Callac : Quelques réflexions après l’abandon du projet Horizon.

Le projet d’accueil de réfugié·es baptisé « Horizon » est le résultat d’un contrat passé entre le maire divers gauche de Callac et la fondation privée « Merci ». Ce projet visait à accueillir de façon progressive des familles de réfugié·es pour redynamiser cette commune située en centre-Bretagne.

Une tradition d’hospitalité

Cette commune a une longue tradition d’hospitalité, depuis les réfugiés républicains espagnols dans les années 30, jusqu’à l’accueil récent de plusieurs familles de réfugié·es déjà installées dans la commune. 75 emplois vacants avaient été dénombrés dans le domaine de la santé, du commerce, de l’artisanat, de l’agriculture.

Même si ce projet, aux principes incontestablement humanistes et généreux, conduit à se poser des questions concrètes (Comment s’opère le choix des familles ? Sur quels critères ? Pour quels salaires et quel niveau de vie ?), les habitant·es de la commune étaient plutôt favorables au projet. Le maire n’a cependant pas, au départ, associé la population à ce projet et a tardé à l’informer, ce qui a suscité des questionnements et des craintes. Mais, parmi ces Callacois·es opposé·es au projet ou exprimant des réticences, beaucoup se sont détournés des agissements de l’extrême droite.

Un cheval de bataille pour l’extrême droite

Très vite, l’extrême droite (Reconquête, troupes du RN, Action Française, Identitaires, divers groupes nationalistes bretons d’extrême droite) a fait de l’abandon de ce projet un cheval de bataille.

En soutien au Conseil Municipal qui commençait à être malmené par la fachosphère, un front large, à l’initiative du Comité de Vigilance Antifasciste, s’est formé. Il regroupait citoyen·nes, associations et organisations syndicales (CGT, Solidaires, FSU) et politiques (ENSEMBLE! , NPA, Gauche indépendantiste bretonne, PCF, FI). Ce collectif s’est constitué unanimement sur la base de l’ « accueil inconditionnel des réfugié·es et migrant·es, la liberté de circulation et d’installation ».

Le climat est alors devenu intenable dans le village. Même si les manifestations de rue ont tourné à l’avantage des progressistes contre la fachosphère venue de tout l’ouest de la France (Bretagne, Vendée, Normandie), le harcèlement au quotidien, la violence verbale et les menaces étaient effroyables tant sur les élu·es que sur les habitant·es qui s’étaient déclaré·es publiquement favorables au projet.

Une attitude ambigüe de la préfecture

Mais la préfecture a également joué un rôle plus qu’ambigu.

La protection policière était bien légère, comme l’a souligné, entre autres, la députée LFI/Nupes de la circonscription Murielle Lepvraud, ce qui lui a valu, en retour, un appel direct du préfet pour lui signifier son mécontentement.

Par ailleurs, le préfet des Cotes d’Armor n’a jamais caché sa préférence pour un autre projet sous contrôle gouvernemental et nettement moins ouvert en terme d’accueil et de suivi des personnes accueillies. Ensuite, la préfecture n’a jamais interdit les manifestations du regroupement facho alors que le préfet a, au moins une fois, été interpelé sur cette question par une élue départementale du PCF. Enfin, c’est un fait que Callac a été retiré « le temps des troubles » des opérations de revitalisation des territoires (ORT) menées dans le cadre de l’agglomération Guingamp-Paimpol.

Les élu·es municipaux de Callac, souvent non encarté·es et non organisé·es politiquement, se sont retrouvé·es seul·es, dépassé·es par la tournure des événements, désemparé·es. Ceci, sans compter la peur bien légitime. Ces élu·es ne comprenaient pas comment un projet – généreux de leur point de vue – pouvait conduire à une telle haine et de telles pressions.

Une attitude de plus grande fermeté de la part de la préfecture aurait-elle permis de refuser à la fachosphère la victoire politique qu’elle revendique désormais ?

Présence de la NUPES et travail intersyndical

À chaque manifestation, les militant·es NUPES étaient présent·es, bien insérées dans l’unité antifasciste, en particulier les militant·es d’ENSEMBLE!, de LFI et plusieurs du PCF. La députée NUPES/LFI de la circonscription de Guingamp était réellement présente sur le terrain et son soutien n’as pas faibli. Par contre, les élu·es PS, composante la plus forte de l’union de la gauche et des écologistes, majoritaire au Conseil Départemental, ont été bien silencieux·ses.

Côté positif : différents réseaux se sont rencontrés, ont travaillé ensemble. Des liens se renforcent, la structuration est plus forte. Des formations « Visa » (vigilance et initiatives syndicales antifascistes) sont organisées et regroupent des syndiqué·es avec une implication forte des structures départementales syndicales CGT, FSU, Solidaires.

Des perspectives multipes

Il faut maintenant que tout cela débouche sur des campagnes régulières de terrain. Un travail de fond doit s’engager, combinant rejet de l’extrême droite, solidarités concrètes envers les migrant·e·s et réfugié·e·s s et réponses alternatives pour revitaliser les communes du centre Bretagne. Pour cela, il faudra s’appuyer, entre autres, sur la présence et le renforcement des services publics tout en associant davantage la population à leur fonctionnement.

 

Le 28 janvier 2023

Christophe LEMASSON (ENSEMBLE! 22)

 


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