artistes, techniciens mais aussi chômeurs et précaires.
L’unanimité du secteur culturel permet d’installer un rapport de force qui semble favorable aux intermittents. Pourtant, la proposition du MEDEF (la suppression pure et simple des annexes 8 et 10) était articulée à un appel à l’Etat qui semble avoir dès à présent ouvert un débat bien plus vaste. Pour certains (dont la CFDT), le régime des intermittents est une subvention cachée à la vie culturelle. L’argumentaire récurent de la ministre s’appuie d’ailleurs sur les annexes pour parler d’exception culturelle et de rentabilité générale de l’investissement.
Une des issues possible de la négociation serait un maintien du dispositif mais à la charge de l’Etat, alors que les intermittents tiennent à rester dans la solidarité inter-professionnelle. Nous touchons ici à 2 questions qu’ouvrent cette mobilisation. Le secteur culturel souffre d’un déficit de financements publics. La politique générale d’austérité aggrave cette situation et l’intermittence est souvent une réponse à un manque de subventions. Par ailleurs, les annexes 8 et 10 ont été inventés pour des situations d’emplois bien précises : la nécessité d’un secteur d’activité d’avoir recours à des CDD à répétition. Les annexes sont précisément là pour lutter contre la précarité “mécanique” du secteur.
Ce combat doit permettre d’ouvrir en grand ces 2 débats cruciaux pour notre vie commune :
– Comment maintenir des services publics forts et utiles dans cette stratégie folle d’austérité ? La culture est un exemple emblématique d’une saignée générale. Sur nos territoires, les collectivités se désengagent et font souvent le choix de sacrifier les petites structures pour sauver les grosses. De Sarkozy à Hollande, nous sommes arrivés à l’os. Le maintien d’une vie artistique riche ne peut s’accommoder ni de la baisse du budget de l’Etat ni des attaques contre les collectivités territoriales.
– Les annexes 8 et 10 ne sont pas attaqués pour un déficit, très largement imaginaire. Le régime des intermittents du spectacle est menacé par la MEDEF car il est un contre exemple à la précarité qu’induit la course au CDD aujourd’hui généralisée. S’il ne peut être étendu à tous, il montre pourtant qu’en adaptant les mécanismes d’indemnisation du chômage aux situations réelles de l’emploi, nous pouvons changer de vision sur le marché du travail et permettre de transformer la précarité en sécurité. Ce conflit nous amène à réfléchir tous ensemble sur la place du travail dans nos vies et plus largement sur la quête de dignité humaine que doit permettre notre vie en société. Personne n’a de réponse clef en main, mais la souffrance au travail doit cesser, la détresse sociale doit cesser, l’accaparement des richesses par un petit nombre doit cesser.
Notre mouvement “Ensemble”, le Front de Gauche, et tous les citoyens qui pensent qu’une alternative à gauche est souhaitable, seront aux côtés des intermittents car leur combat est aussi une porte ouverte vers demain.
Le prochain rendez-vous de mobilisation est fixé au 13 mars.
Laurent Eyraud-Chaume