Le gouvernement se prépare à l’affrontement
Le lundi 14 novembre, la cour administrative d’appel de Nantes a finalement rejeté les recours des opposants. Une semaine auparavant, la rapporteure publique avait demandé l’annulation de quatre arrêtés préfectoraux indispensables à la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, reprenant une bonne partie des arguments des opposants sur la destruction des espèces protégées. Ce rejet des conclusions de la rapporteure douche les derniers espoirs juridiques des opposants. Cette décision de justice est avant tout une décision politique qui signale la volonté du gouvernement d’évacuer la ZAD et de commencer les travaux, et cela très vite. En effet, le calendrier devient très serré. Si demeurent quelques incertitudes tenant aux échéances de membres du gouvernement – un éventuel départ de Valls pour préparer sa candidature, le début de la campagne des primaires socialistes-, celui-ci n’a pas d’obstacle, alors que les propositions de la rapporteure publique pouvaient constituer une porte de sortie. De plus, le fait que la trêve hivernale ait été accordée pour au moins quatorze lieux de vie situés sur la ZAD ou à sa périphérie, ce qui les préserve légalement de toute expulsion, aurait pu inciter le gouvernement à reporter sa décision. Mais l’obstination à faire régner l’ordre est la plus forte, et Valls semble donc se diriger vers une expulsion imminente. Sa fenêtre de tir est cependant étroite, les travaux ne pouvant commencer au plein cœur de l’hiver. La semaine qui s’ouvre pourrait donc voir le début des interventions des forces de l’ordre.
Organiser la solidarité et la mobilisation
A Notre-Dame-des-Landes, la préparation aux tentatives d’expulsion se poursuit, mais il est clair que l’échec éventuel de l’opération du gouvernement ne viendra pas seulement de ce qui se passera sur la ZAD. La mobilisation à venir se joue donc à différentes échelles ;
-sur la ZAD et dans les villages à proximité, les différentes composantes du mouvement marchent main dans la main. Depuis deux semaines, le COPAIN44 (Collectif des Organisations Professionnelles Agricoles Indignées par le projet d’aéroport) rassemble des tracteurs pour protéger les fermes, et les différents collectifs de la ZAD travaillent à la protection de la zone.
-dans le grand ouest, les collectifs de soutien sont également mobilisés, et les villes de Nantes et de Rennes sont particulièrement concernées, mais sont également dans l’œil du cyclone. Les souvenirs du mouvement contre la loi travail, la répression qui a visé des dizaines de militants (notamment par l’interdiction de manifester) font que ces villes peuvent également devenir des points de cristallisation, notamment à l’approche des fêtes de noël à l’occasion desquelles les commerçants demandent des renforts en forces de l’ordre. Par ailleurs, la répression préventive, qui vise à interdire des opposants à manifester et à les assigner à résidence, est en cours ou à prévoir. Une manifestation à Nantes ou autour de Notre-Dame-des-Landes aura lieu le samedi suivant le début des expulsions.
Au-delà, les collectifs de soutien à lutte contre l’aéroport qui s’étaient organisés en 2012 se mobilisent à nouveau, et déjà plus de quarante rassemblements sont prévus dès le premier jour des expulsions. Cette réaction aux expulsions ne peut être seulement ponctuelle, elle doit se prolonger dans les jours et les semaines à venir. La lutte de Notre-Dame-des-Landes représente trop d’enjeux écologiques, sociaux et profondément politiques en ce qu’elle vise à inventer d’autres mondes possibles, non capitalistes, à partir d’une résistance populaire face à un projet vieux de 40 ans, pour être défaite maintenant.
Le quinquennat de François Hollande s’était ouvert en 2012 par l’opération César, l’échec de l’expulsion de la ZAD puis l’élargissement de la lutte et la démonstration de la résistance et de la solidarité face aux bétonneurs. Depuis, Rémi Fraisse est mort sur une autre ZAD, l’état d’urgence a donné des ailes à l’autoritarisme qu’incarne à merveille la figure de Valls. C’est aussi pour ça qu’il faut gagner, pour mettre à bas cet édifice autoritaire qui gangrène de plus en plus notre société. Travaux ou expulsions, nous réagirons avec la même détermination !
Vincent Gay