A l’initiative de plusieurs familles victimes de violences policières, une marche pour la Justice et la Dignité se tiendra le 19 mars 2017 entres les places de la Nation et de la République. Cette marche sera suivie d’un concert sur la place de la République (et vous pouvez participer au financement ici )
Une marche à caractère antiraciste à partir des violences policières est en pleine résonnance avec les besoins politiques de la période alors que nous faisons face à une déferlante raciste et sécuritaire.
Les violences policières qui peuvent aller jusqu’à la mort constituent une manifestation particulièrement tangible du racisme structurel et de leurs traductions institutionnelles en France. Ainsi, au mois de janvier 2017, le Défenseur des droits indiquait qu’un « jeune homme perçu comme noir ou arabe » a « vingt fois plus » de probabilités d’être contrôlé que l’ensemble de la population.
Cette réalité sociale se traduit par des cas dramatiques tel que celui Théo Luhaka, du nom du jeune violé par des policiers à Aulnay-sous-Bois est le dernier épisode en date d’une chaîne de violences policières. Elle fait également écho à l’indignation soulevée récemment par la mort d’Adama Traoré dans les mains de la gendarmerie ainsi que des cas plus anciens tels que celui d’Amine Bentounsi, Lamine Dieng, Hocine Bourras, Wissam el Yamni, Amadou Koumé, Ali Ziri… et bien sûr Zyed et Bouna à Clichy-sous-Bois en 2005, la liste est très longue.
La visite de F.Hollande au chevet de Theo Luhaka indique l’inquiétude du gouvernement sur cette question à quelques mois des présidentielles alors que le cas paraît indéfendable… mais que les policiers ont bénéficié d’une requalification (de « viol en réunion » à « viol » pour un policier et « violences » pour les autres), que l’IGPN écarte la thèse du viol, que les policiers sont toujours en liberté bien que suspendus et que le traitement médiatique laisse pour le moins à désirer…
Depuis des rassemblements se sont tenus à Bobigny et dans d’autres villes de France, certains suivis d’affrontements avec la police. Ces rassemblements sont un nouveau témoignage d’une sourde révolte couvant face à la perpétuation des pratiques racistes systémiques (voir les articles sur le site d’Ensemble ici et ici notamment ).
A cela s’ajoute une victoire de principe avec la condamnation en appel du policier qui a tué d’une balle dans le dos Amine Bentounsi dont la sœur, Amal Bentounsi, est une cheville ouvrière de la Marche du 19 mars et a mené une campagne de longue haleine pour obtenir justice pour son frère. Cette décision, rarissime, est un coup porté à l’impunité policière.
Néanmoins, ce succès est remis en cause par la dernière loi adoptée par cette majorité finissante sur la présomption de légitime défense de la police, qui s’apparente à un véritable permis de tuer et dénoncée par différentes organisations telle que le Syndicat de la Magistrature.
Cette loi est en un sens un « couronnement » liberticide et sécuritaire de ce quinquennat combinée avec un discours n’hésitant pas à jouer sur les ressorts racistes, particulièrement par la voix de Manuel Valls. Attaquer le racisme sur le versant des pratiques institutionnelles – qui sont généralement un « laboratoire » de la répression mise en œuvre contre les mouvements sociaux et écologiques – permet de renter au cœur de la dimension politique de la lutte antiraciste. De plus, c’est une porte d’entrée fédératrice pouvant rassembler très largement au-delà des divergences et ayant une grande subversive contre l’ordre social capitaliste.
Ce caractère rassembleur s’est manifesté par le très large périmètre de soutien, à partir de différents textes, à la Marche et qui regroupe outre les familles initiatrices, différents secteurs de l’antiracisme, des structures de solidarité avec les migrants, des collectifs et des associations locaux, des organisations de sans-papiers, des syndicats et des partis de gauche et de gauche radicale (Ensemble !, NPA, PG, PCF, EE-LV…)… Au final, la base de la Marche s’est élargie et peut être synthétisée par les 4 points sur lesquels Ensemble ! a appelé :
– La revendication légitime de Vérité et de Justice portée par les familles victimes de violences policières doit être soutenue.
– La banalisation des discours, des actes racistes et leur caractère structurel sont inacceptables.
– Les droits démocratiques doivent être défendus face à l’Etat d’urgence et aux mesures liberticides qui touchent particulièrement celles et ceux qui subissent le racisme.
– L’accueil des migrant-e-s dans des conditions dignes et la régularisation de tous les sans-papiers doivent être opposés à l’Europe forteresse.
Dans la période actuelle de renforcement de l’extrême-droite et de forte banalisation du racisme, la réussite de cette initiative constitue un enjeu majeur. Cela peut constituer un point d’appui pour constituer un mouvement antiraciste combattif, unitaire et capable de porter la contradiction politique.
Alors retrouvons nous nombreux pour marcher pour la Justice et la Dignité le 19 mars à 14 heures à Nation !
Emre Öngün