Profitant de l’émotion causée par un fait divers mettant en cause un jeune, le Gouvernement a décidé de faire voter une loi durcissant la justice envers les mineurs. Jean-François Le Dizès rappelle que la répression ne peut se substituer à la prévention. La Convention internationale des droits des enfants l’impose.
Loi Attal : un nouveau « coup de com » ?
Par Jean-François Le Dizès. Le 16 février 2025.
Profitant de l’émotion causée par la mise en exergue d’un fait divers mettant gravement en cause un jeune mineur, le gouvernement a décidé de faire voter par le Parlement une loi durcissant la justice envers les mineurs : comparution immédiate, inversion du principe de l’atténuation de peine, qui devient une exception pour les plus de 16 ans.1Que contient le texte sur la justice des mineurs, voté en première lecture par l’Assemblée nationale ?
La première justification invoquée est la soi-disant augmentation de la délinquance juvénile. Or, « selon la défenseure des droits », Claire Hédon, cette idée n’est nullement étayée2https://www.defenseurdesdroits.fr/avis-sur-la-proposition-de-loi-visant-restaurer-lautorite-de-la-justice-legard-des-mineurs-753. Pourquoi ne l’a-t-elle pas été ?
La seconde justification invoquée est le fait que, parmi les personnes appréhendées lors des émeutes des banlieues de 2023, on comptait de nombreux jeunes. Or ces émeutes, provoquées par le meurtre commis par un policier, ont été le révélateur d’un désarroi d’une population délaissée. Elles étaient en effet le résultat de la politique d’abandon des banlieues menée par Emmanuel Macron. Celui-ci avait, pour des raisons budgétaires, rejeté en 2018 l’ensemble du plan élaboré par Jean-Louis Borloo qui avait pourtant été missionné par le président de la République à ce sujet !
En matière de financement, notons que les émeutes de 2023 ont provoqué des dégâts évaluées à un milliard d’euros, soit quatre fois plus que celles de 20053https://www.senat.fr/fileadmin/Presse/Documents_pdf/20240410_Essentiel_MI_Emeutes.pdf…
La seule réponse donnée par Macron à ces émeutes fut « l’ordre ». Aucune réflexion sur les causes de ces émeutes : discriminations, pauvreté, exclusion, répression policière… À quand les prochains soulèvements ?
D’une manière générale, la protection de l’enfance défavorisée est délaissée par nos derniers gouvernements : par exemple, au 1ᵉʳ octobre 2014, 4 211 jeunes repérés par l’institution judiciaire n’étaient pas accompagnés faute d’un nombre suffisant d’éducateurs4https://snpespjj.fsu.fr/tribune-justice-des-mineur-e-s-face-aux-drames-et-au-populisme-penal-defendre-le-droit-a-leducation-pour-toutes-et-tous-pour-les-enfants-de-ce-pays/. Ce déficit n’est-il pas source de délinquance juvénile ?
Une nouvelle fois est soulevée la question financière et donc l’insuffisance des impôts prélevés sur les riches !
Ainsi, la loi Attal, loin de s’attaquer aux causes de la délinquance juvénile ou des émeutes urbaines, n’est-elle pas le énième « coup de com » auxquels nos dirigeants nous ont habitués ?
Enfin, la loi Attal nous éloigne encore un peu plus d’un des préceptes énoncés dans la « Convention internationale des droits de l’enfant », signée par la France. En effet, celle-ci précise qu’un enfant, qui est un adulte en construction, doit faire l’objet d’une prise en charge et d’un suivi spécifique.
Notes
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