Ukraine une guerre de libération nationale. Aspects militaires et politiques

Ces contributions, revues et augmentées, ont servi d’introduction à un débat sur l’Ukraine au Collectif national d’ENSEMBLE! des 1er et 2 avril. Deux parties : 1re partie « Retour sur un an de guerre d’agression » et 2e partie « Controverses à gauche et solidarité ». Ces textes ont été élaborés et présentés par Stefan BEKIER et Jean-Paul BRUCKERT (membres de la Commission Internationale d’ENSEMBLE!).

Partie 2. Controverses à gauche et solidarité
La résistance – donnée essentielle de la situation

Je dirai d’abord que c’est cette résistance armée et non armée qui reste toujours, depuis un an, la donnée essentielle de la situation. C’est cette résistance qui a poussé, et pousse toujours, les gouvernements occidentaux à fournir à l’Ukraine l’aide militaire, financière et humanitaire que les autorités ukrainiennes n’arrêtent pas de demander avec autant d’insistance, et à juste titre.
Mais personne ne sait comment cette guerre peut évoluer. Il n’y a que des hypothèses, des conjectures :

  • Le président Zelensky annonce depuis plusieurs semaines qu’avec la livraison de nouvelles armes les plus modernes que l’armée ukrainienne attend avec impatience, l’Ukraine pourrait réussir à refouler les troupes de Poutine hors de l’Ukraine encore au cours de cette année ;
  • Cette hypothèse serait renforcée par des informations de plus en plus nombreuses sur l’état de délabrement, de désorganisation et de démoralisation des armées russes, malgré les centaines de milliers de jeunes recrues non ou mal formés que Poutine envoie tous les jours à la mort dans le Donbass, notamment à Bakhmout ;
  • Mais les prévisions les plus fréquentes parlent plutôt d’une guerre qui va durer, suivant les lignes de front actuelles sans que la Russie de Poutine réussisse à vaincre la résistance ukrainienne, et sans que l’Ukraine réussisse à libérer tout son territoire.

Mais indépendamment de la façon dont va évoluer cette guerre terrible, tous les secteurs de la gauche syndicale, politique et associative, qui organisent la solidarité militante avec la résistance du peuple ukrainien doivent redoubler leurs efforts et étendre encore plus la campagne internationale pour la défense du droit de l’Ukraine à la liberté, à l’indépendance, à une paix juste et durable. Je pense notamment au RESU, et à d’autres réseaux solidaires de l’Ukraine.

Banderole : Troupes russes hors d'Ukraine

Banderole du « Collectif 69 de soutien à l’Ukraine » – Crédit photo : Armand Creus

Une « paix » sans le retrait des troupes de Poutine ?

On constate que plus l’Ukraine et sa résistance avancent, plus la Russie essuie des échecs militaires, et plus des appels se multiplient à gauche pour un cessez le feu et des négociations, au nom de la Paix. Mais sans poser aucune condition, et surtout sans poser la principale des exigences, la principale des revendications : le retrait des troupes russes de l’Ukraine !

Le point commun de ces divers appels c’est que, tout en disant qu’ils soutiennent l’Ukraine et qu’ils condamnent Poutine, ils proposent en même temps, ouvertement ou implicitement, que l’Ukraine accepte finalement d’abandonner une partie de son territoire, donc le Donbass et la Crimée. Dans le meilleur des cas, ils appellent au retour à la situation d’il y a un an à la veille du 24 février 2022, jour de l’invasion russe à grande échelle, ce qui équivaudrait à abandonner au Kremlin « seulement » la moitié du Donbass plus la Crimée.

Un autre point commun : aucun de ces appels ne mentionne même pas le Plan de paix en 10 points du président Zelensky que l’Ukraine ne cesse de mettre en avant ces derniers mois. Il a été présenté en octobre déjà, à la réunion du G20. Les gouvernements occidentaux commencent à peine à en parler, mais très discrètement. Par contre, à gauche, en Russie et dans les pays du Sud ce plan est totalement passé sous silence. Pourtant, il est tout à fait raisonnable et digne d’être soutenu.

Divers appels à gauche

Quelques mots donc au sujet de ces appels, juste à titre d’exemple, car il est impossible ici de les citer et commenter tous.

C’est d’abord la tribune, publiée dans Le Monde en février sous le titre « Nous appelons à redoubler d’efforts diplomatiques pour établir un cessez-le-feu » [Article réservé aux abonnés], signée par les présidents d’Argentine et de Colombie, un ministre de Podemos, la responsable du Bloc de gauche portugais, Jeremy Corbin du Labour Party et Mélenchon.
Rien sur l’Ukraine et les Ukrainiens. Rien sur le retrait des troupes russes. On dit que c’est une invasion de l’Ukraine par la Russie, mais tout le texte met les deux dos à dos, sur le même plan. Pas la moindre critique de la Russie. Rien. Tout le texte est orienté contre les Américains. Dans ce cadre, la principale proposition du texte de « redoubler des efforts diplomatiques pour établir un cessez-le-feu » ne peut qu’aller dans le sens de ce que revendique Poutine.

Deux paragraphes de généralités climatiques, énergétiques, transition verte, planète, redistribution de ressources, etc., qui s’adressent visiblement aux gouvernements d’Amérique Latine, d’Afrique et d’Asie.

Le texte s’adresse aussi aux mouvements anti-guerres « qui ont toujours montré la voie ». Mais visiblement pas dans le cas de L’Ukraine, pour défendre et soutenir la résistance du peuple ukrainien contre l’impérialisme russe. Cette mention s’adresse visiblement aux divers Mouvements de la Paix.

Un autre appel a été publié en Allemagne : le Manifeste pour la Paix lancé en février également par la médiatique Sara Vagenknecht, députée de Die Linke, et Alice Schwarzer, écrivaine de gauche et militante féministe paraît-il très connue. Sara Vagenknecht dirige dans Die Linke une aile radicale quand aux questions sociales. Mais en même temps elle est le porte-parole depuis des années de toutes les positions du Kremlin concernant les questions internationales et de coopération économique. Leur Manifeste a recueilli des centaines de milliers de signatures en quelques jours, et a débouché, à la date anniversaire du 25 février, sur une grande manifestation devant la Porte de Brandebourg à Berlin, à laquelle ont participé des secteurs de la gauche, mais aussi de l’extrême droite.

Le texte appelle à l’arrêt des livraisons des armes à l’Ukraine, accuse le président Zelensky de pousser à l’escalade, condamne sa volonté de « vaincre la Russie », car tout cela ne peut mener qu’à une « troisième guerre mondiale », qui ne peut être que nucléaire. Il dit que l’Ukraine ne peut pas gagner une guerre contre « la plus grande puissance nucléaire du monde », et qu’il faut donc un cessez-le-feu tout de suite et passer aux négociations pour « faire des compromis des deux côtés ».

En clair, cela équivaut à négocier les termes d’une partition de l’Ukraine avec les armées russes occupant un quart du territoire. Le texte ajoute que c’est pour éviter les dommages éventuels au peuple allemand. Et tant pis donc pour l’Ukraine.

Ajoutons que cette campagne de Sara Vagenknecht est soutenue avec enthousiasme en France par le site Informations Ouvrières des lambertistes du POI.

Également d’Allemagne est venue une tribune du philosophe Jürgen Habermas, publiée dans Le Monde en février toujours, sous le titre « Plaidoyer pour des négociations de paix » [Article réservé aux abonnés]. Dans sa récente contribution du 10 mars dernier « Questions d’actualité à propos de la guerre en Ukraine », publiée sur notre site, l’Équipe d’animation de notre Commission internationale commente largement cet appel de Habermas, et d’autres, et dit entre autres ceci :

« Habermas ne conteste pas la légitimité des intérêts ukrainiens, mais en vient à poser que l’Ouest (l’Europe, l’Occident) a des intérêts qui dépassent les seuls intérêts ukrainiens (1).
Au nom de quoi Habermas (comme beaucoup d’autres sans doute) s’autorise à fixer les termes du compromis qui mettra un terme à la guerre : « Une solution de compromis qui ne permette pas à la partie russe d’obtenir un gain territorial par rapport à la situation du début du conflit, mais lui permette de sauver la face« . C’est-à-dire un retrait des forces russes jusqu’à la ligne existante avant février 2022 (en fait déjà une ligne de guerre depuis 2014), donc d’occupation de la Crimée et d’une partie du Donbass (2). On voit qu’un tel « compromis » devrait être imposé à la « partie ukrainienne », laquelle ne saurait le juger comme condition d’une « paix juste et durable » ! »

Il y a encore un autre appel paru récemment dans Le Monde du 20 mars, qui mériterait également une discussion sérieuse, mais que je me borne juste à signaler ici, parce que je n’ai pas eu le temps encore de l’analyser. Signé par un collectif de près de 300 universitaires, chercheurs et humanitaires, dont Edgar Morin, Rony Brauman et Xavier Emmanuelli, sa thèse principale est « N’ayons pas la naïveté et l’imprudence de croire que les armes suffiront à apporter la solution, renforçons la diplomatie ! » [Article réservé aux abonnés]. Je dirai seulement, à ce stade, que leur texte semble autrement plus profond, pose des questions très légitimes et mérite donc une discussion sérieuse. Ceci, bien qu’il se réclame en passant du texte de Jürgen Habermas, dont on vient de parler, et de son idée d’un « compromis supportable » que ce dernier propose (c’est-à-dire une fois encore l’abandon par l’Ukraine de la Crimée et de la partie du Donbass occupée depuis 2014).

Un autre texte circule depuis février, « Oser la Paix ! », lancé par le Mouvement de la Paix et certains secteurs du PCF, les plus pro-Kremlin. Plusieurs centaines de signatures recueillies en février, la plupart de membres du PCF. Ce texte « Oser la paix » devrait s’appeler plutôt « Oser Poutine » ou « Oser le soutien à la guerre de Poutine sous le masque du pacifisme ».
En effet, tous les éléments essentiels de la propagande anti-ukrainienne du Kremlin sont repris dans ce texte, bien sûr avec des formulations plus facilement digestibles pour les militant·es de base du PCF. Quelques exemples dans le désordre :

  • on diabolise une Russie criminelle, dans le seul but d’écraser la Russie,
  • la Russie dispose d’un territoire immense qu’il est difficile historiquement de mettre en cause,
  • on passe sous silence les actions des néonazis ukrainiens et des fascistes présents dans l’armée et les rouages de l’Etat,
  • l’Ukraine n’est pas une démocratie,
  • et ainsi de suite.

Il faut qu’on démonte point par point ces arguments, qui répètent les pires mensonges et calomnies de Poutine, surtout en pensant aux militants du PCF et de la CGT qui pourraient être abusés par ce genre de propagande.

Par contre, il y a certains secteurs du PCF et de la CGT, qui véhiculent une partie de cette propagande, mais avec lesquels il faudrait discuter, sans concessions mais fraternellement. En tous cas il faut essayer. Je pense notamment aux dirigeants syndicaux radicaux, respectés dans les mobilisations actuelles contre la réforme des retraites, comme p. ex. Olivier Mateux de la CGT des Bouches du Rhône. Je suis bien conscient de la difficulté, vu que la CGT 13 a adhéré même à la FSM inféodée à Moscou et à Téhéran (où se trouve son siège), et qui colporte la propagande poutinienne sur les Ukrainiens comme quoi ce sont des « nazis ». Olivier Mateux ne va pas jusqu’à là, mais met sur le même plan le président Zelensky et Poutine en tant que deux ennemis des travailleurs, et Zelensky comme une simple marionnette de l’OTAN. On peut écouter son entretien chez Bourdin dans Sud Radio à partir de 5:15. Mais il faudrait demander leur avis aux camarades des Bouches du Rhône et des secteurs de la CGT qui sont solidaires de la résistance ukrainienne.

Quelques mots très rapidement sur la tribune de Clémentine Autain dans JDD du 24 février, sous un titre qui tranche positivement avec les positions habituelles de LFI « Pour que Poutine abandonne sa guerre en Ukraine ». Citons quelques passages.

(…) « Vladimir Poutine porte l’entière responsabilité du massacre du peuple ukrainien et de toutes les victimes qu’il enrôle dans sa folie. Notre solidarité doit être claire, volontaire, déterminée envers les Ukrainiens qui doivent pouvoir disposer d’eux-mêmes. » (…)

« J’aimerais qu’à gauche, même s’il y a des divergences d’approche sur les questions internationales, même si nous sommes très concentrés sur le bras de fer engagé sur les retraites, nous soyons capables de faire davantage entendre notre soutien. » (…)

« Le débat démocratique, quasiment introuvable au Parlement depuis le début du conflit, mériterait d’être davantage déployé. » (…)

« L’appel à la négociation entre la Russie et l’Ukraine, qu’il m’est moi-même arrivé de brandir comme par réflexe, est à première vue séduisante. Mais ayons conscience que, depuis la guerre de Crimée en 1856, aucune guerre n’a été arrêtée par des négociations entre les deux parties qui s’affrontent. Et surtout, imagine-t-on sincèrement un face-à-face diplomatique entre Vladimir Poutine et Volodymyr Zelenski ? C’est à mon sens plutôt du côté d’une régulation globale, d’un règlement opéré par la communauté internationale qu’il faut porter nos efforts. Faire abandonner sa guerre à Poutine, voilà l’objectif. Pour y parvenir, nous devons aider les Ukrainiens à tenir le choc militairement et parallèlement, faire monter la pression internationale. » (…)

C’est un texte très positif, malgré quelques éléments d’analyse qu’il faudrait discuter plus à fond, mais dont je n’ai plus le temps de parler ici.

Un autre élément positif, du côté de LFI, fut la présence de la députée Rachel Garrido – sur demande de Mathilde Panot selon les médias – à la Marche pour l’Ukraine de République à Bastille le 25 février.

Soutien résistance ukrainienne

Soutien à la résistance ukrainienne

Controverses autour de l’Holodomor

Quelques remarques encore concernant la résolution adoptée mardi 28 mars par Assemblée nationale concernant le Holodomor – la Grande Famine en Ukraine organisée par Staline en 1932-33 qui a fait de 4 à 6 millions de morts – la qualifiant de génocide. L’Équipe d’animation de la Commission internationale d’ENSEMBLE! est en train de préparer un texte de critique des postures du PCF et de LFI, que ces deux organisations ont adopté dans le débat sur cette résolution : le vote « contre » des députés du PCF et le refus de prendre part au vote par les députés de LFI. Je dirai seulement que c’est une nouvelle honte pour la gauche française concernant l’Ukraine, un manque de respect et une arrogance caractérisée à l’encontre du peuple ukrainien et de son histoire tragique pendant l’ère stalinienne. Quand on a des doutes, ce qui est légitime, on peut toujours s’abstenir, ou demander un vote séparé sur un mot ou un bout de phrase, au lieu de répéter, sous le prétexte fallacieux de respecter le droit international, des arguments anti-ukrainiens rabâchés depuis des années par le Kremlin.

Signalons que le Parlement européen avait discuté et adopté, le 15 décembre 2022, une résolution similaire intitulée « 90 ans après l’Holodomor : qualifier l’extermination par la faim de génocide ». Les cinq eurodéputé·es LFI au sein du groupe La Gauche – dont la co-présidente du groupe Manon Aubry – ont voté pour cette résolution. Au total, dix eurodéputé·es de La Gauche ont voté pour, six ont voté contre et six se sont abstenu·es.

La proposition de Pékin

Quelques mots encore sur le plan chinois du 24 février intitulé « Position de la Chine sur le règlement politique de la crise ukrainienne ».

Citons de nouveau la contribution de l’Équipe d’Animation :

« La Chine est une alliée de la Russie, tout en maintenant une prudente distance critique. Les 12 points du plan de la Chine pour « un règlement politique de la crise ukrainienne », bien naïf qui y verrait une offre équilibrée permettant d’avancer sur la voie de la paix. Il s’agit d’une opération diplomatique mêlant habileté et cynisme, sur le fond en parfaite conformité avec les intérêts de l’État chinois. Ainsi, par exemple, à côté du refus de l’utilisation des armes nucléaires, l’opposition à « toute sanction unilatérale, c’est-à-dire non autorisée par le Conseil de Sécurité des Nations unies » (où le régime chinois exerce son droit de veto), ou le souci d’assurer la « stabilité des chaînes industrielles et d’approvisionnement »). »

Rappelons les titres des douze points de ce document : 1 – Respecter la souveraineté de tous les pays, 2 – Renoncer à la mentalité de la guerre froide, 3 – Cesser les hostilités. Les conflits et guerres ne font de bien à personne, 4 – Lancer les pourparlers de paix, 5 – Régler la crise humanitaire, 6 – Protéger les civils et les prisonniers de guerre, 7 – Préserver la sécurité des centrales nucléaires, 8 – Réduire les risques stratégiques, 9 – Faciliter l’exportation des céréales, 10 – Mettre fin aux sanctions unilatérales, 11 – Assurer la stabilité des chaînes industrielles et d’approvisionnement, 12 – Promouvoir la reconstruction post-conflit.

Mais aucun appel dans ce texte, même le plus prudent, le plus voilé, à un retrait des troupes russes de l’Ukraine. Ni non plus à l’arrêt des bombardements massif des infrastructures civiles du pays. Rien sur le fait qu’il y a un agresseur et un agressé, l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Ceci dit, deux points – le 7e et le 8e – me semblent refléter une réelle position et inquiétude de Pékin. « La Chine s’oppose aux attaques armées contre les centrales nucléaires et autres installations nucléaires pacifiques… ». (…) « Les armes nucléaires ne doivent pas être utilisées et la guerre nucléaire ne doit pas être menée. »

Pékin essaie clairement de se poser en médiateur, guidé par ses intérêts propres de grande puissance. En même temps, on comprend tout à fait que le président Zelensky ait accueilli ce document chinois de manière prudemment positive, et essaye d’utiliser chaque possibilité, même la plus minime, pour faire avance la cause de l’Ukraine. Et même pourquoi pas essayer une tentative de médiation avec le concours de la Chine.

Mais de là à en faire LA solution à la guerre, LA base des négociations éventuelles, il y a un gouffre. Pourtant, c’est ce genre de propositions illusoires que suggère Francis Wurtz dans une chronique publiée dans l’Humanité du 5 mars intitulée « Qui a peur du plan de paix de la Chine » [Article réservé aux abonnés], de même que LFI par la voix de Bompard, porte-voix de Mélenchon, dans un entretien sur France Info le 21 mars (à partir de 22:20).

Renforcer, étendre la solidarité
logo réseau européen de solidarité avec l'Ukraine

Logo du réseau européen de solidarité avec l’Ukraine (RESU)

Pour terminer, quelques mots sur la campagne menée par le Réseau européen de solidarité avec l’Ukraine (RESU/ENSU), dont ENSEMBLE! fait partie depuis le début. Il faut dire que, bien qu’encore minoritaire au sein de la gauche européenne et française, la campagne de solidarité avec la résistance armée et non armée du peuple ukrainien s’étend de manière très nette.

Autour de la date d’anniversaire d’un an depuis l’invasion à grande échelle de l’Ukraine, les 24 et 25 février, des rassemblements, des manifestations et des meetings-débats se sont tenues dans plus d’une trentaine de villes en France, comme p. ex. à Lyon, Nantes, Aubenas, Besançon, Le Havre. A souligner le caractère unitaire des ces événements, avec la participation de nombreuses organisations politiques syndicales et associatives du mouvement social français, aux côtés d’associations ukrainiennes, syriennes, tchétchènes et géorgiennes.

Citons le communiqué du Comité français du RESU :

« À Paris, le comité français du RESU a organisé un meeting le 23 février à la Bourse du Travail de Paris avec une liaison directe avec Kyiv et en présence d’un syndicaliste ukrainien de la KVPU. Par le nombre des participant.es, par la diversité et la qualité des interventions, ce meeting a été un réel succès.

Le samedi 25 février, la manifestation, organisée à Paris conjointement par L’Union des Ukrainiens de France, le RESU et Pour l’Ukraine, Pour leur liberté et la nôtre, a réuni selon les différents media entre 5000 et 10000 personnes (LCI).  Ce qui, dans la situation sociale actuelle et au vu des errements d’une certaine gauche, constitue une réussite très encourageante.

Cette manifestation avec la présence d’un cortège ukrainien coloré et particulièrement fourni, de personnalité.es et d’élu.es et d’une forte participation du RESU et de l’Intersyndicale française pour l’Ukraine (CFDT, CGT, CGC, CFTC, UNSA, Solidaires, FSU) montre que la position résumée par la formule : « Pour une paix juste et durable, retrait des troupes russes de toute l’Ukraine » est largement partagée.

Place de la Bastille, de nombreux orateurs et oratrices ont condamné les crimes commis par les troupes de Poutine ou par les milices et les mercenaires à son service : crimes de guerre, viols et tortures, crimes contre l’humanité, enlèvements de milliers d’enfants. Toutes et tous ont insisté sur la nécessité de l’arrêt des bombardements et de l’invasion, sur le retour de tous les déporté.es et  sur l’aide effective à donner à l’armée et au peuple d’Ukraine.

La porte-parole du RESU, tout en rappelant notre position sur le soutien résolu à la résistance armée ou non armée et sur l’exigence du retrait des troupes de Poutine, a annoncé les différentes manifestations qui avaient lieu en province. »

Le réseau européen n’est plus uniquement européen, puisqu’il s’est pas mal étendu et collabore désormais avec des collectifs et organisations des Etats-Unis, des pays d’Amérique Latine, d’Asie, d’Afrique et d’Australie. En plus des réunions de travail par zoom tous les samedis, se tiennent des réunions mensuelles ouvertes à d’autres pays et organisations pour discuter des différentes formes de solidarité avec l’Ukraine.

J’attire l’attention, tout particulièrement, sur la campagne pour la libération de Maksym Butkevych, militant des droits de l’homme et antifasciste très connu en Ukraine et internationalement. Ayant pris les armes pour défendre son pays, comme de très nombreux syndicalistes et militants de gauche ukrainiens, il a été fait prisonnier en juin 2022. Il vient d’être condamné à 13 ans de prison à régime sévère par un tribunal fantoche de la tout aussi fantoche « république populaire de Louhansk », autoproclamée par les « séparatistes » paramilitaires russes dans le Donbass.

La propagande du Kremlin présente avec l’insistance l’antifasciste qu’est Maksym Butkevych comme étant un « nazi ». Visiblement, Poutine voudrait en faire un symbole justifiant son invasion de l’Ukraine, qui serait habitée et dirigée par des « nazis ». La campagne pour la libération de Maksym, et de tous les prisonniers de guerre et prisonniers politiques détenus dans les geôles du Kremlin, revêt donc une très grande importance pour démasquer l’imposture et le caractère pervers de cette propagande de l’impérialisme russe. Voir également ci-contre le communiqué du Comité français du RESU.

Libérez Maksim BUTKEVITCH

Libérez Maksim BUTKEVITCH

Pour cela, une autre proposition du RESU mérite également d’être mise en avant, à savoir le lancement d’une campagne de jumelages entre des villes ukrainiennes et françaises, à commencer par celles où il y a déjà des collectifs de solidarité avec l’Ukraine. Il faut qu’on invite les représentants de la société civile de ces villes pour des tournées d’information et de débats, afin de comprendre la réalité de cette guerre et de la résistance ukrainienne, et pour contrer la propagande mensongère de Poutine.

Le 2 mars 2023
Stefan Bekier (membre de la commission internationale d’ENSEMBLE!)


Communiqué du Comité français du Réseau européen de solidarité avec l’Ukraine (RESU)
Liberté pour Maksym Butkevych

Vendredi 10 mars, des médias russes ont annoncé que trois prisonniers de guerre ukrainiens, dont Maksym Butkevych, ont été « reconnus coupables » de crimes de guerre par les « cours suprêmes » des « Républiques populaires membres de la Fédération de Russie » de Donetsk et de Louhansk et condamnés à 13 ans pour Maksym, 18 et demi ans pour Vladislav Chel et 8 ans et demi pour Viktor Prokhozei. Ces « condamnations » en annoncent d’autres.

Maksym Butkevych est un prisonnier très célèbre, connu en Ukraine mais aussi internationalement depuis des années, comme défenseur des migrants – il avait collaboré avec le Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies (UNHCR) –, comme défenseur des droits humains, comme antifasciste. Il a coordonné la campagne européenne pour la défense des prisonniers de Crimée Oleg Sentsov et Alexandr Koltchenko, libérés en 2019 des prisons russes. Il est de longue date un activiste étudiant, puis de la société civile, en Ukraine, et défend des idées libertaires pour un monde sans domination ni oppression. C’est aussi un journaliste reconnu : il a fondé Hromadske Radio, collaboré avec BBC World Service et plusieurs chaînes ukrainiennes. Antimilitariste convaincu, il avait pourtant décidé de s’engager dans l’armée ukrainienne pour la défense du peuple et des civils, en mars 2022 et avait pris part à la libération de Boutcha.

Prisonnier depuis juin 2022, la propagande russe le présente comme un « nazi » et un « fasciste », des calomnies visant à préparer le « procès de Moscou » à Louhansk qui s’est tenu le 10 mars 2023. Il a été condamné accusé d’avoir tiré au lance-roquettes en visant des civils à Severodonetsk le 4 juin 2022. Selon 12 organisations ukrainiennes et bélarusses des défense des droits humains, Hromadske Radio et le centre des droits humains Zmina, son unité n’a jamais été déployée à Severodonetsk.

Cette accusation infâme vise à faire passer pour « nazi » un défenseur reconnu des droits humains en Ukraine comme en Russie. Comme l’indique Amnesty International, la vraie atteinte au « droit de la guerre » est l’absence de tout procès équitable envers les prisonniers de guerre. Et la condamnation à 13 ans dans les caves du régime de Louhansk, si elle est appliquée à Maksym et à ses codétenus, s’apparente à une condamnation à mort déguisée.

Le Comité français du Réseau européen de solidarité avec l’Ukraine (RESU) avait déjà lancé une campagne, à l’automne dernier, au cours de laquelle de nombreuses organisations démocratiques, politiques, associatives, syndicales, des élu•es et des personnalités avaient pris position pour exiger la libération de Maksym Buktevitch. Il faut que toutes ces structures et personnalités refassent entendre leur voix : il y a urgence ! La pression de l’opinion publique démocratique est indispensable pour sauver Maksym et les autres prisonniers condamnés par les tribunaux fantoches ou qui sont entre les mains de l’armée russe.

Ils peuvent être sauvés. Leur libération doit devenir le symbole de la cause de la vérité contre le « mensonge triomphant qui passe » (Jaurès), pour la vérité et la justice !

Liberté pour Maksym Butkevych
et pour les autres prisonniers et prisonnières de l’armée russe !

CONTACT : [email protected]


Vous pouvez trouver, sur notre site, l’appel : Liberté pour Maksym Butkevych !

Pour compléter, vous pouvez lire, entre autres, sur notre site :