Etat des lieux politique après le premier référendum de novembre 2018
Le résultat a relancé la perspective d’un vote favorable à l’indépendance au 2ème référendum du 6 septembre 2020. Le chiffre de 43,3% du oui à l’indépendance de 2018 montre que non seulement la mobilisation des jeunes kanak a participé de cette avancée, mais aussi de nombre d’océaniens et d’une minorité de natifs caldoches qui ont voté oui car « se vivent plus calédoniens que français ». Ils représentent les 10% de plus que les annonces de sondages précédant l’élection. La reproduction de ce résultat aux élections provinciales de mai 2019 avec 43,6% a confirmé ce mouvement en faveur de l’indépendance.
Ce paradoxe de la défaite du non comme victoire et du oui comme défaite a un double effet politique :
1- La remobilisation des partis « loyalistes », anti-indépendantistes, tente de dépasser ses divisions en se rassemblant aux provinciales de 2019 dans un Front qui va jusqu’au Rassemblement National1 : L’Avenir en confiance. Ce front, en rupture avec Calédonie Ensemble qui prônait une nouvelle citoyenneté commune avec la France et a été battu à ces élections, a été rejoint par deux nouveaux partis : Génération-NC, à tonalité écologiste « loyaliste », Eveil Océanien, représentant d’une petite bourgeoisie commerçante et d’artisans issue de Wallis-Futuna et de Tahiti. La base de ce front loyaliste est le développement de la colonisation de peuplement. La campagne agressive, raciste et mensongère2 qu’il mène pour le Non au deuxième référendum, après avoir demandé son annulation, laisse ouverte, en cas de victoire du Oui, une possible partition de la province Sud, dominée électoralement par les loyalistes (2/3 de la population et 65% des richesses), avec celles du Nord et des îles Loyauté. Les effets de cette campagne de haine et d’affrontement colonial tendent à installer un climat de tension et de peur identitaire, largement perceptible dans la population au quotidien3. Son action récente s’est centrée, à nouveau, sur celui de l’inscription sur la liste électorale spéciale référendaire4 prévu par les accords de Nouméa (1998). Son but est de transformer la décision « exceptionnelle » de réduire le temps de présence sur le territoire de 10 à 3 ans pour s’inscrire sur la liste spéciale référendaire, par le comité des signataires d’organisation du premier référendum de 2018, pour la rendre pérenne. Or, « l’exceptionnalité » n’a pas été reprise par le dernier comité des signataires qui prépare le deuxième référendum (septembre 2019), car les organisations indépendantistes demandant légitimement l’application pleine et entière des accords Matignon et de Nouméa. Calédonie Ensemble qui a été l’incitateur et porteur d’un projet de loi qui pérennise les 3 ans pour tous les natifs européens a donc été rejoint par la droite calédonienne pour mener une campagne outrancière. Ce projet de loi présenté par l’UDI a été rejeté par l’Assemblée nationale le 31 janvier 2020 conformément au souhait du gouvernement français.
Cette prise de position de la majorité parlementaire, marque la volonté de la Présidence Macron de sortir du colonialisme classique, en continuant la « décolonisation douce » des accords de 1988 et 1998 et la négociation avec les indépendantistes, qui vise à maintenir la présence économique et militaire française en Nouvelle-Calédonie. Ce choix du capitalisme français de traiter la question du nickel et de l’espace maritime comme enjeu de ses entreprises dans la mondialisation néolibérale, est donc une continuité stratégique de domination par la négociation. Ce constat soulève au moins trois questions à traiter : suppose-t-il l’émergence d’une bourgeoisie nationale en alliance avec l’Etat français ? L’accès à une Kanaky souveraine sur le plan institutionnel est-il seulement réductible au seul nationalisme pour négocier avec les impératifs de l’économie néolibérale mondialisée ? Que devient le S socialiste du FLNKS comme projet de société indépendante ?
2- Ce paradoxe du non qui s’ouvre à une possible victoire du mouvement indépendantiste le 6 septembre 2020, met concrètement en débat quelle société indépendante, débat qui traverse toutes ses composantes : avec la France, en partenariat d’emblée ou en négociation après la victoire du oui ? Ce débat sur quelle souveraineté commence dès la constitution de listes unitaires ou pas aux prochaines municipales de mars. L’enjeu unitaire est de rassembler, dès les municipales, les votants d’un oui à venir. Cette position rassemble toutes les organisations du FLNKS, comme front uni pour l’application intégrale des accords Matignon et de Nouméa. Elle appelle les kanak qui n’ont pas voté au premier référendum à s’inscrire sur la liste spéciale référendaire (20000 kanak non-inscrits), tous ceux relevant du droit coutumier devant normalement être inscrits d’office. Cette position a été réaffirmée par l’AG du FLNKS des 11 et 12janvier 2020,  qui a rassemblé l’UC, le PALIKA, le RDO et l’UPM, rejoints par Dynamik Unitaire Sud (DUS) le LKS et le Mouvement des océaniens indépendantistes (MOI)5. Son but est de lancer sa campagne référendaire, de faire des municipales un moment unitaire qui prépare au référendum. L’AG du PALIKA des 24-25 janvier le confirme « Les élections municipales doivent servir de tremplin pour préparer une victoire du Oui à la plaine souveraineté le 6 septembre. Nous en sommes arrivés à un point où le détachement du lien de subordination avec la France est quasiment irréversible », mais il ne participe pas toujours à des listes uniques6. Ce qui constitue un facteur de division est cependant la suite « Nous sommes dans un processus négocié, donc nous devons parler avec l’Etat. Depuis 2013, nous nous sommes positionnés en faveur de la souveraineté en partenariat »7. Cette définition « en partenariat », traverse les débats de L’UC et de l’ensemble du FLNKS : souveraineté en partenariat ou souveraineté acquise qui décide d’un partenariat ? Le PALIKA pense la souveraineté en rééquilibrage économique à partir de la gestion de la Province Nord et de l’usine de nickel : Koniembo. Il privilégie la gestion du minier, richesse coutumière du lien à la terre à usage, comme moteur de développement économique en partenariat avec la France. L’UC privilégie la souveraineté institutionnelle d’emblée, pour préserver les richesses naturelles et une agriculture de subsistance dans une société démocratique à construire. C’est l’accès à l’indépendance qui détermine de nouveaux rapports avec la France. Dans ce débat, le Parti Travailliste en lien avec l’USTKE défend une souveraineté kanak et des exploités comme projet social. Il participe ou pas aux listes uniques des municipales, mais reporte sa prise de position à l’après-municipales pour l’appel au vote du 6 septembre. Son débat interne est celui de l’échec de son appel à la non-participation au premier référendum qui n’a pas été suivi par une large part de ses adhérents8.
3- Le programme du vote indépendantiste est donc en construction. L’appel au vote unitaire concerne tous les kanak qui n’ont pas voté au premier référendum, que ce soit par non inscription ou par inquiétude sur la suite. Ce non-vote se retrouve dans les résultats du premier référendum, où 76,3% d’électeurs se sont exprimés dans les provinces indépendantistes, alors que le chiffre était de 81,7% dans la province sud loyaliste. Les rencontres quotidiennes avec nombre de ces kanak fait apparaître une crainte du retour de la violence des années 80, mais aussi un scepticisme lié aux divisions du mouvement indépendantiste, avec l’idée de ne pas « être prêt pour l’indépendance ». Ce constat ne se limite donc pas aux seuls effets de la tradition orale où la décision ne passe par l’écrit. Les listes uniques aux municipales peuvent permettre de dépasser cet « abstentionnisme ».
Le résultat du premier référendum a fait également apparaître un vote de non-kanak pour l’indépendance (environ 10%), qui concerne les océaniens mais aussi une minorité de caldoches, d’européens et d’asiatiques critiques de la gestion actuelle du territoire. Le programme du FLNKS n’appelle donc pas au seul vote des mélanésiens car il appelle à voter indépendantiste tous les natifs qui sont les « victimes de l’histoire » de la colonisation (déportés et transportés, déplacés de la répression dans d’autres colonies puis de travailleurs forcés issus de ces colonies, qui ont fait souche) ou ceux qui se sont établis comme projet de vie meilleure. Cette position, opposée au vote des seuls kanak et exploités, qui a pu être défendue par le PALIKA, le Parti travailliste ou le syndicat USTKE, tend aujourd’hui à être commune. Ainsi, le mouvement des jeunes de l’USTKE appelle à la lutte tous les jeunes quelle que soit leur origine9.
4- Un des acteurs de ce débat est la création du Sénat coutumier par les accords de Nouméa. Sa charte met en oeuvre juridiquement la fin de l’indigénat en 1946. Il est nécessaire de rappeler que dans la colonisation de peuplement en Nouvelle-Calédonie, le statut d’indigénat a été particulier par rapport aux autres colonies françaises : le colonisateur a créé un territoire kanak d’exclusion appelé tribu dirigé par la création d’un chef, puis de districts qui les rassemblent avec un grand chef. Ce système colonial a visé à fabriquer un statut du colonisé sans droits citoyens et sans liberté de circulation10 comme mode de domination. La création du Sénat coutumier est donc une victoire du mouvement indépendantiste, qui obtient la reconnaissance pleine et entière du lien à la terre de la culture kanak et océanienne par la Loi organique de 1999. En effet, l’article 13 de la Loi, au chapitre 1, précise que « toute personne ayant eu le statut civil coutumier et qui, pour quelque cause que ce soit, a le statut de droit commun, peut renoncer à ce statut au profit du statut civil coutumier ». Tous ceux qui relèvent de ce statut sont à inscrire d’office sur les listes spéciales. Le Sénat Coutumier juge des litiges du foncier et de la récupération des terres spoliées par la colonisation, mais aussi de la protection écologique de la terre coutumière. Aujourd’hui, Le Sénat coutumier revendique d’intervenir dans tous les domaines sur les territoires coutumiers. Cette revendication ne peut que faire débat car il soulève la question de la non-participation des femmes au Sénat et au droit coutumier local, mais aussi des rapports avec les syndicats et autres institutions démocratiques souveraines. Enfin, sa position affirmée en faveur de l’indépendance a ses propres opposants « loyalistes » à la France.
Le recensement de la population de 2019
Cet état des lieux politique de la Nouvelle Calédonie, colonie de peuplement, est à analyser avec les chiffres du dernier recensement de la population calédonienne, paru en janvier 2020 : 171 411 présents sur le territoire. Ce chiffre montre une augmentation faible de la population depuis 2016 (+3000) et une stabilisation de la colonisation de peuplement qui est en réalité une décrue. En effet, il correspond à une plus faible arrivée de nouveaux « métros » et un départ accru vers la métropole d’européens ayant vécu et travaillé une partie de leur vie en Nouvelle-Calédonie. Le bilan de ces 5 dernières années indique un solde migratoire négatif de 9900 personnes depuis 5ans, donc de personnes qui s’éloignent face « aux inconnus » de la perspective d’indépendance. Ce mouvement se traduit en grande partie par un déplacement de l’épargne vers l’assurance-vie ou des investissements immobiliers en métropole ou dans d’autres pays11. Il serait cependant à comparer avec les investissements des entreprises qui investissent en Nouvelle Calédonie dans les autres secteurs que l’immobilier, pour parler de « fuite des capitaux ».
Cependant, ce recensement reste à analyser en termes d’évolution de la population kanak. Si elle a connue un taux de naissance faible à la fin du 19èmesiècle et le début du 20ème, en lien avec les violences de la colonisation, des études des années 1950 montrent que le peuple kanak était en nombre à égalité avec la colonisation européenne à cette période. L’essor de la colonisation de peuplement en lien avec l’exploitation minière du nickel et des services l’accompagnant indique qu’il est devenu depuis minoritaire dans son pays, le chiffre avancé étant de 39%. En effet les estimations actuelles du recensement Insee, Atlas Calédonien, les kanak seraient 110000 et les non-kanak 161407. 40% e la population kanak vit dans la région de Nouméa.
La question sociale sera-t-elle déterminante le 6 septembre ?
Les chiffres de l’aggravation des inégalités sociales sont accablants : 57000 personnes vivent sous le seuil de pauvreté et 23 000 sont à la recherche d’un emploi sont le signal d’alerte12. Ce qui est à souligner est que ces chiffres se réfèrent à toutes origines ethniques confondues. Si les kanak et les océaniens en constituent la principale population, la population caldoche est également touchée de façon significative dans sa différence de classe. Ensemble, ils tendent à former la population paupérisée dans les zones urbanisées. Cependant, ces chiffres ne prennent en compte que de façon limitée les kanak qui vivent dans les espaces coutumiers agricoles et de pêche, qui sont souvent hors des circuits de l’aide sociale et de l’emploi.
Cette paupérisation est à analyser avec l’existence, en Nouvelle-Calédonie, d’une classe ouvrière minière née de l’exploitation coloniale et capitaliste du nickel et avec le développement d’un salariat de services et dans le commerce. Si les services et ceux de la fonction publique emploient d’abord des « métros » formés en France, cet accès à l’emploi reste relatif pour les natifs caldoches et très limitée pour les natifs kanak et océaniens. Dans la région de Nouméa qui rassemble les 2/3 de la vie économique, les kanak restent les derniers embauchés et se retrouvent parqués dans des emplois délaissés par les caldoches et les métros. Seules les provinces indépendantistes sont aujourd’hui une réelle source d’emplois pour les kanak ayant accédé à une réelle scolarité complète. La revendication syndicale de l’USTKE « priorité à l’emploi local », met en perspective une sortie de cette exclusion pour les kanak et océaniens, mais aussi des couches populaires caldoches. Il est donc un enjeu politique des programmes indépendantistes aux municipales vers la société indépendante  construire..
Le salariat des entreprises du nickel est à l’origine de création des principaux syndicats13 qui animent des luttes en Nouvelle-Calédonie. Actuellement, il mène des grèves nombreuses face aux restructurations14 et à une nouvelle organisation du travail de 147 heures de travail mensuel et du travail de dimanche obligatoire. Ces luttes participent politiquement de la défense du patrimoine minier coutumier qui est au cœur de la revendication indépendantiste et du débat entre l’UC et le PALIKA sur son usage : accord pour préserver le nickel de forte teneur mais divergence sur l’exportation du nickel de plus faible teneur. Le PALIKA qui domine dans la Province Nord soutient ces exportations pour équilibrer le financement de l’usine du Nord de Koniambo, l’UC s’y oppose pour garder la souveraineté sur tout le nickel calédonien.
Les syndicats se développent aujourd’hui dans les services marchands et dans la fonction publique territoriale avec FO-NC. Avec ceux du nickel ils sont donc un acteur global de la lutte contre les inégalités sociales. S’ils se réfèrent à la défense de la nature comme droit coutumier, c’est sans autre référence à l’histoire des luttes15 d’occupation des terres des années 80. Cependant, ils rencontrent une mobilisation large d’un mouvement réel d’« écologie populaire » de défense de la nature et des sites du lagon. Un mouvement de multiples associations de protection mobilise de façon souvent infra-politique des jeunes de toute origine avec des bases différentes qui vont du bénévolat de nettoyage des sites pollués, de la défense de la nature dans les tribus en tant que droit coutumier mais aussi de start-up à visée d’emplois à créer liés à l’écologie. Cette question rejoint celle du développement de l’agriculture de subsistance. Si elle reste une activité traditionnelle en « brousse », elle demeure peu valorisée par une bourgeoisie caldoche qui s’enrichit dans l’import-export. Face à cette réalité, le FLNKS avec ce mouvement écologiste prônent le développement d’une réelle agriculture de subsistance.
Quelle société indépendante à construire avec le S socialiste du FLNKS ?
Le Front de libération national kanak et socialiste lutte depuis sa fondation dans une perspective indépendantiste. Si le résultat du premier référendum marque l’ancrage de l’idée d’indépendance dans le pays, qu’en est-il de la transition en cas de victoire du oui ? Je l’ai décrit précédemment comme un débat sur la notion de partenariat avec la France, mais qu’en est-il du projet démocratique et socialiste dans la transition?
1- Nous retrouvons comme première entrée de ce débat, l’essor de la mobilisation de jeunes kanak et océaniens en faveur d’une souveraineté immédiate. Son effet est de radicaliser la perspective institutionnelle. Cette radicalité bouscule les anciens indépendantistes dans toutes les organisations et, en particulier, ceux qui dirigent les Provinces Nord et des îles Loyauté et sont souvent maires de communes. Cette radicalité est clairement reliée à la lutte contre les inégalités sociales dans l’accès à l’emploi, en particulier chez les 40% de kanak qui vivent dans la banlieue de Nouméa. L’accès à l’emploi d’un ou d’une jeune est souvent inatteignable quand on est noir de peau. Il en résulte un nombre de jeunes kanak laissés pour compte, dont une partie se retrouve à la rue et dans les divers trafics de toxiques. Ces jeunes en errance sont le symptôme de cette exclusion raciale et non sa cause. Ce symptôme est le produit direct des inégalités sociales et de l’échec scolaire dans l’apprentissage, en particulier du français langue écrite, pour eux langue seconde. En recherche d’avenir dans une société marchande, ils subissent brutalement une forme d’acculturation qui associe la rupture avec le droit coutumier sans être reconnu dans cette autre société. Le refuge dans l’idéologie consommatrice de l’occident passe alors par la transgression et nombre d’actes délinquants. Cet état des lieux est un des enjeux central de la transition, l’indépendance acquise.
2- La deuxième entrée dans la pleine souveraineté d’emblée, reposent sur les revendications d’une classe ouvrière minière du Nickel, du Cobalt et d’autres terres rares, qui sont les seuls emplois proposés aux natifs kanak et exploités16. Elle est déterminée par la de lutte contre l’exploitation capitaliste, qui s’étend à toutes les sphères de l’emploi marchand et des services associés. Le caractère socialiste de la revendication part d’une perspective d’acquisition de droits sociaux, de formation et d’éducation, sans que l’institutionnel soit encore clairement élaboré17.
3- La troisième est quelle économie agricole écologique de subsistance qui mette fin à la domination de quelques familles caldoches de l’import-export. Ce sont elles qui tirent les prix vers le haut et la vie chère. Le produire local en est un enjeu qui remet en causes les « enclosures » liées à l’accaparement des terres, et pose la nécessité d’un retour au coutumier communal comme action d’auto-organisation démocratique. Cette remarque nécessiterait d’être élaborée pour l’activité de la pêche.
4- Enfin, quel statut libéré pour les femmes qui sont les véritables organisatrices collectives des tribus et de la famille, mais non reconnues comme présence dans le conseil coutumier. Elles subissent les violences conjugales, 1200 plaintes enregistrées et 119 en sont mortes en 2018.
L’ensemble de ces questions participe du débat et des décisions des organisations indépendantistes sur les contenus démocratiques et socialistes, pour dégager les tâches de transition d’une souveraineté indépendante à acquérir et à élaborer dans une future constitution. Or, la souveraineté va se confronter, dès la victoire du oui, au départ de cadres qui viennent le plus souvent de France. Cette réalité, qui a déjà commencé pose clairement la nécessité de penser, dès maintenant, la présence de nouveaux cadres formateurs dans la transition. Cette question suppose des accords de coopération internationale multiples. Ce sont ces accords qui feront un partenariat après acquisition de la souveraineté, pour éviter de prolonger structurellement la dépendance à l’ex-colonisateur.
Notre soutien au mouvement indépendantiste de Kanaky, commence ou prolonge dès maintenant le soutien aux référendums pour l’indépendance et à celui de ses listes uniques pour les municipales. Une la victoire du oui le 6 septembre va ouvrir une transition qui appelle notre engagement et une présence internationaliste de longue durée.
Jean-Pierre Martin
1 Le Rassemblement National a fait 70% des voix sur la ville de Nouméa aux élections présidentielles de 2017
2 La voix de la Kanaky n°15 de septembre-Octobre 2019, p.4, démonte les contre-vérités  de Mme Backès, présidente de l’Avenir en confiance. Entre autres, elle prétend que la double nationalité n’existe dans aucun pays qui a accédé à l’indépendance, ce qui est déjà faux dans le droit français : 5% des français sont binationaux ; un traitement inacceptable entre calédoniens car racistes du côté des indépendantistes, alors que pour les natifs autres il faut bien passer par l’examen de la question, qui est clairement traité par la Loi organique n°99-209 est censée l’appliquer ; le transfert de compétence de cette loi organique serait facultatif, alors qu’elle décide « au cours du second et troisième mandat du Congrès, les compétences seront transférées (Art. 3.1.2) ce qui concerne de façon obligatoire en particulier l’enseignement de façon obligatoire qui ne s’est appliquée jusqu’à maintenant qu’au primaire, du fait des manœuvres du camp loyaliste pour ne pas l’appliquer au secondaire.
3 Un lapsus éclairant ce climat est celui d’un présentateur des informations de la chaine 1 calédonienne, le 26 janvier, qui, bien qu’immédiatement corrigé, parle de la province noire et non de la province Nord.
4 Les accords de Matignon et de Nouméa ont créé une dérogation spéciale pour la Nouvelle Calédonie, qui concerne la création de deux listes spécifiques pour les élections provinciales et référendaires. Pour s’y inscrire il est nécessaire d’être déjà inscrit sur la liste générale qui est celle de la République française. Ainsi elle s’applique pour les prochaines municipales mais aussi pour les législatives et les présidentielles.
5 UC (Union Calédonienne), PALIKA (Parti de libération kanak),  RDO (Rassemblement démocratique océanien), UPM (Union  progressiste en Mélanésie, LKS (Ligue kanak socialiste). PALIKA et UPM forment un front électoral dans la province Nord : l’UNI (Union nationale pour l’indépendance)
6 Ainsi à Nouméa, par exemple, pour l’instant le PALIKA ne fait pas liste commune avec l’Union Calédonienne.
7 Les deux citations sont de Charles Washetine, porte parole du PALIKA, dans les Nouvelles Calédoniennes du 31 janvier 2020)
8 L’analyse des positions de fondation du Parti travailliste, est abordée in Jean-Pierre Martin, Une colonie de peuplement, revue Contre-temps n°42. Son projet politique de transformation sociale par des luttes radicales s’oppose à ce qu’il caractérise de trahison, du FLNKS qui signe les accords Matignon.
9 Appel paru dans La voix de la Kanaky n°16 de Novembre-Décembre 2019.
10 Isabelle Merle et Adrian Muckle, L’indigénat. Genèse dans l’empire français. Pratiques en Nouvelle-Calédonie. Paris, 2019, CNRS éditions.
11 Les Nouvelles Calédoniennes, Gros plan : De plus en plus de fuite de capitaux quittent le caillou,  n°14756 du 9 février 2020.
12 La Voix de Kanaky, Editorial. Novembre-décembre 2019, n°16
13 USOENC (Union syndicale des ouvriers et employés de Nouvelle-Calédonie), USTKE (Union syndicale des travailleurs kanak et exploités), CSTNC (Confédération syndicale des travailleurs de Nouvelle-Calédonie)
14 La crise du nickel liée à des cours mondiaux qui montent et descendent selon les spéculations financières sur les matières premières, et rendent fluctuantes sa rentabilité pour ses financeurs en capital. Ainsi,   Vale-NC branche du sinistre Vale brésilien,  se retire de sa participation de 95%, avec une centaine de licenciements prévisibles. Le plan dit de sauvetage ferme la raffinerie du Sud pour se recentrer sur l’exportation du nickel de faible valeur : le saprolite, et se concentre sur un produit intermédiaire le NHC (nickel hydroxyde cake) qui alimente  le nouveau marché des voitures électriques.
15 Ces mouvements n’ont pas de continuité avec l’expérience des occupations de terre des années 80 en lien avec La Campessina, car ces terres ont été en grande partie récupérée par les kanak avec l’application des accords Matignon et de Nouméa successifs.
16 Portés comme axe central de l’indépendance par l’USTKE et le Parti travailliste
17 Nous avons vu que l’échec scolaire est un problème plurilinguistique à traiter à partir des langues orales d’ origine, donc sans accès à une réelle scolarisation et formation.