Une discussion publique indispensable : le projet de Loi de programmation militaire

Cette démocratie de frime et de faux semblants nous embarque toutes et tous dans des situations à hurler ! Au sujet de l’armement, de fait, l’orientation choisie par le gouvernement Macron tourne le dos à toute politique réelle en faveur de la paix.

Il est important de le souligner : cette option vient opposer un refus au Secrétaire général de l’ONU.

Dans son exposé sur les priorités pour l’année 2023,  « L’heure n’est pas aux petites retouches », prévient António Guterres devant l’Assemblée générale face à l’imminence du minuit apocalyptique. Il énonce une priorité, le droit à la paix. « Une paix dans le respect de la Charte des Nations Unies et du droit international ». Et il rappelle : « L’invasion de l’Ukraine par la Russie inflige des souffrances indicibles au peuple ukrainien et a de profondes répercussions mondiales ».

Ce projet de loi du gouvernement Borne engage les dépenses de 2024 à 2030 alors que l’actuelle Loi de Programmation Militaire (LPM)  ne s’achèvera qu’en 2025.

Un minimum de souci de la démocratie aurait été – au moins ! – de donner du temps pour discuter des options et de la situation mondiale.

Les arguments sur les milliards détournés, qui pourraient servir à d’autres dépenses indispensables, sont évidents ! Autant le dire, simplement : la récupération des milliards de profits pour une cinquantaine de milliardaires devrait y pourvoir !

Les options militaires ne doivent pas, pour autant, rester confisquées entre politiciens professionnels. Certes, l’armement est un domaine industriel chéri par la bourgeoisie française, à la hauteur du 4e marchand d’armes mondial.

Nous nous opposons au maintien de domaine réservé aux secrets diplomatiques et militaires, alors que, comme l’écrivait déjà en 2001 Claude Serfati, nous vivons l’ère de la mondialisation armée((C. Serfati, L’État radicalisé, La France à l’ère de la mondialisation armée, La fabrique, 2022)).

Ces questions sont lourdes : les gouvernants font un chantage aux risques nucléaires, qui sert surtout à paralyser les interventions pour la paix.

Aucune force politique ne devrait accepter de rentrer dans le jeu du vote d’un tel texte sans avoir imposé – préalable obligé – des mois d’information et de débats dans le pays ; une ou des conventions citoyennes, pour démocratiser l’accès aux informations…

Les discussions nécessaires sont très nombreuses :

  • Pour le rejet de ce projet de loi de programmation militaire (…) et de son objectif budgétaire notamment.
  • Mais tout autant la démocratisation du débat public sur les questions de défense et de ventes d’armes : elle appelle une meilleure implication du Parlement.
  • Pour une discussion publique des options de relations internationales : le respect des prérogatives des États africains et l’arrêt des opérations extérieures au Sahel ; le soutien à la résistance des peuples contre tous les impérialismes, y compris russe, israélien, chinois…
  • Et donc un débat sur le maintien ou pas de la France dans l’OTAN, et sur la Défense européenne.
  • Une exigence qui a trop de retard : que la France soit observatrice lors des conférences des États signataires du Traité International d’Interdiction des Armes Nucléaires, comme marque d’engagement en faveur d’un désarmement nucléaire universel.
  • Nous devrions viser la promotion d’une vraie diplomatie internationale – notamment dans le cadre de l’ONU – qui favorise l’accès à une mondialisation multilatérale et pacifiée. Cela implique un renforcement des moyens donnés à la résolution non violente des conflits et à la défense civile non violente.
  • Des mesures urgentes : l’obtention d’informations sur l’empreinte carbone des dépenses militaires ; la reconversion de certaines industries d’armement et de leurs personnels.

Un certain nombre de militant·es se sont donc regroupé·es et ont publié ce texte, paru dans Mediapart : « Le projet de loi de programmation militaire : vers une « économie de guerre » parasite et dangereuse »

Alerter largement est certainement nécessaire, même au milieu d’une actualité si chargée !

 

Pierre Cours-Salies
7 avril 2023