Le 27 avril dernier, à Paris, un collectif de citoyens, responsables associatifs et politiques issus de quartiers populaires franciliens a lancé l’Assemblée nationale des quartiers. Cette initiative est destinée à mieux peser dans le débat public. C’est une bonne nouvelle qui appelle des réactions !
Pour une assemblée nationale des quartiers
Par Pierre Cours-Salies, le 7 mai 2024
L’Assemblée des quartiers s’est tenue le samedi 27 avril, une tentative d’union pour enfin « peser » dans le débat public. Cette initiative annoncée dans Le Monde (17 avril) est vraiment une bonne nouvelle !
Une vraie diversité
Leur présentation est claire. « Cette fois-ci justement, ce qui fait notre force, c’est notre diversité : diversité d’opinions, de langages, de façons de faire… », estime Youcef Brakni, un des premiers signataires de l’Assemblée des quartiers.
Effectivement, participaient à l’initiative des personnalités représentatives de diverses approches qui existent au sein des quartiers. Et certaines manquaient encore à l’appel.
Mohamed Mechmache, pour sa part, a fait partie du Conseil présidentiel des villes, installé en 2018 par Emmanuel Macron. Il présidait encore récemment la commission sur la participation citoyenne des quartiers. Comme lui, certains dénoncent l’injustice sociale. Ils privilégient la concertation des habitant·es et n’ont jamais cessé de collaborer avec les institutions.
Youcef Brakni, quant à lui, dénonce les violences policières et le racisme d’État. Il fait partie des adeptes des opérations coup-de-poing – comme une manifestation, en juin 2020 devant le tribunal de Paris, qui avait rassemblé 20 000 personnes, selon la Préfecture de police de Paris – et construisent leur combat en opposition aux pouvoirs publics.
Salah Amokrane, enfin, est coordinateur général de l’association culturelle et d’éducation populaire Tactikollectif, à Toulouse. Avec d’autres, il mise sur la culture pour transmettre le patrimoine de l’immigration et croit à l’engagement politique.
Nous sommes loin des diverses OPA visant à traiter ces réseaux comme des porteurs de voix (au moment d’élections). Nul n’a oublié les fausses ouvertures qui ont répondu à l’initiative appelée « On s’en mêle » en 2022.
Une référence partagée
Ne faisons pas comme si nous n’avions, les un·es ou les autres, aucune mémoire. La liste des initiatives qui n’ont pas été véritablement soutenues par les forces des gauches est longue.
Et l’Assemblée des quartiers porte de nombreuses références au MIB1Mouvement de l’Immigration et des banlieues, une organisation issue de la Marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983. Cette action fut rebaptisée par la gauche et les médias la « Marche des beurs ».
Fondée en 1995, le MIB s’est, petit à petit, mis en sommeil. Il n’a jamais trouvé de successeur. Il y a pourtant eu diverses tentatives : Forum social des quartiers populaires, Force citoyenne populaire, Front uni des immigrations et des quartiers populaires…
Le danger de l’extrême droite
Aujourd’hui, les premier·ères concerné·es voient comment les menaces se précisent. Leur sort ne change pas. Ils constatent la cohésion des extrêmes droites soutenues par LR. Ils ont suivi les débats autour de la loi immigration de Darmanin et Macron. Ils vivent au quotidien les traitements indignes.
Magda Jouini, l’une de leurs porte-parole, 42 ans, administratrice du Front de mères – un syndicat de parents, très actif en Seine-Saint-Denis, qui lutte contre les discriminations et les violences, – résume leur décision : « Aujourd’hui, nous n’avons plus le choix, nous sommes dos au mur. Soit, nous reprenons en main le narratif des quartiers face aux discours fascisants et aux dérives autoritaristes, soit nous laissons la place à l’extrême droite ».
Une initiative porteuse d’espoir
Cette initiative vient à point nommé pour développer les mobilisations anti-racistes.
Peut-elle se développer ? Peut-elle surmonter les défiances et divisions héritées des années de faux espoirs et d’échecs ?
Cela dépend en grande partie de toutes et tous ceux avec qui nous travaillons à construire une force politique, une gauche d’émancipation portant une réelle alternative.
Une bonne nouvelle qui appelle des réactions !
Pour compléter, vous pouvez consulter :
- Un article : « Pour exister enfin dans le débat public, des militants lancent l’Assemblée des quartiers » sur le site du Bondy Blog
- La pétition : « Pour une Assemblée Nationale des quartiers »
- Un excellent article : « Les habitants des quartiers populaires exigent leur place dans les espaces du militantisme social et politique » publié par The Conversation.
Notes
- 1