La police a arrêté, ces jours-ci, des militant·es écologistes, notamment à Notre-Dame-des-Landes, au motif qu’ils ou elles avaient participé, le 10 décembre 2022 , à une action organisée par les Soulèvements de la terre sur le site de la cimenterie Lafarge de Bouc-Bel-Air.

Par : Christophe BatardyHistorien et militant d’ENSEMBLE! – Le 22 juin 2023

Il s’agissait pour ce mouvement, en détruisant du matériel, de dénoncer « la pollution atmosphérique considérable » engendrée par les fours de la cimenterie. Le décret de dissolution de ce mouvement a été pris le 21 juin, au Conseil des ministres.

Le 23 mars 2023, à la sortie de l’ENS rue d’Ulm, alors qu’un cortège d’étudiant·es et de membres du personnel (dont moi-même, militant FSU) se dirigeait vers le Panthéon pour rejoindre la manifestation contre la réforme des retraites, un groupe casqué s’est attaqué violemment à celles et ceux qui portaient la banderole, afin de la leur arracher.

L’un des assaillants arborait la croix celtique sur son casque, signe de son appartenance idéologique au GUD. Il menait ses troupes par des gestes qui ont lancé l’assaut puis le repli. Quelques jours plus tard, cette action a été revendiquée dans un communiqué par un groupe appelé « Waffen Assas ».

Les mêmes s’en sont pris également le lendemain à des étudiant·es sur le centre Cassin, les poursuivant dans les rues et les frappant avec des barres de fer.

Signe des temps, ce 23 mars, chacun·e a spontanément pensé que le groupe qui s’avançait vers le cortège était constitué d’agents de la BAC. Cela démontre, si cela était encore nécessaire, l’inquiétude de tout·e manifestant·e, qui se sent légitimement exposé·e à la violence des policiers en civil. Le sujet mériterait qu’on s’y attarde, mais il n’est pas l’objet de ce billet.

Revenons donc à ce groupe d’assaillants, bien décidé à « nettoyer » la Montagne Sainte-Geneviève de tout·e militant·e jugé·e trop rouge.

Cette violence n’est pas isolée, elle s’inscrit depuis plusieurs mois dans un déchaînement des actions de l’extrême droite, de groupes nazis (comment appeler autrement une organisation qui se nomme elle-même « WAFEN ASSAS »), qui, de Metz à Saint-Brevin-les-Pins en passant par Paris, traquent du gauchiste, du rouge, du chanteur satanique, et s’en prennent aux locaux de la LDH ou à ceux d’associations LGBT+.

Qui s’est en offusqué en Macronie ? Que disent à ce propos ceux-là mêmes qui sont pourtant si prompts à dénoncer tout bruit de casserole ? Qui a demandé la dissolution de ce groupe ?

En 2023, les Soulèvements de la terre sont donc jugés plus dangereux qu’un groupe nazi, autorisé de fait à surgir dans les rues de Paris en meute et à massacrer d’autres personnes pour des raisons idéologiques, sans être inquiété. Personne n’est venu interpeller un membre des Wafen Assas.

Mais, il est vrai que le zemmouriste ou le nazi n’a jamais pris ses quartiers d’été à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, laissant cela à celles et ceux qu’il qualifie de racaille, de fainéant, d’assisté. À Paris, le militant d’extrême droite de bonne famille qui se tape du rouge peut rentrer chez lui tranquille. Il loge plutôt dans les beaux quartiers. En revanche, le militant CFDT qui inscrit des slogans sur le sol peut être convoqué au commissariat.

Emmanuel Macron considère qu’il ne faut pas pratiquer « d’écologie punitive », c’est-à-dire ne pas imposer de contrainte malgré la catastrophe climatique que nous subissons. Il exècre tant ce type d’écologie (à moins que ça ne soit l’écologie tout court) qu’il mobilise la police afin d’annihiler toute remise en cause du système capitaliste dont Lafarge est un des porte-drapeaux, tout comme l’étaient les porteurs du projet de bassine à Sainte-Soline.

Le pouvoir écoute plus la FNSEA que la confédération paysanne, plus l’agroalimentaire que le paysan.

Mais, cela n’est pas nouveau. Toute action militante écologiste est jugée par le pouvoir en général, et le pouvoir macroniste en particulier, comme dangereuse.

Souvenons-nous avec quelle promptitude le mouvement de celles et ceux qui tentaient d’éteindre les publicités la nuit a été étouffé.

En France, l’écologiste est devenu l’équivalent du communiste des années 1930, celui qui subissait des filatures dans la rue, dont on écoutait les conversations au téléphone, dont le courrier était mis de côté à la poste pour être lu par les officiers de police.

Le pouvoir va demander la dissolution des Soulèvements de la terre, mais pas celle des Wafen Assas. Il n’y a pas plus de « en même temps » en Macronie !


Pour compléter, le communiqué unitaire qui revient sur ce qui s’est passé rue d’Ulm :

Deux infos parues sur Twitter

Notre communiqué sur la dissolution des Soulèvements de la Terre :