Eugène Bégoc contribue au débat ouvert par Jean-Claude MAMET sur ce site. Quelles finalités sert la constitution de L’APRÈS qui se réunit ces 21 et 22 juin avec la participation d’ENSEMBLE!, les un·es et les autres engagé·es dans la constitution d’une nouvelle formation politique à gauche ?
Avons-nous besoin d’une nouvelle formation politique ?
Par Eugène Bégoc. Le 18 juin 2025.
Trois raisons au moins conduisent ENSEMBLE! et l’APRÈS – que GDS a déjà rejoint – à construire une nouvelle force politique de gauche en France1Une force commune avec L’APRÈS. Espérons que d’autres composantes unitaires nous rejoindront rapidement.
À l’école du mouvement social
La première raison d’oser la création d’une nouvelle organisation à gauche découle d’un fait nouveau et majeur. Les élections législatives des 30 juin et 7 juillet 2024 ont été marquées par l’intervention syndicale, associative, citoyenne. De nouvelles formes d’articulation entre initiatives partidaires et expressions politiques syndicales, citoyennes et associatives sont donc à inventer.
Ce sera probablement le terrain de première mise à l’épreuve de notre convergence en marche.
Un cartel électoral français à ouvrir
La deuxième raison de créer un parti tient à l’enkystement des quatre partis du cartel Nouveau Front populaire (NFP) dans les jeux que leur assignent l’Élysée et les médias. Chacun est très éloigné des couches sociales dont ils veulent rester les représentants.
Faut-il pour autant abandonner les rôles que la forme parti a assuré dans le passé des gauches européennes ? Construire une stratégie de dépassement des rapports sociaux capital-salariat(s) : faire vivre le patrimoine d’expériences et d’idées critiques du capitalisme et des sociétés de domination ; permettre l’échange de milieux professionnels et d’engagements diversifiés ; impulser de nouvelles initiatives émancipatrices…
Notre nouvelle formation politique a un rôle irremplaçable à assurer pour actualiser la critique de l’État. Le patrimoine d’expériences et d’idées autogestionnaires est essentielle pour subvertir la subordination médiatico-électorale de la majorité sociale.
Les carences de la gauche à l’échelle européenne
La troisième raison tient à trente ans de déliquescence des partis de gauche à l’échelle européenne. Il nous faut inverser la tendance !
Peut-il en 2025 ne pas y avoir une voie diplomatique européenne de gauche ? Le sort des peuples ukrainiens, palestiniens, libanais, syriens et iraniens ne peut être abandonné aux escalades meurtrières des régimes agresseurs et oppresseurs.
Frontex et les négociations avec les pays du pourtour méditerranéen pour refouler les migrants.es doivent être abandonnés. Les partis de gauche qui ont assumé et contribué à mettre au point la politique d’Europe forteresse doivent être confrontés au bilan de leur action de trente ans.
Une nouvelle alliance des gauches européennes doit se construire. Elle doit nous sortir de l’immobilisme gouvernemental devant la violation des droits humains et du droit international. Cet immobilisme qui n’a su ni anticiper, ni répondre aux agresseurs russes et israéliens.
Ces mêmes partis gouvernementaux de gauche – plus ou moins roses, plus ou moins verts – sont depuis trente ans dépourvus de tout volontarisme. Quand des sites sont restructurés ou fermés, les savoir-faire des collectifs de travail impactés n’ont pas été pris en compte pour réorienter le tissu industriel européen vers la valorisation d’usages collectifs.
Pourtant, il y avait et il y a nécessité d’être audacieux dans le déploiement des transports en commun et des habitats partagés. C’est l’alternative au consumérisme sans limites du pavillon et de la multimotorisation. Le tissu urbain historique du continent et ses équilibres ville / campagne, aussi gravement abimés sont-ils, constituent de vrais leviers pour remettre l’humain au cœur de la fabrique de la ville.
Faire creuset d’une gauche d’opposition
Les gauches « responsables » – à un moment de relative « bonne santé économique » – ont décidé de faire jeu égal avec le populisme des Berlusconi et Chirac.
N’est-ce pas à compter de ce moment qu’elles ont abandonné le rôle de gauche d’opposition ?
En l’absence d’opposition, l’atlantisme aveugle des électrices et électeurs de droite, combiné au renouveau des pratiques patrimoniales rentières, les a fait converger irrésistiblement avec les extrêmes droites nationalistes et liberticides.
Effet de conjoncture ? Lame de fond ?
Laissons la réponse en suspens. Développons les pratiques et les convergences de gauche d’opposition. Reconstituons un front contre les orientations des droites continentales et britanniques.
Soyons sûrs : elles continueront à se radicaliser. Le fond de l’air n’est ni brun ni bleu aujourd’hui, la confrontation est à dix ou quinze ans, donc commençons sans attendre à cette échelle européenne.
Et la primaire de gauche ?
Les quatre du cartel NFP considèrent, chacun dans son couloir, que 2027 est acquis aux droites et à l’extrême-droite. Une mobilisation pré-électorale de type primaire des citoyen·nes de gauche peut-elle défier ces pronostics ?
Plusieurs parmi nous en sont convaincu·es. Sur notre site, Jean-Claude Mamet développe un argumentaire charpenté dans cette direction2Primaire ou pluralisme ?. Le débat est devant nous.
Assumer l’échéance de la citoyenneté locale
Mais d’ores et déjà, face aux droites en pleine radicalisation, il nous faut faire front uni, dès maintenant, pour mars 2026. La crise de la démocratie qui limite l’intervention citoyenne au temps de l’isoloir est irréversible. C’est à nous de faire vivre une citoyenneté ouverte et active dès à présent.
L’aspiration à l’union – c’est-à-dire à ne pas exclure (tel parti) ni à ne minorer aucun positionnement à gauche (citoyen, associatif, syndical) – peut faire « bouger les lignes ».
L’importante mobilisation électorale derrière les droites et l’extrême-droite justifie un nouveau dispositif électoral à gauche. Il faudra présenter une seule liste de gauche dans toutes les communes en mars 2026, en préfiguration d’une seule candidature à la prochaine élection présidentielle et dans les 577 circonscriptions législatives.
Pour compléter, vous pouvez lire sur notre site :
Notes
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