Fin février, la Confédération Paysanne rendait publique une carte des fermes-usines en France, en fonctionnement ou en projet. Si l’ensemble du pays est concerné, le grand arc atlantique, de la Bretagne au Pays Basque, est particulièrement menacé. Tomates, volailles, poules et poulets, porcs, brebis et vaches sont les « secteurs d’investissements » les plus en vogue. La ferme des 1000 vaches est donc loin d’être un cas isolé.
Pour le moment, à Abeville (Somme), M. Ramery, promoteur des 1000 vaches avance ses pions. Après une première autorisation d’implanter 500 vaches, il en demande 880, ce qui lui permettrait de ne pas devoir être confronté à une nouvelle enquête publique. Mais les informations quant à l’état actuel de la ferme usine sont d’autant plus inquiétantes : problèmes sanitaires dus aux épandages sauvages, mortalité des bêtes, mauvaise qualité du lait… Le soutien implicite de la préfecture à l’industriel empêche de procéder à des réels contrôles, mais sur place, on estime que le nombre de 500 vaches a été dépassé, en toute illégalité, et que la mortalité pourrait atteindre 25% des bêtes. La bonne nouvelle est plutôt à trouver du côté des laiteries françaises, dont plus une seule ne souhaite s’approvisionner chez Ramery.
La ferme des 1000 vaches est donc obligée d’exporter sa production, en particulier en Belgique, où les producteurs de lait ne sont guère heureux de voir arriver cette nouvelle concurrence. Par ailleurs, le ministre de l’agriculture s’est engagé à ce que soit conduite une enquête publique pour toute extension du nombre de vaches. Petites avancées, encourageantes tout de même, d’autant plus qu’il n’est pas certain que le projet de Ramery soit économiquement viable avec un nombre de vaches inférieur à 1000.
Cependant, les opposants à la ferme-usine ne sont toujours pas entendus ; bien au contraire, ils sont traités comme des délinquants. En effet en octobre 2014, la justice a condamné les neuf prévus de la Confédération Paysanne à des amendes pénales ou à des peines de prison avec sursis, allant de deux à cinq mois. Trois l’ont été pour refus de prise d’ADN, les autres pour leur action de nuit, l’occupation du siège social de Ramery et le démontage symbolique de quelques pièces de la ferme-usine. Ces paysans ont agi contre l’industrialisation de l’agriculture qui constitue d’abord une menace pour leur existence en tant que petits paysans. Mais ils ont agi également au nom de l’intérêt commun, face une agriculture financiarisée, pour un autre modèle agricole, respectueux des équilibres des écosystèmes, favorable à la création d’emplois paysans et ruraux, pour une alimentation de qualité.
C’est pourquoi, lors de leur procès en appel à Amiens le 17 juin prochain, nous devons être massivement à leur côté. Leur combat est le nôtre, contre l’agriculture industrielle et la criminalisation des mouvements sociaux, à l’heure où le gouvernement met en place une loi de contrôle et d’écoute généralisés.
Toute la journée, face au tribunal d’Amiens, témoignages, prises de parole, concerts rythmeront notre mobilisation. En manifestant notre solidarité avec la Confédération Paysanne, nous ferons le procès de l’agro-businness. Tous et toutes à Amiens le 17 juin !
Vincent Gay