Le Front National savoure sa victoire idéologique. La Région Ile-de-France, présidée par la droite de Valérie Pécresse, a voté jeudi dernier la suppression de ses aides au transport public pour les sans-papiers qui perçoivent l’AME (Aide médicale d’Etat). Par souci de « justice et d’équité », a-t-elle légitimé. Loin de l’esprit d’humanité et d’égalité, lui a-t-on rétorqué. Sans convaincre cette assemblée dominée par le bleu et teintée de marine puisque la mesure a été adoptée par 131 voix pour et 64 contre. Plus de 100.000 personnes dans le besoin vont donc s’asseoir sur les 75% de remboursement par la Région de leur pass Navigo pour circuler dans le métro et le RER.

L’acte de régression sociale ne touche pas à la question de l’immigration par hasard. Il s’agit d’envoyer un signal sur sa droite en affichant la fermeté à l’égard des sans-papiers et des réfugiés. Cette mesure fait office de symbole en ce tout début de mandature. Le discours de Valérie Pécresse fut sans ambages : il faut, affirme-t-elle en substance, fermer les portes et les fenêtres. De l’accueil, il ne reste rien. De façon cynique, la présidente de la Région valorise la récupération, sur le dos des sans-papiers, de 52 millions d’euros qui aideront à financer pour les autres le pass à tarif unique en Ile-de-France – qu’elle avait si longtemps contesté. Le chiffre avancé est par ailleurs faux, construit à partir du nombre personnes touchant l’AME et non à partir ceux qui achètent réellement un pass Navigo. L’enjeu porte en réalité sur environ 11 millions d’euros…

Le Front de Gauche et EE-LV ont tenu la dragée haute dans l’assemblée régionale aux élu-e-s LR mais aussi, surtout, à ceux du FN déchaînés qui se frottaient les mains et applaudissaient à tout rompre. « Quelle fierté et quel plaisir de voir une des principales propositions du programme du FN » soumise au vote, s’est réjoui Aurélien Legrand, vice-président du groupe. Les élu-e-s PS ont voté contre cette proposition, fustigeant la stigmatisation des étrangers. Perfide, Valérie Pécresse leur a rétorqué : « J’ai vu le Premier ministre Manuel Valls » pour parler du financement du pass Navigo et « il m’a dit qu’il n’était pas du tout choqué ».

Nous y sommes : quand l’ensemble de l’échiquier politique pousse à droite, les personnes les plus en difficulté en font chaque jour un peu plus les frais. Au terme de cette séance, nous avions la nausée.

Clémentine Autain