C’est vrai, les Grenelle 1 et 2 ont appris aux observateurs à se méfier des discours des pouvoirs politiques sur les urgences et les « révolutions » pour sortir et préparer l’après pétrole et instaurer un nouveau modèle énergétique français. Mais on ne se refait pas, car on aimerait croire à un sursaut du pouvoir en place. On attendait donc le plan de Ségolène Royal présenté au Conseil des ministres le 18 juin dernier.
Le verbe y était. « Il faut révolutionner la société en prenant un ensemble de mesures  comme la lutte contre les gaspillages, l’isolation des bâtiments, la réorientation du secteur de l’énergie. »
Nous pouvions donc rêver qu’enfin, ces mesures soient à la hauteur des prévisions qui confirment que le dérèglement climatique est impacté par les émissions de gaz à effet de serre qui  va accélérer le réchauffement (entre + 2,6°C et + 4,8°C à la fin de ce siècle), si les derniers de la classe (des pays occidentaux) continuent leur productivisme et leur consumérisme actuel.
Nous pouvions espérer que ce verbe se traduise en loi ainsi rédigée : 100 % d’énergies renouvelables d’ici à 2050, EDF et GDF contraints d’abandonner tout projet d’exploitation de charbon, de sables bitumineux, de gaz et huiles de schiste. La moitié des réacteurs nucléaires définitivement arrêtés d’ici 2020, tous les grands projets autoroutiers et aéroportuaires stoppés, relance du recyclage, des performances énergétiques, des transports collectifs, …
Formidable ! Elle aurait été formidable !
Et oui, nous aurions voulu entendre que cette nouvelle loi prenne en compte ces mesures que bon nombre d’associations et organisations écolos, étaient prêtes à soutenir ! Mais voilà, tout ce travail, depuis un an piloté par un « Conseil national », avec plus de 100 000 contributeurs dans des débats territoriaux, a été mis au pilori. Ségolène Royal n’a pas voulu s’appuyer sur cette dynamique, cette volonté populaire et a préféré concilier entre les lobbies industriels, les pouvoirs politiques, dans un contexte politique particulier. Les objectifs fixés n’étaient pas inintéressants mais toutes les velléités réellement transformatrices ont été tuées dans l’œuf par les contraintes budgétaires et l’idéologie libérale qui veut respecter une concurrence libre et non faussée où le profit financier est le moteur d’un marché offensif, antinomique avec l’intérêt de l’humanité.
On assiste à la gué-guerre des cabinets avec le ministère du Budget qui réclame 50 milliards d’économies alors que le début de la mise en oeuvre des mesures écologiques d’urgence devraient réclamer un investissement de 10 à 30 milliards d’euros supplémentaires chaque année, même si au bout du compte, les factures d’énergies, avec des vraies mesures, devraient diminuer d’une façon très importante.
Pourtant, des Conseils régionaux ont montrés des possibilités intéressantes concernant les investissements dans le domaine des isolations et la rénovation thermique des logements, pour éviter l’exclusion énergétique et réduire des factures pour tous les habitants pour un meilleur environnement. Le tiers financement, c’est-à-dire le fait de faire payer le coût des travaux de rénovation dans un logement par les économies de chauffage permises, est bloqué par les banques. Les opérations financières ne devraient être dictées que par l’intérêt écologique et non par l’intérêt des banques. Ce sont des exemples que le ministère devrait suivre. La Caisse des dépôts et consignations doit être l’investisseur majeur dans le secteur du logement et doit aider à lutter contre les bulles financières des banques. Le secteur public financier à un rôle majeur pour reprendre la main contre la spéculation, pour changer de braquet et répondre aux objectifs climatiques et sociaux.
Option déraisonnable !
La mesure phare du gouvernement sur la transition énergétique est l’objectif de multiplier par trois  les énergies renouvelables consommées en 2030 (de 11 % à 32 %). Celui d’une réduction des émissions de gaz à effet de serre (de – 40 % d’ici 2030) est renvoyé à un objectif de l’Union européenne. Concernant le nucléaire, Ségolène Royal rappelle que le gouvernement ne fait pas le choix de sortir du nucléaire. En concertation avec EDF, le gouvernement prévoit un ajustement progressif entre la montée en puissance des énergies renouvelables et la diminution progressive du nombre de centrales nucléaires. La réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité sera inscrite dans la loi, mais pas la planification de la fermeture des centrales âgées de plus de 40 ans. Réduire de 50 % la part du nucléaire dans la production électrique reste une promesse. Le gouvernement devrait plafonner au niveau actuel, soit 63,2 gigawatts. A priori, on ne va pas vers des économies d’énergie électrique. Au contraire, dans ce domaine, le gouvernement veut inciter à l’achat et au partage des voitures électriques.
Pourquoi ne pas faire un plan d’ampleur pour améliorer les transports collectif, partout en ville comme en campagne ? Avant d’envisager une commercialisation à grande échelle, est-ce difficile de s’interroger sur le coût, les composants de sa batterie et les contraintes liées à sa recharge ?
Ce n’est pas raisonnable. S’il faut absolument planifier la sortie de l’énergie fossile, il faut en même temps planifier la sortie du nucléaire civil et militaire ! Les catastrophes de l’Ukraine, du Japon, sont si loin dans les esprits, pour déjà les avoir oubliées ? Pourtant, tous les jours, nucléaire civil et militaire font des victimes et montrent qu’il est impossible de vivre dans un monde où l’on parie sur une énergie de mort sous prétexte d’une fausse indépendance ou d’une énergie à bas coût faussement calculée.
Le gouvernement doit planifier la fermeture progressive des centrales nucléaires, en premier lieu les centrales les plus veilles, et en urgence celles de plus de 40 ans ! Il doit aussi renoncer à relancer d’autres nouvelles centrales comme celles EPR.
Les objectifs du GIEC de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre dans les pays occidentaux avant 2050, doivent être repris par le gouvernement et planifié par un plan décennal français commençant par fixer un premier plan pour 2020.
En même temps, un plan doit viser à déployer les moyens pour développer les énergies renouvelables en assouplissant les contraintes d’urbanismes pour l’éolien et le photovoltaïque. La formation et les aides financières pour les artisans doivent permettre de dynamiser le tissage sur tout le territoire.
La France possède une grande longueur littorale qui doit permettre une exploitation de l’énergie marémotrice très productrice d’électricité. Elle doit faire l’objet d’une étude approfondie, d’autant plus que c’est une technologie bien connue. Les mini-centrales et petites centrales hydrauliques doivent être multipliées et leurs réseaux entretenus (aujourd’hui, 13,8 % des sources d’énergies).
Pour respecter l’urgence climatique, l’éolien terrestre et offshore en France doit être multiplié par 4 d’ici 2030. Il doit passer de 3 % à 12 % et se faire dans des conditions qui respectent l’environnement terrestre et marin, la circulation marine et la pêche.
A la Conférence environnementale de 2013, François Hollande avait annoncé une réduction de 50 % de la consommation globale d’ici 2050 et une baisse de 30 % de la consommation de combustibles fossiles d’ici 2030. Comme d’habitude sans donner les moyens de ces objectifs. Dans une loi de transition énergétique, la place des réductions de consommations devrait constituer une orientation précise et forte avec, notamment, la prise en compte de contraintes qui doivent protéger les plus fragiles.
La transition énergétique fait partie de la planification écologique, dans le Front de gauche, elle doit faire l’objet de débats pour que ces questions soient centrales dans l’Alternative que nous voulons construire ensemble. Nos universités d’été doivent être la possibilité d’en discuter.
Commission nationale écologie