« Nous faisons un seul choix : le rétablissement des finances publiques.», dit le ministre des Finances (Bruno Le Maire, Le Monde, le 6 mars 2024). Contredire le discours des « aristos » qui dirigent, est nécessaire, pour que personne n’hésite dans les prochaines phases de luttes et de mobilisations interprofessionnelles. Des objectifs pour unir (2).

Un horizon : austérité et injustices !

Par Pierre Cours-Salies, le 14 avril 2024.

« Nous faisons un seul choix : le rétablissement des finances publiques.», vient de déclarer le ministre des Finances1– Bruno Le Maire, Le Monde, le 6 mars. Il prend donc une première décision : annuler, par décret, 10 milliards d’euros de crédits budgétaires.

Il prétend toutefois viser l’équilibre à long terme de notre modèle social qui devrait être, selon lui, « davantage tourné vers l’activité que vers l’inactivité ».

Et, il envisage donc une réforme réduisant encore les ressources des chômeur·euses et des précaires !

Le Monde – qui est loin d’être le journal des syndicats – a critiqué cette mesure, le 29 mars, dans un éditorial : « Le lourd tribut imposé aux chômeurs ».

Une convergence notable avec la déclaration de Denis Gravouil, de la CGT, qui a bien résumé : « En quoi les chômeurs ont-ils joué un rôle dans la hausse du déficit que l’exécutif a été incapable de prévoir ? C’est la politique économique du gouvernement qui est en échec. » (Humanité, 28 mars).2Nouvelle réforme de l’assurance-chômage : « Réduire les droits des chômeurs n’a aucun effet sur l’emploi », explique Denis Gravouil, CGT

Sophie Binet a bien raison de baptiser Bruno Le Maire de « Bruno Thatcher »3 – Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT : « Le projet de réforme de l’assurance-chômage est d’une injustice totale » (Entretien au journal Le Monde, 3 avril), que le gouvernement cherche à « casser l’État social ».. Le gouvernement cherche effectivement à « casser l’État social » !

Il y a au moins un point positif. D’ores et déjà, il a ravivé l’unité intersyndicale sur une question brûlante : « il faut cesser la stigmatisation populiste des chômeurs »4« Il faut cesser la stigmatisation populiste des chômeurs » signé par les Secrétaires généraux de la CGT, de la CFDT, de FO et par les Présidents de la CFTC et de la CFE-CGC, Le Monde, 19 mars.

Un sondage récent – Elabe pour Les Echos et l’Institut Montaigne – 5Les Français doutent de l’efficacité du durcissement de l’Assurance… conforte leur prise de position.6– Selon ce sondage, le projet de réforme de l’assurance-chômage annoncé par Gabriel Attal ne suscite l’adhésion que d’une courte majorité des Français. En revanche, la taxation des plus aisé·es et des superprofits remporte une large adhésion, y compris dans l’électorat macroniste. Les Echos, le 4 avr. 2024

Des « réformes » successives

Jusqu’en 2021, les premières victimes des réformes de l’assurance-chômage étaient les travailleurs précaires, et notamment les jeunes qui mettent des années à trouver un emploi stable après leurs études. Le gouvernement s’en prend désormais à de nouvelles cibles.

Depuis le 1ᵉʳ février 2023, la durée maximale d’indemnisation a été réduite par décret de 25 % : les plus touchés sont les seniors, qui se retrouvent souvent à Pôle emploi après avoir perdu leur poste en CDI.

S’il y a des difficultés dans certains secteurs, comme les hôtels-cafés-restaurants, c’est lié aux conditions de rémunération. Prenons le cas des saisonniers : quand vous proposez à un travailleur de venir bosser au Smic dans une station balnéaire, et qu’il sait qu’il dépensera l’équivalent de son salaire en transport et logement sur place, comment voulez-vous qu’il accepte ?

Les Français partagés sur un nouveau durcissement de l’assurance-chômage

Les Français·es sont en réalité divisé·es sur la question, la réforme ne récoltant qu’un soutien mitigé de 52 % d’entre elles et eux (…) et encore moins dans les classes populaires. Les professions intermédiaires, les ouvrier·ères et les employé·es sont contre à 54 %

Pour résoudre notre problème d’endettement, les Français·es croient plus volontiers dans la nécessité de faire contribuer les plus aisé·es ou les entreprises qui en ont les moyens », souligne Vincent Thibault, directeur-conseil opinion chez Elabe.

Plus significatif encore, l’électorat de la majorité adhère à ces propositions dans les mêmes proportions (à respectivement 90 % et 71 %), alors que le gouvernement répète pourtant depuis des semaines y être opposé.

Voir sur notre site, cet article : « Un sondage ne fait pas le printemps…»

 

Pour faire accepter ses mesures, le Gouvernement utilise évidemment la vieille et classique recette : diviser !

Il annonce donc qu’il va maintenir « une baisse de la fiscalité de 2 milliards d’euros pour les classes moyennes ».

Il en profite pour s’appuyer sur les idées reçues de ceux qui se disent « je fais beaucoup d’efforts, je finance, par mon travail, un modèle qui permet parfois à certains de ne pas travailler. Or, si on travaillait tous, on n’aurait pas d’effort supplémentaire à me demander ».

Au passage, on voit défiler tous les dossiers qui sont sources d’inégalités : une réduction des crédits de la Culture, un renvoi de beaucoup de tâches aux collectivités locales, une réduction des dépenses liées aux soins remboursés à 100%, etc.

Des sphères gouvernementales se demandent même, s’il ne faudrait pas, de nouveau, une réforme des retraites.

Nous pouvons et devons éclairer les enjeux et montrer qu’il existe d’autres choix.

Cette démarche suppose un débat à l’Assemblée nationale qui n’aura pas lieu avant plusieurs mois. De fait, à tout renvoyer « au budget 2025 », le Premier ministre fixe un rendez-vous pour des revendications convergentes, complémentaires, à l’automne.

En attendant, ce qui nous manque cruellement, c’est une campagne unitaire des gauches contre les choix de société inégalitaires des droites et des extrêmes droites. C’est cela que nous devons impulser !

Notes