Rappel :
le sommet de la Terre, à Rio-de-Janeiro en 1992, a créé trois conventions :
– la convention sur la diversité biologique,
– la convention des Nations-Unies sur la lutte contre la diversification,
– la convention-cadre des Nations-Unies sur le changement climatique (CCNUCC, plus connue sous son acronyme anglais UNFCCC).
La convention sur le changement climatique est entrée en vigueur en 1994 et elle regroupe aujourd’hui 195 états. Son instance principale en sont les COP « Conférences of Parties » qui réunissent tous les ans, en décembre, les chefs d’états et de gouvernements et les représentants des différents pays ainsi que les « major groups » qui regroupent les ONG, syndicats, entreprises et collectivités locales.
En 1997, le protocole de Kyoto est élaboré par la convention cadre et sera ratifié par de nombreux pays, mais sans les Etats-Unis. L’accord de Kyoto s’est appuyé sur les conclusion du GIEC, le groupe international des experts du climat, un organisme crée en 1988 par le G7 sous l’égide du programme des Nations-Unies sur l’environnement et l’Organisation Météorologique Mondiale, Margaret Thatcher et Ronald Reagan ayant insisté pour inclure l’OMM dans la création du GIEC pour ne pas laisser trop de pouvoir à une agence de l’ONU.
Le protocole de Kyoto était un accord contraignant, et il s’est appuyé sur un principe fondamental de la convention cadre, celui des « responsabilités communes mais différenciées » des différents pays face au changement climatique. Ce principe prend en compte la responsabilité particulière des pays industrialisés dans l’usage des énergies fossiles et en fait découler des obligations spécifiques en terme de réduction des gaz à effet de serre et de financement des coûts d’adaptation des pays en développement au changement climatique et des coûts de la transition vers des modèles énergétiques basées sur les énergies renouvelables.
L’échec de Copenhague et la modification des règles du jeu par la CCNUCC
Le protocole de Kyoto prévoyait différentes périodes d’engagement, la première se terminant en 2012, et la conférence de Copenhague, la COP15, en décembre 2009, devait aboutir à un accord général, incluant les non-signataires du protocole de Kyoto, dont les Etats-Unis d’Amérique.
L’échec de Copenhague a conduit la CCNUCC a rediscuter ses objectifs et, à Durban, pendant la COP17 en décembre 2011 une nouvelle approche a été entamée. Celle-ci peut se résumer ainsi :
– le principe d’un « fond vert » pour les pays en développement a été décidé, mais sans que les mécanismes de financement ne soient précisés, ce qui laisse dans le flou la promesse prise à Copenhague de trouver 100 milliards de dollars par an à compter de 2020,
– pour obtenir un accord général, incluant les non-signataires de Kyoto et les pays en développement, les engagements de réduction des émissions des gaz à effet de serre se feront de manière volontaire et déconnectées des négociations durant les COP par ce que le jargon de la CCNUCC appelle les INDC (Intended Nationally Determined Contributions),
– l’accord général a été renvoyé à plus tard – cela doit être le but de la conférence de Paris – sans que ne soient encore précisé le caractère cet accord, protocole contraignant, comme le revendiquent la plupart des pays du sud, ou un texte ne nécessitant pas de ratification comme l’exigent les Etats-Unis…
Des engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre très loin des recommandations du GIEC
Fin juillet 2015, 49 pays – dont la plus part des principaux émetteurs – ont présenté leurs engagements. Pour 2030 l’addition de ces engagements montrent déjà, avant même que l’on connaisse ceux des autres pays, une augmentation globale de 15 % des émissions de gaz à effet de serre, alors que le GIEC préconise une baisse de 20 % dès 2030. Au lieu de l’augmentation de 2°, considéré par le GIEC comme le maximum possible avant d’entrer dans des scénario incontrôlables, le monde se dirige vers plus de 3°, voir 4° !
C’est là le problème principal de ces négociations : les éléments de loin les plus importants ne font pas partie des discussions, les engagements publiés durant l’année 2015 ne seront pas « négociables » durant la COP ce qui vide celle-ci de l’essentiel de son intérêt et montre à quel point le mécanisme choisi est vicié dès le départ.
Un accord à minima toujours non trouvé
Ce qui reste à négocier peut donc sembler accessoire. Il s’agira de se mettre d’accord sur le rythme des sommets importants, où le compte des engagements sera fait à nouveau, sur le caractère définitif ou non de ceux-ci (sera-t-il possible de revenir sur ses engagements, en pire bien entendu) et sur les mécanismes de vérification de la véracité de ces déclarations. Il s’agira aussi, et surtout, de préciser les mécanismes d’aide financières, un des points les plus discutés lors des différentes sessions intermédiaires de négociations de la CCNUCC. Plusieurs questions sont sur la table : la demande des pays en développement d’inclure un chapitre sur les pertes et dommages subis lors des catastrophes climatiques, comme le typhon qui a dévasté les Philippines il y a deux ans ; l’origine des sommes promises par les pays les plus riches, dons réels, prêts, réorientation de l’aide au développement, contributions du secteur privé… tout cela reste plus que flou, les pays riches ne voulant pas s’engager sur des promesses chiffrées de don. C’est là un point de blocage avec les pays en développement auquel s’ajoute une autre difficulté, interne à ces pays. Si, en 1997, quand le protocole de Kyoto a été élaboré, la distinction entre pays industrialisés – Europe de l’Ouest, Amérique du Nord et Japon – et pays en développement allait de soi, la montée en puissance des pays émergents, Chine, Brésil, etc. change la donne et amène à une différenciation interne aux pays du Sud qui crée de nouvelles divisions et de nouveaux débats.
Les « fausses solutions » à l’honneur…
Dans ce contexte, les entreprises multinationales et les gouvernements qui les soutiennent avancent les « solutions techniques » qui pourraient résoudre la crise climatique. Le gouvernement français met en avant l’énergie nucléaire ; les industries pétrolières et gazières le stockage du carbone dans les gisements qu’ils ont ou sont en train d’exploiter ; d’autres enfin la biologie synthétique, l’ensemencement des océans et autres utopies technologiques…
Ces « solutions », dénoncées par toutes les ONG et mouvements environnementalistes, sont utopiques, dangereuses et ont toutes comme conséquence de repousser toutes les mesures réellement efficaces !
Une autre logique
C’est, au contraire, une toute autre logique qui est nécessaire.
Tout d’abord en dénonçant et en mettant sous contrôle les entreprises multinationales – à commencer par les secteurs extractivistes – qui sont les principaux émetteurs de gaz à effet de serre.
Ensuite en concluant un accord international contraignant qui fixe des objectifs de réduction des émission de gaz à effet de serre en phase avec les recommandations du GIEC, accord qui doit inclure une aide massive aux pays en développement pour leur permettre de s’adapter au changement climatique et de changer leur modèle énergétique.
Cela veut dire jeter les bases d’un autre modèle de développement, basé sur les énergies renouvelables, un autre modèle agricole privilégiant les circuits courts, un urbanisme soutenable et le développement des transports en communs…
Ce sont ces exigences qui seront au coeur des mobilisations qui accompagneront la COP21, le sommet sur le climat qui se tiendra à Paris en décembre 2015.
Christophe Aguiton.