Le début du quinquennat de François Hollande avait été marqué par « l’opération César », vaste opération policière visant à vider de ses occupants la Zone à Aménagement Différé (ZAD) de Notre-Dame-des-Landes° devenue alors une Zone A Défendre. Cette première phase d’affrontement avait permis de stopper net les projets de destruction du bocage et des terres agricoles devant lancer la construction de l’aéroport par Vinci. Autour de la ZAD se sont agrégées différentes composantes de la lutte, qui ont appris au fil des ans à agir ensemble dans le respect de la diversité des tactiques et des pratiques de chacun, soutenus par 200 collectifs à travers tout le pays.
Tous et toutes à Notre-Dame-des Landes le 8 octobre
Mais pour Manuel Valls, que valent quelques paysans, quelques utopistes debout, quelques tritons dorés ou autres espèces rares et une biodiversité d’une richesse incroyable face au respect de l’ordre public ? Lors de la consultation organisée au mois de juin, si 55 % des électeurs de Loire-Atlantique ont approuvé le projet d’aéroport, les habitant-e-s des communes directement impactées l’ont rejeté massivement, le oui devenant majoritaire surtout grâce aux votants de communes plus éloignées pouvant espérer quelques retombées économiques grâce à l’aéroport. Malgré ce revers, les opposants au projet ne désarment pas. Lors du rassemblent des 9 et 10 juillet derniers, 25000 personnes ont redit leur refus du bétonnage et ont débattu des suites à donner à la lutte. Le prochain rendez-vous massif aura lieu le 8 octobre. L’appel « Que résonnent les chants de nos bâtons ! » invite à faire « résonner le sol de milliers de bâtons. Nous les laisserons sur place, en nous engageant ensemble à venir les reprendre, en cas d’intervention, et à défendre la ZAD, ses habitant.es, paysan.nes et l’avenir qui s’y construit. » Il s’agira une nouvelle fois de démontrer au pouvoir que la défense de Notre-Dame-des-Landes et la ZAD n’est pas le simple fait de quelques irréductibles anticapitalistes mais bénéficie d’un large soutien, et signifier au gouvernement que s’il envisage une épreuve de force dans les semaines à venir, nous serons là !
La folie des grandeurs commerciales
Si Notre-Dame-des-Landes focalise l’attention par les résistances que suscite le projet d’aéroport et l’acharnement de l’Etat à l’imposer, d’autres grands projets inutiles et imposés avancent. Au nord de la région parisienne, dans le triangle de Gonesse, le projet Europacity, un mégacentre commercial (le plus grand d’Europe), conduit à des aberrations tout aussi énormes qu’en Loire-Atlantique : 250 000 m² de commerces et 150 000 m² destinés aux loisirs dans une zone où l’on compte déjà dix centres commerciaux dans un rayon de 5 km. Pour cela, la destruction de 80 hectares de terres agricoles ne pose pas de problème aux bétonneurs qui s’appuient sur la crise sociale et le chômage de masse pour vendre aux populations leur projet au nom de la création d’emplois. Auchan, qui est à l’origine du projet, promet 21 000 emplois, additionnant les emplois liés au chantier et ceux devant être créés après l’ouverture. Ce qu’Auchan ne dit pas, c’est que ce type de projets détruit des emplois, dans les centres commerciaux environnants ou les commerces de proximité. Par ailleurs, dans le secteur du commerce, la précarité est galopante et les recrutements risquent d’exclure une grande partie de la population qui vit dans la banlieue nord. Au-delà des problèmes environnementaux et sociaux, c’est un modèle de société que propose Auchan, mêlant consommation de masse et offres culturelles, où finalement la culture ne devient qu’une marchandise comme une autre. Quant au sport, les consommateurs ne seront pas déçus puisqu’ils pourront faire du ski sur une piste indoor ! La folie des grandeurs dont on pouvait se moquer à propos du Quatar ou des Emirats Arabes Unis arrive désormais en France. Comme le souligne le Collectif pour le Triangle de Gonesse (CTPG), on a là tous les ingrédients d’un « cocktail de nuisances pour les usagers et les riverains ». Le débat public sur Europacity a donné l’occasion au CTPG de faire entendre sa voix ; reste maintenant à transformer cette étape en mobilisations dans les semaines et les mois à venir.
Actualités des luttes antinucléaires
Malgré le marasme que connait l’industrie nucléaire, les projets d’enfouissement des déchets et de lancement de nouveaux réacteurs se poursuivent. En juillet dernier, les opposants au projet Cigeo d’enfouissement des déchets dans la Meuse avaient été expulsés de la forêt de Mandres-en-Barrois, un des lieux que défriche l’Agence Nationale pour la Gestion des Déchets Radioactifs (ANDRA) pour mener ses travaux exploratoires. Une manifestation de réoccupation de la forêt s’en était suivie, suivie d’escarmouches entre les occupants et les forces de l’ordre soutenus par les vigiles de l’ANDRA. Le 1er août, le tribunal administratif de Bar-Le-Duc a ordonné l’arrêt du défrichement et la remise en état des parcelles concernées. Aussitôt, une nouvelle manifestation a été organisée, lors de laquelle les manifestants ont détruit le mur construit par l’ANDRA pour protéger ses travaux. Première victoire qui redonne des perspectives aux mobilisations antinucléaires dans la Meuse. Dans l’ouest français cette fois, à Flamanville, la contestation du lancement du réacteur EPR se poursuit. Ce réacteur de troisième génération, censé être plus sûr que les précédents concentre des problèmes déjà rencontrés, tant concernant la sécurité que son coût et les retards pris par le chantier. Le Collectif AntiNucléaire Ouest et la Fédération antinucléaire de Bretagne appellent à une grande manifestation les 1er et 2 octobre prochains, d’abord pour l’arrêt du chantier de l’EPR mais plus largement pour l’arrêt immédiat des centrales de plus de trente ans et la sortie du nucléaire.
Les grands projets inutiles comme l’industrie nucléaire sont des symboles d’un système où la démesure, la prise de risques inconsidérés, le mépris des populations comme de l’environnement priment sur le bien-être collectif et la préservation des écosystèmes. Il est temps d’en finir avec tous ces projets et d’inventer d’autres mondes, dont les germes sont à trouver dans les mobilisations qui émaillent cette rentrée 2016.
Vincent Gay