La « réforme » de 1997 : 1ère étape de privatisation.
Elle a coupé la SNCF en 2 en créant RFF chargée de la gestion des infrastructures (voies, signaux, des bâtiments). Elle a permis à des opérateurs ferroviaires d’acheter des sillons (une portion de voie attribuée à un moment précis pour aller d’un endroit à un autre) à RFF pour faire rouler un train concurrent à la SNCF.
Elle n’a pas réglé le problème de la dette ferroviaire (31,7 milliards d’euros en 1997) provoquée par les lourds investissements d’infrastructures, notamment pour les TGV. Cette dette s’élève aujourd’hui à 37,9 milliards, incite à des péages élevés pour la rembourser et a de lourdes conséquences sur la qualité (près de 3 500 km de voies sont circulés au ralenti compte-tenu de leur manque d’entretien) et le tarif des transports (plus du tiers du prix du billet concerne les 3,44 milliards d’euros de péages que la SNCF paie à RFF).
Elle pénalise le système ferroviaire en lui imposant des « coûts de transactions » de 1,5 milliard d’euros, retardant les projets ferroviaires, handicapant le fonctionnement : les agents des 2 entreprises séparées devant travailler étroitement ensemble, doivent « perdre » du temps et de l’argent : négocier, rédiger des contrats, vérifier, contrôler, décider qui paie quoi, arbitrer les différends…
L’actualité des quais à raboter pour laisser passer des TER plus large, illustre les rapports difficiles entre 2 entreprises chargées de se coordonner pour faire rouler les trains de l’une sur les voies de l’autre.
Le projet de « réforme » de 2014
Il franchit un pas vers la privatisation de la SNCF et met en place une concurrence « franche et loyale » entre plusieurs opérateurs ferroviaires, en faisant payer la note aux cheminots et les conséquences aux usagers. Les pouvoirs publics et les financiers veulent corriger la « réforme » de 1997 :
– les dysfonctionnements importants entre RFF et SNCF ;
– l’absence de maîtrise des coûts, notamment de transactions ;
– l’éclatement du cadre social. La lettre de mission du ministre à Pepy comporte la compétitivité du système ferroviaire, c’est-à-dire la baisse du coût du travail et de la masse salariale.
Le projet de loi veut passer de 2 entités à 3 :
– Le Gestionnaire infrastructure unifié (GIU) regroupant 50 000 personnes dispersées aujourd’hui entre RFF, la Direction qui assure la Circulation et la régulation des trains et Infra SNCF qui entretient et surveille les voies. Il aura tous pouvoirs sur les sillons, les péages, les gares d’intérêt national pour « garantir l’accès transparent et non discriminatoire au réseau à tous les opérateurs ferroviaires ».
– L’établissement ferroviaire (EF) SNCF devient un simple opérateur de transport ferroviaire dont les activités seront davantage soumises à la concurrence récupérant des trafics (après le fret et le voyageur international, ce sera en 2019 le voyageur national et régional).
– L’Etablissement-mère censé chapeauter les 2 autres, mais de fait, son rôle sera réduit à la politique des ressources humaines et de formation pour l’ensemble des personnels. La droite a déjà promis, en cas de retour au pouvoir, de le supprimer…
– Une 4e entité, l’autorité de régulation ARAF renforcée, surveille l’ensemble et arbitre les conflits d’intérêts, avec l’appui d’un Haut-Comité, créé pour veiller au respect des intérêts des différentes parties et divers opérateurs ferroviaires.
La mobilisation s’appuie sur la plateforme unitaire CGT, SUD-Rail et UNSA
Ces 3 organisations représentent les ¾ des cheminotes et cheminots. Ensemble, elles revendiquent :
– une réelle réunification du système ferroviaire public autour de la SNCF,
– un seul contrat Etat/Système Ferroviaire Public de 10 ans,
– une seule Direction Générale gérant la stratégie et les finances, les systèmes d’information, la sécurité, le recrutement et la gestion du personnel,
– la reprise de la dette, et le financement des travaux de régénération par des ressources nouvelles,
– un programme législatif pour un report modal massif des transports de marchandises et de voyageurs de la route vers des modes alternatifs plus propres comme le rail,
– la précision dans la loi que les embauches à statut sont la règle,
– un décret socle afin que la future convention collective reprenne la réglementation du travail de la SNCF.
La grève reconductible à partir de mardi 10 juin à 19 h
A l’appel de la CGT et de SUD-Rail (renforcés par FO et FIRST non représentatifs), elle a démarré fort, avec la moitié des agents concernés ayant déclaré 48 h à l’avance leur intention de faire grève (loi dite du service minimum). Les Assemblées générales des grévistes décident chaque jour de la poursuite de la grève.
Soutenons les cheminots en grève pour défendre le service public ferroviaire, pour s’opposer, après la division de la SNCF en 2, de la couper en 3, dont un « super RFF » récupérant tous les rôles (et les emplois) de circulation et de régulation des trains, transformant la SNCF en simple opérateur ferroviaire, comme les opérateurs privés.
Patrice Perret.