Une réunion s’est tenue à la Bourse du travail de Paris, le 3 avril 2024. Il s’agissait de débattre de la crise des Services d’Urgences et des réponses à y apporter. L’objectif était aussi de présenter la campagne des organisations engagées dans le Tour de France pour la Santé.

Campagne sur le service public de la santé : dénoncer, expliquer, proposer

Par Catherine Krcmar, le 14 avril 2024

Une mobilisation citoyenne

Fin 2022, face à une accélération de la dégradation de notre système de santé et à la gravité de ses conséquences, le collectif national « Notre santé en danger » – réunissant depuis 2008 des collectifs (y compris d’usager.ères), des associations, des syndicats, des mutuelles, des organisations politiques – a repris contact avec toutes les organisations. Il leur a proposé de réfléchir aux moyens de contribuer à une mobilisation citoyenne – unissant salarié·es et professionnel·les du sanitaire et du médico-social, usager·ères du système de santé et citoyen·nes – sur ces questions.

Plus d’une quarantaine d’organisations ont alors signé le texte « Nous vous accusons », « Vous, Emmanuel Macron et les gouvernements précédents, d’avoir mené des politiques mettant désormais en péril la santé de la population, dans toutes ses dimensions, physique, psychique et sociale ».

Le 6 avril 2023 a eu lieu, à la Bourse du travail : « Le procès des politiques de santé » que vous pouvez retrouver sur notre site. Dans les suites, l’idée est née d’un Tour de France de la Santé. Avec en ligne de mire le Projet de Loi de Financement de la Sécurité sociale 2023 (PLFSS 2023) puisque le sous-titre de notre Tour de France était « Pour un budget de la Sécurité sociale pour sortir de la crise sanitaire et satisfaire les besoins sociaux ».

Objectif atteint, mais avec des limites

Chaque collectif, comité, syndicat, tout rassemblement sur tout le territoire qui voulait s’engager dans une action de son choix était le bienvenu. De la Bretagne à Besançon en passant par l’Île-de-France ou Nîmes, des initiatives ont émergé, réunissant des personnes ne se connaissant pas forcément, mais ayant appris à travailler de concert. Pour défendre des urgences fermant la nuit et le week-end, pour un centre d’IVG, un centre de santé ou une maternité, menacés de fermeture, autour de la psychiatrie, de l’accès aux soins, de la défense de l’Aide Médicale d’État, etc.

Une belle réussite. Mais des limites. Il a été notamment difficile de passer de ces luttes locales à une réelle mobilisation nationale lors du vote du PLFSS malgré un beau travail unitaire avec de nombreux députés de gauche.

Nouvel appel contre les coupes sombres du PLFSS 2024

Devant l’annonce du PLFSS 2024 et les coupes sombres annoncées par Bercy, 70 organisations ont signé l’appel à mobiliser contre les attaques prévues : doublement des franchises, l’AME, les ALD, etc. Faire un inventaire exhaustif de la destruction de l’hôpital public et de tout ce qui concerne la santé, le social et le médico-social par Macron et ses prédécesseurs serait trop long.

Néanmoins, concernant l’hôpital et les urgences dont nous faisons un des axes prioritaires de notre campagne, des mesures sont nécessaires :

  • Arrêter la destruction de l’hôpital public déjà sérieusement entamée. On sait qu’il prend en charge les pathologies les plus lourdes – 96% des patients polytraumatisés, 84% de la réanimation, 93% des grands prématurés – alors que le privé lucratif choisit ses patients dits « rentables ».
  • Cesser la fermeture de lits qui ne s’est jamais arrêtée, y compris pendant la période covid et qui atteint des chiffres records. En 2022, ce sont encore 6 700 lits d’hôpitaux qui ont été fermés. Aux urgences, l’absence de lits disponibles a pour résultat la présence de patients plusieurs jours sur un brancard (avec une totale absente d’intimité et de respect) et des risques accrus de décès comme l’ont prouvé les études récentes. Passer une nuit sur un brancard augmente de 40% la mortalité à pathologie égale pour les personnes âgées. L’augmentation du nombre de passages aux Urgences découle pour une grande part de la prolifération des déserts médicaux. Sept millions de personnes n’ayant plus de médecin traitant, dont une grande partie est de la génération qui part en retraite.
  • Lutter contre le manque de personnel. Celui-ci, totalement épuisé, non reconnu et souffrant de la maltraitance qu’il inflige aux patients, fuit l’hôpital et on le comprend. La pseudo-réforme du numerus clausus, et Parcours Sup ne sont pas à la hauteur des besoins en futurs médecins et de leur juste répartition sur tout le territoire. Le manque de médecins dans le public témoigne surtout du fait que nombre d’entre eux, sachant ce qui les attend à l’hôpital, choisissent l’aller dans le privé. Les praticiens à diplôme hors Union européenne, sur lesquels repose pour beaucoup le fonctionnement des Urgences, sont également maltraités, mal rémunérés, avec de multiples CDD, les précarisant complètement.
Un exemple : le nouvel hôpital du grand nord parisien

Voilà un exemple concret de ce que l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris peut produire de nuisible en voulant édifier un nouvel hôpital dit du « grand nord parisien ». L’AP-HP a supprimé 300 lits et 1 000 postes de soignants, faisant de cet hôpital un hôpital usine, produisant une dégradation importante de l’environnement. Le but final était de raser les hôpitaux Bichat et Beaujon, hôpitaux de proximité, largement appréciés par la population, très accessibles et parfaitement rénovables. Le prix de cette opération est, pour le moment, chiffré à un milliard d’euros. Un 3ᵉ hôpital serait bienvenu, mais le collectif de défense l’exprime bien : « Pas là, pas comme ça, pas maintenant ».

En campagne jusqu’au PLFSS 2025

Pour notre campagne qui ira jusqu’au vote du PLFSS 2025, 3 axes sont nécessaires que nous devons mettre en œuvre tous ensemble : dénoncer, expliquer, proposer.

Pour cela, il nous faut construire des initiatives, des débats décentralisés, avec toutes celles et ceux qui ont souhaité continuer le Tour de France, donc construire des actions communes dans l’unité la plus large.

Le Tour de France de la Santé 2023 avait réuni plus de 70 organisations avec divers degrés d’implications. Continuons dans ce sens !