Le 4 mai 2024, à Paris, le Forum Europe va réunir diverses voix : communistes d’Alternative communiste, Verts Unitaires d’EELV, « insoumises » qui veulent renouveler leurs projets, socialistes opposés au retour de l’épisode hollandais, organisations « amies » (GDS, Génération.s, Nouvelle Donne, PEPS). Nous y avons convié toutes les forces de la NUPES ainsi que le NPA et le collectif Rejoignons-nous.

L’Europe ? Parlons-en !

Par Jean-Claude Mamet. Le 19 avril 2024.

Il serait temps en effet de parler d’Europe. Bien entendu, « on » en parle beaucoup, dans les médias, les journaux. La question est abordée sous l’angle du rapport de forces sondagier entre les listes concurrentes dans l’espace politique de la France.

Mais est-ce satisfaisant ? Non !

Certes, la menace des extrêmes droites – additionnant le score du RN et Reconquête ! (jusqu’à 37% aujourd’hui) – en dit long sur la maladie du champ politique national et aussi sur la crise de la société. Ces projections décrivent l’intense effritement de l’attraction macroniste, que les gesticulations réactionnaires du « jeune vieux » Attal ne parviennent pas à stopper. Prétendre arraisonner un monstre (le RN) par des incantations « autoritaires » répétées ne peut pas fonctionner. C’est tout le contraire.

Combattre le RN par la vision internationale

De plus, pour être efficace, il ne suffit pas de s’en tenir aux frontières hexagonales. Il s’agit d’agrandir le champ et de parler d’Europe dans toutes ses dimensions. Il faut opposer aux visions du monde réactionnaires un « contre-récit » : non pas la rétractation identitaire et nationaliste. Il faut, au contraire, dépasser les frontières, redonner du souffle aux cultures continentales de gauche, assumer une bifurcation écologique et sociale, redonner du sens à la démocratie, aux aspirations citoyen·nes, au respect des cultures, des minorités, des nations opprimées.

Cela implique évidemment d’affronter la menace impérialiste russo-poutinienne, dans toutes ses dimensions, y compris ses alliés. Donc aider l’Ukraine, y compris sur le plan militaire, et l’accueillir dans le concert européen. Les frontières de l’Union européenne – élargies à l’est – ne doivent pas être figées autour du noyau le plus riche. Cela implique aussi de riposter aux reculs catastrophiques, depuis plusieurs mois, du new deal écologique bâti après 2019 (pourtant bien maigre), sous la pression des forces de droite ou agrariennes qui refusent les « normes » de protection de la santé et de la biodiversité.

L’Europe peut être un horizon pour un projet d’émancipation, à condition de rompre avec sa structure néolibérale et austéritaire, nivelant les acquis sociaux vers le bas, détruisant les services publics sous la pression concurrentielle.

Cette Europe des traités fondateurs – qu’il faut revoir de fond en comble – est cependant menacée de « dislocation » nationaliste, comme l’explique le document d’ENSEMBLE! : Une Alternative en Europe. La généralisation de processus de type brexit semble marquer le pas, mais les coalitions de droite et d’extrêmes droites progressent dans plusieurs pays, confortant des régimes illibéraux, liés à Poutine ou aggravant partout les reculs démocratiques.

Il faut donc défendre une Alternative européenne, de manière résolue et offensive. Il est dramatique que, jamais jusqu’ici, les forces de gauche et écologistes d’Europe n’aient construit de campagne commune pour les élections au Parlement européen, seule instance élue. Et encore plus dramatique qu’en France – alors que la NUPES avait travaillé sur un socle de plus de 600 propositions communes sur l’Europe – les quatre forces principales qui la constituent ont préféré faire liste à part. Chacune préparant à sa manière la bataille du leadership présidentialiste (2027), plutôt que de donner au projet européen une force internationale capable de mieux résister au bloc réactionnaire.

Ne pas se résigner

Le mouvement ENSEMBLE! a soutenu les initiatives qui allaient dans le sens d’une liste unitaire, par exemple l’initiative des jeunes de la NUPES à l’automne 2023, qui s’en prenaient avec véhémence aux dangers sectaires de « leurs ainés ». Dans le Collectif de liaison et d’initiative ouvert (CLIO) – formé en octobre 2022 avec nos camarades de la gauche EELV, de la Gauche Démocratique et Sociale (GDS), de Génération.s, de Nouvelle Donne (ND) – nous avons contribué à soutenir un appel d’élu·es et de personnalités pour une liste commune.

Cela n’a pas abouti. Nous le regrettons vivement, mais nous appelons néanmoins fortement à ne pas bouder les urnes le 9 juin.

Et nous refusons de nous « faire une raison » en attendant passivement les décantations au lendemain du 9 juin. Probablement, des secousses se produiront, selon les résultats atteints. Soit chaque liste séparément, soit en constatant que le total des voix à gauche (autour de 30% des votant·es aujourd’hui) aurait permis sans doute de battre ensemble le courant Macron, mais aussi d’être la seule voie alternative au RN dans une campagne dynamique.

Nous avons donc construit collectivement l’initiative d’un FORUM EUROPE pour discuter sur le fond, pour montrer qu’un ciment commun existe, sans occulter des différences, notamment sur les questions internationales.

Un Forum avec qui ?

Ce Forum Europe du 4 mai 2024 à Paris réunit des voix et des courants nombreux : les communistes d’Alternative communiste (courant apparu à l’automne 2023 suite aux débats du PCF), les Verts Unitaires dans EELV, des forces « insoumises » qui veulent renouveler leurs projets, peut-être des socialistes opposés au retour de l’épisode hollandais, des organisations « amies » avec lesquelles nous agissons depuis longtemps (GDS, Génération.s, Nouvelle Donne, Pour une écologie populaire et sociale-PEPS). Nous y avons convié toutes les forces de la NUPES ainsi que le NPA et le collectif Rejoignons-nous avec lesquels nous avions appelé à un Forum pour l’Alternative le 2 juillet 2023.

Une séquence avec des syndicalistes et des associatifs est prévue sur les moyens de construire une Europe sociale harmonisée par le haut et des services publics européens. Une autre sur les normes écologiques à développer sans logique punitive, mais au contraire comme bien commun planifié à l’échelle globale et dans les territoires.

Nous parlerons de l’Europe dans le monde et de la guerre sur son territoire historique, comme de sa responsabilité dans le drame moyen-oriental.

Nous essaierons, avec des personnalités politiques, des sociologues et politologues, de dégager des pistes de propositions communes, pour préparer l’avenir.

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Il reste à réussir cette initiative. Elle le sera si autour de nous, autour des listes de gauche et écologistes, autour des acteurs et actrices des luttes, de plus en plus de personnes se disent : « Tiens ! Au moins eux et elles parlent d’Europe sans se faire des crocs-en-jambe, ni préparer une autre échéance. »