Notre camarade Marie-Claude fait part de l’initiative récente prise par la LDH, à Caen. La section locale a interpelé la presse locale d’information. Elle s’appuie sur le constat qu’il faut combattre, dans la presse dite d’information, non seulement la diffusion des idées d’extrême droite, mais même toute complaisance vis-à-vis d’elles.

Lettre ouverte à la presse locale du Calvados

Par Marie-Claude Herboux, le 6 juillet 2024

La section LDH de Caen avait organisé une réunion autour du texte de la résolution du dernier congrès.

Très vite s’est posée la question de ce qui pouvait être fait en dehors des appels de soutien aux manifestations intersyndicales contre l’extrême droite.
Un débat s’est engagé sur la place de la presse dans la montée de l’extrême droite.

Il est apparu assez vite qu’il ne suffisait pas de s’en prendre à la presse bollorisée mais qu’il fallait aussi combattre la diffusion – ou la complaisance vis-à-vis – des idées d’extrême droite dans la presse dite d’information.

Comment combattre cette contamination des idées d’extrême droite ?

Sur la question des migrants, des sans-papiers, s’est créé un consensus mou pour dire qu’il y a un problème. Ce consensus mou permet la normalisation des idées d’extrême droite, y compris celles qui sont contradictoires avec les principes de la constitution et des droits fondamentaux.

Nous avons décidé donc d’une lettre ouverte aux journalistes et à la presse en nous appuyant sur la décision du Conseil d’État qui devrait s’imposer. Il paraît important de mettre comme enjeu la liberté de la presse et la liberté d’informer

Après des contacts avec des syndicats locaux de journalistes et quelques professionnels, nous avons envoyé cette proposition d’atelier dont le contenu exact reste à préciser.

Un second envoi sera fait après le 2ᵉ tour et des contacts seront pris pendant l’été pour une réunion début septembre de lancement de cette initiative.

Nous sommes dans une région où la presse locale (dominée par Ouest-France) est loin d’être la pire, ce qui rend possible d’engager le débat avec les journalistes.

Lettre ouverte pour une presse libre et indépendante de toute information tendancieuse

Il est devenu courant dans certains grands médias de qualifier tantôt le Nouveau Front Populaire, tantôt la seule France Insoumise (décrétée par ceux-ci comme force dominante du NRP) d’extrême gauche : il s’agit en cela de reprendre les discours du Rassemblement National, mais aussi celui du Gouvernement.

Pour mémoire, par une requête du 18 septembre, le Rassemblement National exigeait l’annulation d’une circulaire du ministère de l’Intérieur les classant à l’extrême droite. Accessoirement, il demandait que le PCF et la France Insoumise soient classés, eux, dans l’extrême gauche et non dans la gauche.

Or, par une décision du 11 mars 2024, la réponse du Conseil d’État était claire : le RN doit être classé à l’extrême droite : « la circulaire attaquée [n’est entachée d’aucune] erreur manifeste d’appréciation. Elle ne méconnaît pas […] le principe d’égalité en procédant à un tel rattachement, tout en attribuant la nuance  » Gauche  » aux formations politiques  » Parti communiste français  » et  » La France insoumise. »

On peut comprendre cette propagande de la part des médias bollorisés et des autres médias d’opinion : ils reprennent les thématiques de leur courant politique, ils peuvent fournir comme une information des allégations partisanes, fausses, mensongères et trompeuses.

Mais pour ce qui est des médias d’information généralistes, la Ligue des Droits de l’Homme tient à souligner – dans la droite ligne de la position du Conseil d’État – que tout amalgame du type les deux extrêmes entre la gauche incarnée par le Nouveau Front populaire et l’extrême droite, est une atteinte aux lois du débat démocratique.

On ne peut impunément falsifier les contenus réels des programmes présentés, des valeurs incarnées, de l’histoire de ces deux courants politiques, sans mettre en péril la compréhension et donc le choix électoral des citoyennes et des citoyens de ce pays et sans affecter la sincérité du scrutin du fait d’une information.

Le crédit d’une presse respectueuse de ses propres règles déontologiques est finalement en jeu.

Nous demandons donc aux journalistes de soutenir et de répercuter dans toute la mesure possible de leurs marges de manœuvre cette décision de la plus haute juridiction administrative et à ne plus employer le terme « extrême gauche » à l’égard du Nouveau Front Populaire.

S’associer à une telle information partisane, tendancieuse, voire fausse et trompeuse, est de nature à contribuer à discréditer la presse auprès de citoyens, alors qu’une presse d’information libre, indépendante et précise, est une composante essentielle de la vie démocratique.

Pour la Ligue des Droits de l’Homme, tout projet en faveur d’une société démocratique, sociale et écologique ainsi que de l’effectivité de tous les droits pour toutes et tous, passe par des garanties sur le bien fondé d’une information libre et sur la liberté d’informer.

Afin de contribuer au débat citoyen sur ces questions, la LDH décide de mettre en place un atelier « Information presse et Démocratie » ouvert à toutes les citoyennes et tous les citoyens, y compris les journalistes qui partagent ces préoccupations.