Il y a trois semaines, Rémi Fraisse a été tué par une des grenades offensives lancées massivement par des gendarmes sur des militant-e-s écologistes à Sivens sur le chantier du barrage du Testet.

Dernièrement, les exactions policières se sont multipliées dans une impunité totale. Malheureusement, les morts aux mains de la police sont un fait récurrent et banalisé de l’actualité française. Bien que la répression policière – ce qui inclut la violence mortelle – soit un outil assurant l’ordre capitaliste contre ses opposants, cette violence s’abat au quotidien avant tout sur les jeunes de banlieue.

Or, force est de constater que l’État se sent désormais menacé par les mobilisations écologistes, mobilisations que les médias n’ont pas tardé à qualifier « d’extrémistes » voire de « terroristes », en inversant l’origine de la violence.

Face à cela, de nombreuses manifestations et rassemblements se sont organisés en France. Ces événements rendaient hommage à Rémi Fraisse mais prônaient surtout l’arrêt des violences policières qui représentent l’unique réponse donnée par le gouvernement aux mobilisations sociales contre les grands projets inutiles (Notre-Dame des Landes, barrage du Testet…).

Cependant, face à cette tension sociale s’amplifiant dans tout le pays, le gouvernement a décidé d’utiliser la même stratégie mortifère que pour la mobilisation de cet été en soutien au peuple palestinien massacré à Gaza. Il a interdit un bon nombre de manifestations prétextant les risques de débordements. À nouveau, la liberté d’expression et le droit de manifester ont été bafoués par un gouvernement en perte phénoménale de légitimité.

Parallèlement à cela, Yéro, un lycéen, s’est vu imposer une obligation de quitter le territoire alors qu’il est scolarisé au lycée Voltaire. Ca vous rappelle quelque chose ? L’année dernière, Leonarda et Katchik étaient dans la même situation…

Alors que la tension atteint un nouveau stade, la mobilisation lycéenne entre en jeu pour exiger la fin des violences policières et l’arrêt des expulsions de lycéen-ne-s. Sur ces mots d’ordre, plus d’une trentaine d’établissements sont spontanément mobilisés ou bloqués le jeudi 6 novembre. Une manifestation s’organise à partir de Nation, réunissant environ 4000 participant-e-s.

Le lendemain, la mobilisation est plus calme, malgré une AG lycéenne appelant la veille à continuer le mouvement. Une partie des lycéen-ne-s a rejoint la manifestation contre les violences policières du 9 novembre dont le mouvement Ensemble a été co-organisateur.

Les organisations politiques et syndicales de jeunesse ne se rencontrent que le lundi soir pour voir ce qu’il est possible de faire pour soutenir le mouvement et contribuer à son amplification.

Cependant, une énorme méfiance vis-à-vis de celles-ci mène à des quiproquos. Les partisans de l’autogestion du mouvement, qui prévalait au départ, craignent que les organisations viennent imposer leurs propres cadres de mobilisation.

Une manifestation le jeudi 13 novembre est appelée par l’AG lycéenne et est déposée à la préfecture. Cette manifestation portera un coup très dur à une mobilisation déjà fragile.

En effet, la manifestation, bien moins fournie que la semaine précédente, se compose à moitié de lycéen-ne-s, et à moitié de militants autonomes. La FidL, ignorant l’accord de mettre en place un service d’ordre (SO) collectif, paie à la place une société privée de sécurité, sans réfléchir aux conséquences politiques et matérielles. À cause du décalage entre une mobilisation autogérée et un SO extérieur imposé de manière autoritaire, les tensions augmentent entre ces salariés et les militants autonomes, menant à des scènes de violences sans contenu politique. Dès lors, les lycéen-ne-s se voient dépossédés de leur mouvement.

Le fait que les lycéen-ne-s soient intéressés et mobilisés montre que la jeunesse est préoccupée par l’évolution que prend la société. Cependant, force est de constater que, depuis 2010, les mobilisations lycéennes n’ont été que des explosions ponctuelles et localisées, sans pouvoir s’enraciner dans la durée, donc sans réellement de poids politique ni de victoires.

Du reste, un parallèle est évidemment à faire à ce titre avec l’ensemble du mouvement social, qui a durement été touché par sa défaite de la réforme des retraites en 2010, et qui peine aujourd’hui encore à s’en relever. D’un côté, il faut trouver le moyen d’associer la spontanéité des mobilisé-e-s à une organisation efficace de la mobilisation. De l’autre, afin d’amplifier la lutte, il faut veiller à tout prix à l’appropriation démocratique par les mobilisé-e-s, quel que soit leur niveau de mobilisation ou de formation politique. Ainsi, le contenu politique s’imposera sur le pur « mouvementisme ».

Comité Ensemble Jeune Paris