Parce que c’est un engagement ancien (1999) , que les gouvernements successifs qu’ils soient de gauche ou de droite n’ont pas concrétisé, tout en étant contraints de prendre en compte  les situations dans les régions concernées.
Parce que, face à une économie mondialisée, le plurilinguisme, la diversité des langues reste un enjeu d’avenir, pour le français comme pour les langues dites régionales.
Parce qu’aujourd’hui, ce ne sont pas des langues régionales ou minoritaires, souvent fragiles, qui représentent un danger pour une « République une et indivisible » de plus en plus inféodée aux intérêts économiques supra-nationaux, mais les inégalités sociales structurelles.
La volonté de ratification (qui impose une révision constitutionnelle et donc prendra encore du temps) est d’ailleurs surtout un symbole, face au tout-aussi symbolique article 2 de la constitution imposé par la droite « la langue de la République est le français ».
On le sait, de très fortes pressions s’exercent pour un  recours systématisé à un « tout-anglais » uniformisé, une conception uniquement utilitariste d’une langue réduite à un outil de communication standard. Mais penser le maintien et le développement des langues à la seule lumière de leur « utilité » économique ou de leur potentiel de locuteurs est extrêmement réducteur. Bien au delà de l’aspect patrimonial, c’est un enjeu pour le développement même de la pensée humaine dans toute sa complexité, de la culture universelle.
Il y a un an, le vote par le Parlement européen du Rapport sur les langues européennes menacées de disparition et la diversité linguistique au sein de l’Union européenne avait constitué un événement important .
En France, les langues dites « régionales » participent de la diversité constitutive de l’identité nationale. Beaucoup d’entre elles ont des liens, des filiations, avec les langues de nos proches voisins et sont une façon d’accéder plus facilement à leur culture. Certaines sont des langues couramment utilisées dans des pays voisins.
Bien sûr, derrière l’expression « langues régionales » existent des réalités très différentes tant du point de vue des territoires concernés (en métropole ou dans les TOM et DOM) que de leur place dans la vie sociale ou culturelle, ou de leur légitimité dans des pays limitrophes (basque, catalan…). Leurs évolutions dans la vie sociale, économique ont été différenciées (médias, familles, dynamique transfrontalière…), des différences qu’on retrouve aussi dans leur place dans le système éducatif.
Dans le Service public, ce sont déjà des milliers d’élèves (plus nombreux d’ailleurs que dans les écoles associatives ou privées)  qui suivent un enseignement de ou en basque, breton, catalan, occitan, alsacien, corse… dans des écoles, collèges et lycées. De l’initiation à l’enseignement dans la langue en passant par l’optionnel ou le bilinguisme à parité horaire, les demandes, l’offre, les situations sont très diverses. L’enseignement en langue régionale (bilingue à parité horaire dans les écoles, au moins deux disciplines enseignées en langue régionale en collège…), encore insuffisamment développé faute de moyens dans plusieurs régions, est pourtant indispensable pour permettre de former de véritables locuteurs de la langue, capables de la transmettre à leur tour, d’intervenir dans la vie culturelle.
Certaines collectivités territoriales, dans le cadre de leurs compétences, ont mis en œuvre une politique linguistique, favorisant une place plus grande des langues régionales dans l’espace public (médias, signalétique, formation pour adultes, aides à la création vivante…) et finançant des outils pédagogiques et des projets culturels. Cela passe par un soutien actif  à la vie culturelle (édition, spectacles), aux associations. C’est un vaste  domaine et il demande à être encore développé.

Isabelle Sargeni-Chetaud